Partie vingt-cinq

2.8K 227 115
                                    

Le cerveau encore embrumé de son sommeil perturbé et le crâne déjà traversé par la migraine, il ouvre les yeux sur le plafond pâle de son salon et prend immédiatement une lourde inspiration. 

Même à peine sorti de son inertie, les souvenirs de sa soirée d'hier lui sautent au visage sans lui laisser le moindre répit et, en étirant un bras au-dessus de son visage, il tâtonne sous la couette à la recherche de son portable abandonné.
L'écran affichant un petit sept heure trente, il referme les yeux avec l'espoir de se rendormir encore cinq minutes.

C'était bien sûr sans compter le grondement sourd de son ventre qui lui fait plisser le front et se rendre compte, seulement maintenant, qu'au milieu du désastre de cette soirée ils n'ont même pas mangé.

Déjà agacé et un peu honteux, d'avoir laissé son père partir se coucher sans rien lui proposer, il pousse mollement la couette avec ses pieds jusqu'au bout du canapé et extirpe son corps du matelas encore chaud, certain de ne plus pouvoir retrouver le sommeil.
L'écho d'un mouvement dans la cuisine lui fait relever la tête alors qu'il pensait être le seul déjà réveillé, d'ailleurs il n'a absolument pas entendu ses parents sortir de la chambre, encore moins traverser le salon.
Il cherche ses vêtements de la veille au pied du canapé, histoire de ne pas se présenter à moitié nu et, en frottant son visage une dernière fois, se redresse sur ses jambes pour marcher jusqu'à la cuisine en donnant un peu d'ordre à ses cheveux emmêlés.

Trouvant seulement son père dans la cuisine, il étire son visage d'un vague sourire endormis avant de lui indiquer le placard qu'il semblait justement chercher en tirant sur toute les poignées de la cuisine.

- Où est maman ?

Déposant une paire de tasses sur le socle de sa cafetière, il presse son dos contre le petit plan de travail et croise les bras sous sa poitrine en attendant que la machine chauffe.

- Dans la salle de bain.

Si la nuit lui a permis d'apaiser les tensions de son estomac noué par l'angoisse, il n'en a pas pour autant oublié le goût désagréable de la rancœur et des doutes qui fourmille encore sous sa langue.

- Vous allez rester quand même ?

Même en gardant Izuku au téléphone jusqu'à presque trois heures du matin, il a eu beaucoup de mal à faire taire les grésillements de sa poitrine, et l'excédent d'émotions qui pulsent encore entre ses tempes accompagne joyeusement son mal de crâne de bon matin.

- Je pense que oui, en tout cas elle n'a rien dit de particulier ce matin.

En pressant le bouton de sa cafetière, dont les vibrations criardes viennent couvrir le silence quelque peu gênant qui s'installe, il camoufle une fois de plus son visage harassé derrière sa main.
Pour dire vrai, l'idée que sa mère n'ait pas exprimé le souhait de rentrer chez elle le rassure autant qu'elle l'inquiète.

Parce que, de deux choses l'une, soit elle n'en a pas terminé avec lui, soit il s'apprête à subir, pendant tout un week-end, l'ambiance la plus lourde et embarrassante qu'il ait jamais connu.
A ce titre, il en est encore à se demander comment aborder sa propre mère quand il perçoit le cliquetis caractéristique du verrou de la salle de bain résonner à travers le petit couloir de son appartement, et il enfonce un peu plus son dos dans le stratifié, imaginant utopiquement pouvoir se fondre dedans et disparaître.

Et alors qu'il se prépare à une joute verbale ou autre combat de regard, son visage entier s'arque de surprise quand elle se pointe dans la cuisine en le gratifiant d'un sourire tout à fait innocent.

- Bonjour chéri.

Bien trop stupéfait pour lui répondre, il tourne plutôt ses yeux ahuris vers son père qui, en haussant les épaules, ne semble visiblement pas plus avancé que lui sur sa curieuse humeur.
Mais la manière qu'elle a d'ouvrir les placards et de jacqueter comme si tout demeurait normal le met, surtout, encore plus mal à l'aise que si elle s'était contenté de l'ignorer ou de jeter sur lui des coups d'œil insistants.

Être nous [ KATSUDEKU ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant