Partie vingt-six

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Il y a parfois des instants comme ça, où on a l'impression de jouer sa vie. 
Et quand on y réfléchi, c'est sans doute un petit peu le cas aujourd'hui pour Izuku en arrivant chez sa mère un peu après dix-huit heures trente. 
Pourtant, il fait le choix de ne pas revenir sur ses décisions et certitudes, depuis la conversation téléphonique avec Katsuki vendredi soir il ne peut plus se permettre de marcher ainsi sur le fil des doutes.
Bien sûr, pas qu'il ait l'intention de tout laisser tomber à la moindre perturbation, il n'a jamais eu vocation de s'arrêter aux avis et à la sensibilité de son entourage. 
Mais il ne peut plus continuer de prendre le risque de jouer sur deux tableaux en se contentant de prier pour qu'ils ne se croisent jamais.

Ce soir, il est plus que jamais sûr de lui, et s'il n'a pas encore décidé du moment exact où il parlera à son fils et son ex-femme, il est bien déterminé à ne plus rien cacher à sa mère.
Alors, après avoir laissé Katsuki seul à la maison et avant de ramener Kota chez Ochaco, il se campe fermement devant la porte d'entrée de son ancienne maison familiale, prend une dernière inspiration avant d'y toquer et entre en adoptant une posture résolue.

Hier, quand Inko est venue récupérer Kota à sa demande, il a fait preuve d'honteuses impolitesses en éjectant rapidement la conversation sans même lui proposer d'entrer prendre un café, et nul doute qu'elle a passé ces deux jours à se questionner sur les raisons de cette étrange histoire.
Mais, à son habitude, elle s'est montrée incroyablement compréhensive, acceptant de rester dans l'ignorance totale jusqu'à maintenant et récupérant son petit fils sans faire de réflexions.

Alors, même s'il a un peu l'impression de jouer sa vie ce soir, il arrive convaincu et plus apaisé que lors de l'incident dans le café.
Néanmoins, après avoir salué sa mère dans la cuisine, sa priorité absolue en mettant un pied dans le vestibule reste d'aller chercher son garçon dans la salle de jeu pour l'embrasser et lui demander pardon pour ce fâcheux imprévu, quand bien même il n'a pas l'air d'en avoir particulièrement souffert.

Même s'il n'en veut pas un instant à Katsuki pour son arrivée tonitruante, larguer son fils dans la voiture de sa mère à la dernière minute ne lui a assurément pas fait plaisir, et finalement, c'est lui-même qui peine à se pardonner.

- Izuku ?

Assis entre une armée de super héros et une tour en Kapla, il tord le haut de son corps pour trouver le regard de sa mère, essuyant ses mains sur un torchon contre le montant de porte.
L'étincelle inquiète qui traverse ses yeux accentue les petites rides de son visage maternel, et il ne peut que lui sourire pour tenter de la rassurer en même temps qu'il prend appuie sur ses deux mains pour se remettre debout.

Laissant son fils à ses jeux d'enfants, il traverse son ancienne chambre et, dans un réflexe tout juste à moitié calculé, prend sa mère dans ses bras, peut-être un peu pour se rassurer lui aussi.
L'échange ne dure au final que peu de temps, mais suffit à transmettre l'intemporel message qu'elle envoie en serrant ses bras autour de ses épaules.

Je suis là.

Il s'attarde toutefois à jeter un dernier coup d'œil à l'intérieur de la pièce, s'assurant que Kota ne les suivent pas, avant de se lancer dans le couloir pour atteindre le salon.
Il a beau être sûr de lui, il n'en reste pas moins nerveux et mal à l'aise, au point de ne pas pouvoir se décider entre s'asseoir ou rester debout, et se retrouve à piétiner aléatoirement entre deux chaises sans jamais s'y installer.

- S'il te plaît, assied-toi, tu me rend nerveuse à tourner en rond.

Dans l'hésitation, il fait craquer les os de sa main, imposant une grimace sur les traits d'Inko, assise en face de lui, et qui connaît suffisamment son fils pour savoir ce que ce réflexe signifie.
Si elle s'est longtemps battue avec lui pour qu'il arrête de tordre bruyamment ses anciennes blessures, elle apprécie finalement parfois cet automatisme, qui lui a déjà permis de lire entre ses silences.
Même s'il n'empêche qu'elle aurait largement préféré que son fils n'ait jamais eut à se retrouver le bras sous un caillou plus lourd que lui.
Et elle s'en souvient encore parfaitement, parce qu'elle n'a jamais autant paniqué de toute sa vie qu'au moment elle est montée dans sa voiture en courant plus vite que ses jambes ne le lui permettaient pour rejoindre l'hôpital où on l'avait emmené.

Être nous [ KATSUDEKU ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant