Chapitre 21.3 - Lorsque seul l'innommable s'avère être une option

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— Oui, dans mon labo. J'y travaille, mange et dort. Mais ne vous y trompez pas, c'est une vraie villa de nos jours. J'ai l'eau courante, l'électricité, le chauffage et deux assistants qui me sont totalement dévoués. Qu'est-ce que je pourrais espérer d'autre ?

Intéressée par la conversation, Tanya s'approche.

— D'ailleurs je me demandais, comment vous la produisez votre électricité ?

— Grâce à un profond réseau géothermique qui sert à la fois à alimenter une turbine et à chauffer le bunker. La majorité du courant électrique est produit via ce système quasi illimité. Et quand nous avons besoin de plus de puissance, comme pour les grandes portes par exemple, on utilise un groupe électrogène installé dans les machineries.

— Tout le confort moderne, j'admire. Mais ça ne vous manque pas la lumière naturelle ? demande Tanya.

— En réalité, je me sens bien dans le bunker, je m'y suis habituée. On me fout la paix. Et je reste à l'abri d'une attaque nucléaire.

Rire général.

L'ambiance est particulièrement détendue, c'est agréable. Voilà pourquoi j'hésite à poser les autres questions qui me trottent dans la tête. Mais, après tout, ce n'est pas tous les jours qu'on est assis en face de la créatrice du Talium.

— Désolé Sarah si ma question vous ennuie, mais je me demandais, comment vous fabriquez le Talium ?

Son sourire s'effondre.

— Ah ! Je me doutais bien que vous alliez finir pas poser la question, mais pas si tôt dans la soirée.

Elle s'attendait à quoi ?

— C'est compliqué, vous vous en doutez.

Je m'en doute, oui.

— Je vais aller au plus simple, et au plus court.

Et la voilà partie à m'expliquer que l'opération est longue et délicate, qu'ils ont besoin de Thyo je ne sais pas quoi, qu'ils extraient de petits rongeurs – dégueu – et qu'une multitude d'autres produits sont nécessaires. Avec ça je ne me retrouve pas plus avancé.

— Johan ne devrait plus tarder, intervient soudainement Tanya. Vous voulez de l'eau ?

Pendant qu'elle nous sert, Sarah nous parle de Johan, coupant court à notre précédente conversation.

— C'est quelqu'un d'adorable, même s'il peut paraître rustre au départ. Il a vécu des choses très difficiles.

Et alors ? Il n'a pas le monopole des drames personnels celui-là.

— Il vous a déjà parlé de sa femme ?

Tanya est étonnée.

— Non, jamais. Il me parle régulièrement de ses enfants, mais jamais de leur mère. Vous savez, on ne se voit pas beaucoup en-dehors de l'hôpital.

— Eh bien, il a perdu sa femme récemment.

— Maladie ?

— Non, elle s'est faite assassiner lors d'une attaque de pillards alors qu'ils étaient sur la route pour venir ici. C'est encore récent, d'autant plus qu'il doit maintenant s'occuper seul de ses enfants.

— C'est terrible. Ça s'est passé où ?

— Pas très loin de la frontière française. Je n'ai pas retenu le nom de la ville.

— D'où son attitude méfiante, il n'a pas réussi à protéger sa femme et il s'en veut terriblement. C'est ça ?

— Oui. Mais au-delà de la mort de sa compagne, c'est son fils qui le préoccupe le plus. Le pauvre enfant a vu sa mère se faire tuer devant lui. Sa sœur est trop jeune pour s'en souvenir, mais lui n'arrive pas à s'en remettre.

Chroniques des Terres enclavées - Émergence partie 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant