Hope or Fight (spin off de Fight & Hope)

Chapitre 5 - Mendy

– C'était grave ? demandé-je à Cora en lui tendant la corbeille afin qu'elle y jette les compresses imbibées de sang.

Encore en pleine concentration, elle se débarrasse également de tous les emballages usagés, puis commence à désinfecter son matériel.

– Disons qu'on a eu de la chance, soupire-t-elle.

– On ?

– Oui, on. Si ce genre d'incident remonte jusqu'au bureau du Procureur, le refuge peut perdre gros. Et par la même, les hommes aussi. J'ai dû faire une suture, il n'y a plus qu'à espérer que ça ne s'infecte pas, et surtout que Jay ne fasse aucune vague. Et c'est plutôt sur ce point que je reste méfiante.

Sa remarque m'étonne. L'homme en question fait partie des rares employés que je côtoie peu, mais je n'ai pas souvenir qu'il y ait eu le moindre souci de ce genre, que ce soit avec lui ou un autre. Les tensions sont monnaie courante ici, bien évidemment, n'oublions pas que nous faisons évoluer des dizaines de gaillards écorchés vifs. Mais à ma connaissance, aucun n'a jamais franchi les limites imposées par mon frère.

– Jay ? Il a déjà posé problème ?

– Non, parce que Logan le garde à l'œil constamment. Mais je ne serais pas étonnée qu'il ait largement provoqué l'autre détenu. Tu as pu le soigner, d'ailleurs ?

Je laisse mon regard vagabonder et tords le nez, repensant à mon patient du jour. Si son attitude froide et détachée m'a particulièrement agacée, je ne me suis à aucun moment sentie réellement en danger. Il a été aussi calme et stoïque avec moi qu'il a pu être sauvage et violent lorsqu'il tenait Jay entre ses mains.

– Oui, rien de bien méchant. J'ai désinfecté la plaie et posé quelques sutures adhésives.

– Parfait. Merci de t'en être occupé.

Je m'ébroue brièvement pour chasser de mon esprit les deux iris obsidienne qui rechignent à déserter ma mémoire, tout comme cette mâchoire robuste et la puissance dominatrice qu'il dégage.

– Au fait, reprend Cora avec un petit sourire en coin, félicitations pour ton exploit de ce matin.

Je tords les lèvres, encore rongée par la culpabilité.

– M'en parles pas... J'ai merdé sur toute la ligne.

– En effet. Mais tu sais, je suppose que j'aurais pu avoir la même réaction.

– Pas faux, relevé-je en dressant l'index en l'air, je retiens l'argument pour le servir à ton homme quand il m'en remettra une couche.

Elle glousse discrètement en terminant de ranger ses affaires.

– Oh, tu sais, je suis sûre que les choses rentreront vite dans l'ordre. Les hommes sauront gérer cette histoire sans remous, ils en ont l'habitude. Logan va bouder un peu, histoire de te donner une leçon, mais ça n'ira pas plus loin que ça.

Au même moment, le bruit de la porte attire mon attention, et la mine renfrognée du sujet de notre conversation me renvoie sans délai dans les méandres de ma culpabilité. Mon frère fait un travail de dingue avec ce refuge, que ce soit avec les animaux ou les hommes qu'il emploie, et j'ai le chic pour tout mettre en péril en un claquement de doigts. Juste parce que je ne suis qu'une pauvre fille à papa immature, incapable de contenir mes humeurs.

– Merci pour les soins, vous avez fait du bon boulot, concède-t-il en venant déposer un baiser sur le front de sa femme.

Tiraillée entre l'envie de m'excuser à nouveau pour mon comportement de ce matin et celle de plutôt profiter du fait qu'il passe à autre chose, je cherche un sujet à aborder pour sonder l'état de son ressenti vis-à-vis de moi. Une nouvelle fois, un regard ébène s'impose dans mes pensées.