Chapitre 9

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- Elle est quand même assez spéciale.

- Je te l'avais dit.

C'est l'heure de la pause de midi et j'en profite pour parler de Alexandra avec Raven. Elle ne l'a pas vraiment vue, la section mécanique passant rarement par le cabinet. Je suis donc la seule d'entre nous deux à la fréquenter. Si on peut appeler ça fréquenter.

- N'empêche qu'elle a l'air sympa, reprend ma voisine. Je ne suis pas sûre que Nyko en aurait fait autant. Il aurait eu trop peur des conséquences.

- Je suppose que c'est parce qu'elle est nouvelle, je hausse les épaules.

- Je ne crois pas : au bout d'une petite semaine, tu comprends où tu as atterri. Le délai est dépassé depuis un moment maintenant. Surtout qu'elle doit voir passer pas mal de misère vu sa section.

- Je sais mais... je ne vois pas d'autre raison. Elle reste positive. Peut-être qu'elle a fait un stage aux urgences avant ? Là aussi, c'est pas trop mal dans le style.

- Même, ça n'explique pas tout. Et ce n'est pas si semblable que ça.

- Non, clairement pas...

Un petit silence prend place avant qu'elle ne revienne à la charge.

- C'est moi ou tu commences à apprécier cette fille, me taquine la brune. Pour quelqu'un qui ne voulait même pas la croiser, j'ai l'impression que tu te poses beaucoup de questions sur elle.

Je joue avec ma soupe presque incolore. Ce n'est pas avec ça que je vais réussir à me remplis l'estomac, même s'y on finit par s'y faire.

- Elle garde ma fille une fois par semaine. Je ne veux pas la laisser à une psychopathe.

- Si tu le dis, elle hausse les épaules. Au fait, tu vois le numéro 64 en combat ?

- Je crois. Celle qui est dans ta chambre ?

- Oui celle-là. Je les ai vu parler l'autre jour pendant le changement à la nouvelle. Elles avaient l'air de bien se connaitre. Tu imagines, tu retrouves une connaissance dans cet enfer ? Je me demande quel effet ça fait.

- Ça a été plus ou moins la même chose pour nous.

- Pas faux. Le prend pas mal, mais j'ai été contente de croiser un visage connu au milieu de ce merdier.

J'ose un petit sourire. C'est vrai que notre relation est assez particulière.

Quand nous nous sommes rencontrées, c'était ici. Enfin, du bon côté comme on l'appelle.

Nous étions toutes les deux perdues dans la vie et sommes rentrées dans la "période d'essais" plus ou moins au même moment. Durant ces deux mois, nous avons noué une forte complicité. Certains ont même fini par croire que nous nous connaissions avant. Ce qui n'était absolument pas le cas.

Pendant cette période, j'ai appris plus sur cette fille singulière. Elle a été abandonnée par ses parents aux portes d'un orphelinat. Elle n'était qu'un nourrisson à l'époque, quelques jours tout au plus. Malgré la famille aimante qui l'a recueillie à l'âge de cinq ans, elle s'est toujours demandé pourquoi ? Oui, pourquoi ses parents biologiques avaient-ils décidé de la laisser à la rue ainsi ? Qu'est-ce qui n'allait pas chez elle ?

De base, il était prévu que nous nous engagions en même temps. Mais elle a eu comme une révélation et a préféré tenter sa chance dans le monde, voulant le découvrir un peu plus avant de faire son choix.

Au début, je lui en voulais. Mais j'ai vite réalisé qu'elle avait été très bien inspirée en voyant l'autre côté du miroir. Je me disais qu'elle, au moins, aurait une vie décente.

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