Mean Vampires - Tome 2

Chapitre 10 - K

Nous y voilà donc. Polly nous a laissé une demi-heure de révisions, et nous devons désormais montrer nos performances aux autres élèves. Par chance, je n'ai pas réellement de texte pour cette partie de l'oeuvre.

Je n'ai pas cessé de repousser le moment de la danse, par crainte du contact d'Alec. Et maintenant, après une demi-heure de bavardages sur les didascalies et les répliques, je me retrouve face à une horde de regards rivés au mien au centre de la scène, au bras du jeune homme. Je n'ai jamais été aussi crispée. 

Sous les lumières éclatantes des projecteurs, et sous les yeux furieux d'une petite dizaine de lycéennes, il se penche à mon oreille, et murmure:

- Tu n'as qu'à me regarder, je mène la danse. Tu as l'air d'avoir deux pieds gauches, laisse-moi faire. Et ne sois pas aussi raide, je ne danse pas avec les manches à balai.

J'aimerais répliquer, mais je n'ai pas le temps; des notes de piano se font entendre, ses bras se posent sur mes hanches, et je suis entraînée sur la piste. Evidemment, je peine à suivre le rythme. Je suis presque tétanisée, j'essaye de trouver un point de repère, mais il n'y en a pas. Tout tourne autour de moi, et j'ai l'impression que je m'apprête réellement à faire une crise de panique.

" Fais un petit effort Kara!"

C'est la voix de Polly, qui m'exhorte à mieux me débrouiller. Je déglutis. 

Soudain, je me souviens du récent conseil d'Alec, me force à plonger dans ce regard qui me tétanise. Je me sens tout à coup apaisée, bercée par ce bleu rassurant. Dans un coin de mon esprit le passage du livre de la bibliothèque sur les quasi jaillit: "dotés d'un charme dangereux, hypnotisant". Est-il en train... d'exercer ce pouvoir sur moi? 

En tout cas, je sens que mes pieds ne peinent plus à le suivre. Je me sens aérienne, gracieuse, et mon stress semble avoir disparu. La Kara timide et renfermée a été remplacée par une danseuse prodige, et même ma posture me paraît plus droite. Je soupire d'aise , me laisse entraîner. Je n'ai jamais dansé auparavant, et je doute pouvoir danser comme ça à nouveau un jour. Alec esquisse un petit sourire, et étonnamment je lui rends. 

L'harmonie s'installe et soudain la salle me paraît déserte. Je n'entends plus les chuchotis des copines de Cécylia, les bruits parasites. Il n'y a plus que moi et Alec, et je me perds dans son regard. Je crois que je commence à ressentir quelque chose d'étrange à son égard...

Peu à peu, la musique ralentit, puis s'arrête, et nous ne tournoyons plus. Je suis arraché à ses yeux magnétiques par la voix de Polly, et les acclamations du public. Je me tourne, leur fait face.

Il y a un tout un rang qui applaudit, l'air abasourdi, comme s'ils avaient tous oublié que j'étais un "Ange". Seuls les amies de Cécylia font la moue, la plupart serrant du poing. La main d'Alec lâche la mienne et je reviens à la réalité. Je n'ose plus regarder dans sa direction. Polly me fait signe.

"C'était parfait! Parfait! Mon intuition ne m'a pas trompé sur vous, vous êtes la paire idéale. Les spectacle va être génial cette année! Vous pouvez vous reposer un peu en backstage maintenant", annonce-t-elle, souriante. 

La lumière semble m'éblouir tout à coup, les voix sont trop fortes. Je baisse les yeux et me dirige vers les coulisses en fixant mes pieds. J'ai reçu assez d'attention, et ne me retourne même pas pour voir ce qu'Alec fait.

Je franchis le rideau menant à la petite salle précipitamment, toujours sous le choc, et m'appuie à une table. Ma respiration est irrégulière,  mon coeur bat fort. Je ne comprends pas ce qui me met dans un tel état, et commence à sentir alors la peur m'envahir.

Lorsque Cécylia va savoir ça... elle est peut-être déjà au courant à cette heure!

 Je suis en panique. Il faut que je rentre le plus vite possible à l'internat. Je ne dois pas rester ici, j'ai été stupide. Stupide d'avoir accepté cette danse, stupide d'être partie m'enfermer dans un coin reculé seule.

Un bruit attire mon attention.

Cela provient de derrière moi, mais je n'ose pas me retourner.

Trop lente.

Ce sont les copines de Cécylia, j'en suis sûre. Ou peut-être pire, elle aurait pu déjà avoir le temps de mettre ses menaces à exécution. Paralysée par l'angoisse, je n'ose me retourner. J'essaye de respirer calmement.

Tu as connu pire Kara. Arrête d'être aussi faible.

Je me redresse, prête à subir ce qui m'attend. C'est vrai. Si je dois me laisser faire et encaisser, autant que ça soit la tête haute. Des pas se rapprochent. Je sens que mon invité est juste derrière moi désormais, et je lui tourne le dos.

Soudain, je sens de longs doigts dans ma nuque, balayant de courtes mèches sur leur passage. Une main tiède se pose sur mon cou, et je frissonne. Ce n'est pas la main d'un vampire. Je crois même savoir précisément à qui elle appartient...

Je sens le souffle d'Alec sur ma peau. Le voilà qu'il se penche vers mon oreille, et murmure:

"Ne sois pas aussi tendue mon Ange. Tu dansais divinement bien aujourd'hui, tout le monde a adoré. Si tu continues comme ça, nous allons faire un carton au spectacle". 

Le bout de ses doigts s'attarde un peu plus sur ma peau, puis plus rien. Je me retourne, lentement, mais je suis seule. Ma respiration reste irrégulière, et je me sens encore une fois toute bizarre. Ce n'est pas un comportement très amical de sa part, si? Je n'ai jamais eu d'amis, je ne sais pas. Peut-être que c'est comme cela qu'on sympathise avec les gens? 

Je sens qu'un sourire étire mes lèvres, malgré moi. Même si la menace de Cécylia est grande, je dois avouer que j'aime bien lorsque Alec se rapproche de moi ainsi.