Être nous [ KATSUDEKU ]

Partie vingt-huit

La pluie battante d'une giboulée de mars frappe les vitres fermées de la maison.
Elle devrait le mettre sur la voie de ce qui se prépare à arriver, mais il est confiant, Izuku n'a pas abandonné ses convictions d'il y a deux semaines.
Katsuki est rentré chez lui, Kota est revenu, il repartira ce soir chez sa mère.

Il s'est forcé à attendre le dernier moment pour parler à son fils, il parlera à Ochaco tout à l'heure, quand il la verra.
Les mots ont été difficile à trouver, le petit garçon est encore si jeune, il n'est même pas sûr qu'il comprendra, mais il va lui dire.
Il l'a fait venir dans le salon et s'asseoir sur le canapé, il a éteint la télévision, éloigné son portable, pour être uniquement avec lui, partager complètement ce moment si particulier et délicat.
Il ne peut pas dire qu'il se sent nerveux, il sait qu'il n'a rien à craindre de son fils, mais son ventre vibre un peu d'une appréhension certaine.

Tous les deux assis en tailleur, face à face, ils se regardent en souriant.
Ils ont presque le même sourire, celui qui transpire la bienveillance.
Izuku frotte ses mains entre elles pour s'encourager et, impatient d'en savoir plus, Kota trépigne entre deux coussins.

-Tu te souviens de Katsuki, n'est-ce pas ?

Le petit garçon sourit, évidemment qu'il s'en souvient.
C'est vrai qu'il ne l'a pas vu depuis quelques semaines, mais il n'a pas oublié ce monsieur qui a accepté de le regarder déballer ses jouets plusieurs fois, ils ont déjà mangés ensemble aussi.
C'est un ami de son père, il est gentil.

-Oui.

Même s'il ne comprend pas toujours la complexité du monde des grands, il est en mesure de percevoir l'hésitation dans les traits de visage de son père.
Il ne sait pas ce qu'il se passe, mais il comprend qu'il a quelque chose d'important à lui dire.

-Tu sais que maman et moi on n'est plus amoureux.

Même s'il ne voit pas très bien ce que sa maman vient faire dans cette histoire, il hoche calmement la tête.
Il sait qu'ils ne s'aiment plus, il n'a pas très bien compris pourquoi, mais il en a conscience.
Et puis, ils continuent de l'aimer lui, alors il a réussi à s'accoutumer au fait qu'ils ne vivent plus tous les trois dans la même maison.
Il vit avec, ça ne lui fait presque plus mal, il est juste un peu triste quand il ne peut pas fêter son anniversaire avec ses deux parents en même temps.
Il a pris l'habitude d'avoir une vie en double, dans chacune de ses maisons, il a une brosse à dent, des jouets différents et plein de vêtements. 
La maison de maman ne ressemble pas du tout à celle de papa, la télé est plus grande mais la cuisine est plus petite. 
Il y aussi un étage, sa chambre est en haut, c'est drôle mais il n'a jamais le droit de courir dans les escaliers, pourtant il aimerait bien des fois. 
Maman dit toujours que c'est dangereux. 

-Et maman a un nouvel amoureux, pas vrai ?

Il remue la tête en regardant un peu au plafond, c'est vrai qu'un homme qu'il ne connaissait pas avant s'est invité de plus en plus souvent dans le salon de sa deuxième maison.
Au début, il ne lui parlait pas trop, c'est un monsieur très sérieux qui l'intimidait un peu les premières fois.
Souvent, il lui parle comme à un adulte et il ne comprend pas toujours les mots qu'il emploie, mais il n'est pas méchant, il l'a emmené au parc une fois.
Il sait qu'il s'appelle Tenya, il a toujours des lunettes et des vêtements qui ont l'air de couter cher, ils sont beaux et ils sont doux, mais papa est quand même plus beau, surtout quand il met des pulls en laine, ça lui va bien.  

-Oui.

Il s'est habitué à la présence de cet homme au fil des jours, même s'il n'a rien à voir avec son père.
Tenya est si carré, toujours calme et mesuré, il est sympathique mais il ne rit pas beaucoup.
Son papa, même s'il le gronde parfois quand il dessine sur les murs avec ses feutres, est bien plus drôle.
Il joue avec lui pendant qu'il prend son bain, il lui fait des chatouilles avant de lui lire une histoire le soir, et il adore quand il lui fait des bisous sur le front quand il est malade.
Même si Tenya lui offrait tous les jouets du monde et le laissait manger autant de gâteaux qu'il le souhaite, il préférerait quand même son papa.