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Tristan a l'impression que le temps lui file sous les doigts.

Les journées s'écoulent à une allure folle, ses nuits sont plus courtes encore. Il y a trois jours, il contemplait de superbes paysages de bord de mer avec Martin. Il y a deux jours, il arpentait les ruelles rouennaises, avec Martin. La veille, il était avec Martin, encore. Et pourtant, le temps qu'il passe en sa compagnie semble toujours trop court.

Revenir dîner chez ses grands-parents le soir s'apparente presque à une torture, à présent. Tristan n'échappe pas au regard perçant de son grand-père, qui ne prononce pourtant pas un mot lorsqu'il le voir partir pour passer la journée avec Martin. Tristan ne leur a rien dit, et depuis la fin du weekend il se contente de s'éclipser tous les matins sans un commentaire. Il supporte de moins en moins sa famille, et il veut passer le moins de temps possible avec ses grands-parents.

Mais Tristan sait qu'il ne lui reste plus beaucoup de temps de toute façon. D'habitude, il s'ennuie terriblement et le mois s'étire interminablement, mais pourtant cette année tout semble aller trop vite. Il voudrait rester ici plus longtemps, mais à la fin de la semaine il devra retourner à Paris. Il ne lui reste que quelques jours, il le sait, mais il s'efforce de ne pas trop y penser. Il ne perd pas une seule seconde et essaye de profiter au maximum du temps dont il dispose.


Sur les coups de vingt heures, ce jeudi, Tristan annonce à ses grands-parents d'un ton détaché qu'il s'absente pour la soirée. Sans attendre une réponse, il enfile sa veste et se dirige vers la porte d'entrée, avant de se retourner pour ajouter :

- Ne m'attendez pas pour vous coucher, ne vous inquiétez pas, j'ai les clefs. »

Sa grand-mère acquiesce et Tristan sort de la maison en un coup de vent, presque certain de ne pas revenir dormir ici ce soir.

Il va avec Martin à la fête foraine de la petite ville voisine. Il s'agit de la seule attraction de l'été et il s'y rend tous les ans, avec ses grands-parents et ses sœurs d'habitude. C'est devenu une tradition plus qu'un réel amusement, et Tristan connaît toutes les attractions en long et en large. Les grands huit ne sont pas assez vertigineux, les lots trop faciles à gagner. Tristan aime les attractions à sensations fortes, il aime sentir son souffle se couper alors qu'il tourbillonne dans les airs, à des dizaines de mètres de la terre ferme. Il y a quelques années, il a expérimenté des montagnes russes incroyablement hautes et rapides lors d'un voyage aux États-Unis, et depuis, tout lui semble fade. Ce n'est pas le manège de la fête foraine d'une petite ville de campagne qui va faire s'envoler son cœur à nouveau. Il a accepté de s'y rendre parce que Martin lui a proposé, et parce qu'il veut passer le plus de temps possible avec lui avant de le quitter. Et cela lui donne une excuse pour ne pas passer la soirée avec sa famille, pour sortir prendre l'air et voir du nouveau.

Dès le moment où il entre dans la voiture de Martin, Tristan n'a qu'une envie ; que la soirée se termine et qu'ils se glissent dans son lit. Il ne s'attend pas à s'amuser énormément, et pense s'ennuyer une grande partie de la soirée. Et pourtant, il ne pourrait pas plus se tromper.

Aux côtés de Martin, Tristan redécouvre la fête foraine et son sourire ne le quitte pas une seconde de la soirée. Un monde fou est présent, tous les villages alentours semblent s'être donné rendez-vous, et les deux garçons se faufilent à travers la foule composée en grande majorité d'enfants. Tristan ne regarde pas à la dépense et ils essaient toutes les attractions, une par une.

La nuit tombe progressivement, et Martin s'arrête pour acheter de volumineuses barbes à papa. Tristan n'en avait pas mangé depuis très longtemps, et son cœur se tord alors que le goût sucré fait resurgir des souvenirs de son enfance.


Au beau milieu de nulle part [bxb]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant