Chapitre 19 : C'est tout ce qui compte

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"Si vous regardez longtemps au fond des abysses, les abysses voient au fond de vous." - Nietzsche.

12 heures 30

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12 heures 30

Vénus

— Donne-moi ça ! hurle Marcus, alors que je suis recroquevillée contre la porte. 

Ce dernier s'avance brusquement, furieux par ma présence ici, dans son salon, puis saisit le téléphone que je tiens désespérément dans la main.

— Jeanne ! l'appelle-t-il. Viens ! Vite ! 

À cet instant, la haine me submerge. La peur aussi, mais comme elle était déjà là, bien en place au creux de mon ventre, elle me paraît en comparaison beaucoup moins vive. 

— Elle a utilisé le téléphone ! 

— Quoi ? Qu'est-ce que ça veut dire ? crache Jeanne, en revenant dans la pièce d'un pas prompt. 

Mes poings se ferment dans le vide et de la même façon qu'une décharge électrique, une vibration douloureuse me traverse le corps et me fait grimacer. 

— Pourquoi as-tu utilisé le téléphone ? demande-t-elle, agressive, en s'abaissant à ma hauteur. 

— Je... commencé-je en réfléchissant ardemment. Je… Je... voulais t'appeler. 

Son visage est à présent si proche du mien que je peux discerner le moindre de ses défauts. Qu’il s’agisse ou bien de ses lèvres gercées, dont les commissures sont jaunâtres, ou de ses yeux bouffis par la fatigue (ou par le mascara qui s’y accumule ?), j’en imprime malgré moi chaque aspect. 

Impossible pour moi d’espérer un jour l’oublier. 

Sans parler de son odeur… 

Silencieuse, Jeanne saisit l’encolure de mon tee-shirt et me soulève avec une facilité telle que j’en viens à me demander combien de kilos j’ai perdu ces derniers jours. Deux ? Cinq ? Huit ? Bon sang, et moi qui avais déjà la peau sur les os… Je dois avoir l'air morte. 

Devant mon air effrayé, mon assaillante plisse les yeux et arbore un air sceptique, comme si elle tentait de déchiffrer à travers mon regard ce que je trafiquais réellement il y a quelques minutes. Aurais-je signé mon arrêt de mort ? Aurais-je commis… l'erreur de trop ? Arrimant ses pupilles aux miennes et maintenant ses paupières grandes ouvertes, elle me dévisage de haut en bas. C'est à cet instant précis que je me racle la gorge et lâche, bouleversée : 

— J'avais besoin que tu m'achètes du… 

Ma bouche s’assèche. 

— Thé, soufflé-je.

Quand je réalise l’ampleur de ma bévue, il est déjà trop tard. Du thé ? Sérieusement ? Du thé ! Je cligne frénétiquement des yeux, interloquée par ma propre bêtise. J'ai quoi dans le crâne exactement ?

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