— Billy ! Ils viennent d'arriver.
Au moins sept heures que nous les attendons, pas trop tôt. Mais pourquoi c'est moi qu'il vient prévenir celui-là ?
— Va plutôt le dire à Akram. Et tant que tu y es, si tu pouvais lui suggérer de charger les prisonniers et les cadavres sans perdre de temps, j'en peux plus de cette foutue ville. Plus vite fini, plus vite parti.
Felix ne bouge pas, il reste planté devant moi. Il veut me dire quelque chose, mais il hésite, il cherche ses mots.
— Quoi ?
— Je ne crois pas qu'on reparte, en tout cas pas tout de suite.
— Qui t'a dit ça ?
Nouvelle hésitation.
— Personne, c'est juste une impression. Holzer est là, et il veut vous parler à tous les deux, toi et Akram.
— Holzer ?! Mais qu'est-ce qu'il fout là ?
— Je n'en sais rien. Il attend sur le parking en bas de l'immeuble.
C'est pas bon ça. Il n'a jamais été question qu'il vienne à Walldorf. Et pourquoi voudrait-il me voir ?
— Tu sais quoi Felix, va t'occuper des prisonniers avec les autres. Emmenez-les près du camion, je vais chercher le Syrien.
Je me lève et termine d'une traite le verre d'eau offert par Marvin, un habitant de la communauté de Walldorf particulièrement soucieux de protéger sa famille. Je le salue, remets mon sac à dos sur les épaules, mon bonnet sur la tête et saisis mon arme avant de sortir de l'appartement.
Pourquoi le sergent est-il venu ici ? Aux dernières nouvelles nous devions attendre le fourgon pour charger les prisonniers et les corps avant de rallier New Town à pied. Il n'a jamais été question d'Holzer.
Perdu dans mes pensées, je n'ai pas vu défiler les escaliers de l'immeuble, me voici déjà au rez-de-chaussée. Je croise quelques personnes et leur demande si elles savent où se trouve Akram. C'est finalement ma quatrième tentative qui m'aiguille vers une maison un peu plus loin. J'en ai marre de lui courir après.
Dehors, la luminosité commence à décliner, dans une heure il fera nuit, et il a cessé de neiger. Les quelques pouces de poudreuse fraîche tombés ces dernières heures recouvrent les toits et les sols. Les nombreux allers et retours de la population ont dessiné des sillons dans le fin manteau blanchâtre, révélant les itinéraires les plus fréquentés. À cette heure, peu de monde se risque à l'extérieur, les habitants de la communauté se sont réfugiés dans leurs appartements et maisons où ils s'entassent autour d'un petit réchaud à greloter sous des couvertures. Toute notre unité est dispersée dans les différents logements, à attendre, comme je le faisais il y a encore quelques minutes. Les rares qui osent affronter le froid le font par obligation, question de survie. Il faut bien ramener de l'eau, de la nourriture ou de quoi alimenter le feu. Bien que discrets, les habitants de la communauté se sont montrés reconnaissants en nous ouvrant leurs portes pour nous mettre à l'abri du froid.
J'arrive devant la maison d'Akram. Quelqu'un sort. Par chance, c'est justement lui, il a dû me voir arriver par la fenêtre.
— Je venais te chercher. Holzer est...
— Oui, je suis au courant, Yvo est venu me prévenir.
— Yvo ? Mais qu'est-ce qu'il fout là lui aussi ?
— Il est arrivé avec Holzer.
Sans un regard, Akram me dépasse. Il sent l'alcool, c'est la première fois. Je ne savais pas qu'il buvait, il me semblait qu'il était musulman.
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Chroniques des Terres enclavées - Émergence partie 1
Science FictionAlors que la Troisième Guerre mondiale fait rage, le monde bascule dans l'escalade nucléaire le 21 septembre 2037, « The Enola Day ». Le conflit dure quelques mois, suffisamment longtemps pour défigurer la planète. En Europe, un immense territoire s...