J'esquivai un poing qui fusa dans ma direction. Si je ne m'y étais pas soustrait, il m'aurait atteint au visage et fait perdre l'avantage que j'avais réussi à conserver jusque-là. Ils étaient initialement cinq : trois étaient encore debouts devant moi, dont l'un d'entre eux gravement amoché par mon uppercut.
Ils avaient surgi brusquement au moment où je m'y attendais le moins, alors que je parcourais les rues sombres de la ville. Le crépuscule avait fini par disparaître, laissant place à une nuit noire remplie de cette atmosphère de danger perpétuel. Ils m'avaient pris en tenaille, trois d'un côté de la ruelle, deux de l'autre.
Comme les bâtiments étaient assez distancés l'un de l'autre, je pouvais me battre sans craindre de me faire acculer dans un coin. J'étais parvenu à assommer rapidement les deux premiers d'un simple coup dans la nuque bien placé. À cet instant, j'aurais pu fuir, balayer celui à ma droite et m'échapper.
Mais j'en avais marre de courir.
La tombée de la nuit était propice aux rassemblements des gangs, des bandes rivales, des drogués ou des voleurs. J'étais sûr qu'ils tenteraient de s'en prendre à moi, pâle silhouette dans les ombres du soir.
Je n'étais toutefois pas aussi désarmé que j'en donnais l'air. Je bouillonnais d'adrénaline et d'énergie qui électrisaient chacun de mes muscles. J'avais besoin de me défouler, de laisser déchaîner ma frustration sur quelqu'un. Ça avait été sur eux, notamment parce qu'ils avaient cherché les ennuis en m'accostant.
Je me campai sur mes positions, prêt à contrecarrer leurs attaques. J'avais l'impression d'être à mon cours d'auto-défense avec le Sergent Davis qui nous criait des ordres – et parfois des reproches – dans les oreilles. J'arrivais même à percevoir dans ma tête sa voix, ses inflexions strictes et son ton intransigeant.
« Baissez votre garde et ils vous atteindront à l'abdomen ! Vous voulez avoir les viscères à l'air, soldat ? »
Le premier des trois à attaquer fut celui de droite. Je le parai sans soucis, surpris par la faiblesse de son coup. Il devait tâter le terrain afin de voir face à qui il se trouvait. Voyant que j'opposais une féroce résistance, ils s'y mirent à plusieurs. L'un leva le pied, prêt à me l'enfoncer dans la poitrine. Je l'attrapai vivement, le déséquilibrant, et l'envoyai paître plus loin.
Et un de moins !
En voyant leurs amis à terre, les deux derniers redoublèrent de brutalité. Ne pouvant tout esquiver, je me reçus un poing dans la figure. Je reculai en soufflant et essuyai le filet de sang au coin de ma mâchoire, après avoir craché celui que j'avais dans la bouche.
Ça promettait d'être intéressant.
Peut-être trouverai-je enfin un adversaire à ma taille ce soir ? J'en avais assez du menu fretin. J'étais avide de combats, de coups, de cette sensation prenante de peur et de danger qui me saisissait quand je perdais pied. J'étais friand de cette pression soudaine qu'était l'adrénaline dans mes veines et qui me rappelait tant mon pouvoir.
Je serrai le poing, blanchissant mes jointures. J'étais prêt à en découdre. Les deux garçons attaquèrent de front, surpris que je n'aie pas cherché à m'enfuir. Je n'en avais nullement l'intention. Ma faim de sensations fortes restait inassouvie. Je parvins enfin à me débarrasser du premier assaillant et coinçai sans mal le second contre un mur de pierre.
J'enchaînai les coups, dans l'estomac, dans l'abdomen, jusqu'à ce qu'il me supplie d'arrêter. Je me délectais de la peur dans ses yeux. J'avais conscience que quelque chose ne tournait pas rond chez moi, mais j'avais besoin de ces confrontations imprévues.
Elles me faisaient me sentir encore puissant, malgré la disparition de mes pouvoirs et de mes amis. J'eus le sentiment de faiblir à cette idée, mais me ressaisis rapidement pour ne pas me laisser sombrer.
J'étais maître de ma vie.
— Aldo, arrête.
La voix qui surgit de nulle part me frappa en plein cœur, interrompant ma bataille acharnée contre ce délinquant. Je me retournai, pris d'une fièvre subite, et cherchai la propriétaire de ces paroles. Je les avais entendu aussi distinctement que si elle les avait chuchoté à mon oreille.
Mais la ruelle était vide. Il n'y avait que les corps de mes victimes et moi.
Je regardai celle que j'avais entre les mains. Il avait perdu conscience et semblait en piteux état. Je le lâchai subitement. Il s'écroula par terre, telle une poupée de chiffon. La bile me remonta dans la gorge, acide et brûlante. Qu'avais-je donc fait ? Je prétendais tout contrôler mais en réalité, c'était le contraire. J'étais en train de perdre pied petit à petit.
Je passai une main sur mon visage tiré. À quand remontait la dernière fois que j'avais dormi d'un vrai repos ? Bien trop longtemps pour que je m'en souvienne. Si cet écho du passé ne m'avait pas arrêté, ce jeune serait mort par ma faute. Même en existant plus dans la vraie vie, Zoé continuait de m'aider, de me soutenir, de me ramener dans la bonne voie.
Je me relevai après avoir vérifié le pouls de ma dernière victime. Je ne devais pas m'attarder ici. Je fis un pas avant de percevoir un mouvement dans mon champ de vision. L'un de mes assaillants était encore conscient et avait cru que je voulais m'en prendre de nouveau à lui. S'il savait que je m'apprêtais seulement à quitter les lieux...
— S'il te plaît, ne me fais pas de mal ! geignit-il d'une voix apeurée. Je te dirai tout ce que je sais sur celui qui nous a envoyé !
VOUS LISEZ
SIGMA ENERGY - T2 - Le Brasier de la Rébellion
FantastiqueAfin de limiter le risque de ruiner toute forme de suspense, il n'y aura aucun résumé sur ce tome. ⚛ LE RESTE DE LA SAGA SIGMA ENERGY ✅ SE T1 - L'Étincelle de Liberté ☑ SE T3 - Les Cendres de l'Ultime Combat ☑ SE T4 - Les Vestiges de l'Avenir