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Tristan est resté avec Martin jusque tard dans la nuit, discutant et riant et rattrapant le temps perdu. Ils ne s'étaient pas vus pendant presque un an, mais leurs retrouvailles se sont faites si naturellement que c'est comme s'ils ne s'étaient jamais quittés. Pourtant, ils ne se parlent que rarement durant le reste de l'année. Un message au nouvel an, un pour l'anniversaire de Tristan fin janvier, et un autre pour celui de Martin début mai. Mais tous les étés ils se retrouvent de la même manière, dans leur coin habituel au milieu de la forêt.

Et maintenant Tristan est là, assis sur la terrasse au milieu de sa famille, se battant pour essayer de rester éveillé. Ils ont fini de manger mais un débat politique vient de s'engager entre sa mère et son grand-père. Personne n'ose les interrompre, alors ils restent tous assis autour de la table en silence, l'air un peu mal à l'aise, priant pour que la conversation ne dégénère pas.

Tristan étouffe un bâillement et jette un coup d'œil à la chaise longue à quelques mètres de lui. Qu'est-ce qu'il ne donnerait pas pour s'y affaler... Entourée de fleurs multicolores, elle est posée juste à l'ombre d'un grand arbre, l'endroit parfait pour faire une sieste. Le jardin de ses grands-parents n'est pas extrêmement grand, mais il est parfaitement entretenu. Leur maison est située à l'écart du village, le long d'une petite route tranquille. Ils n'ont pas beaucoup de voisins. Le cottage juste à côté de chez eux est occupé par des anglais qui ne sont jamais là, un peu plus loin se trouve la maison des Collet - un couple de retraités avec lequel ils font de la randonnée - et en face de celle-ci se dresse la maison des Hamon. La route passe devant une ferme, et rejoint la forêt juste derrière la maison de Jacques, un vétéran octogénaire qu'il ne faut surtout pas déranger.

Ici, tout le monde connaît tout le monde et rien ne vient déranger le calme du petit village.

Tristan regarde rapidement autour de lui. Personne ne lui prête attention, alors il sort son téléphone de sa poche arrière. Il s'apprête à ouvrir un jeu mais son père lui envoie un coup de pied sous la table. Tristan retient un grognement de douleur et lui lance un regard meurtrier. Son père, loin d'être impressionné, lui sourit avec espièglerie. Tristan est son portrait craché ; il a hérité de ses cheveux noirs, de sa peau pâle et de ses yeux bleu vif. Mais si son père frôle le mètre quatre-vingt-quinze, Tristan mesure bien dix centimètres de moins que lui, ce qui n'est pas pratique dans ce genre de situations. Il connaît bien son père et sait qu'il ne se fait pas facilement intimider. Et ses règles sont claires : pas de téléphone à table. Tristan souffle et range son téléphone avant de croiser ses bras sur sa poitrine, résigné.


Le reste de l'après-midi se déroule calmement.

À dix-sept heures les parents de Tristan reprennent la route, à dix-neuf heures il est assis à table pour le dîner, et à minuit il est de nouveau allongé à côté de Martin, sous les arbres de la forêt.

Au beau milieu de nulle part [bxb]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant