Confiance

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Elle
Il
m'a sauvée. Je ne sais pas pourquoi il l'a fait. Je pensais qu'ils nous haïssaient tous. Je pensais que tous les humains étaient les mêmes... En tout cas, c'est ce que mes parents et mes grands-parents m'ont dit. Mais lui... J'ai senti qu'il n'était pas comme les autres. Sans peur, il les a retournés d'où ils venaient, tout en me protégeant. J'aurais dû le remercier, mais je ne l'ai pas fait. Quand ils sont partis, il s'était tourné vers moi et m'avait demandé si j'allais bien, si je n'étais pas blessée. Aveuglement, je lui ai fait confiance. De toute façon, à ce moment, je me suis dit que si je repartais maintenant, ces deux hommes n'auraient pas hésité à me tuer à la seconde où je sortirais de son territoire. Je l'ai donc suivi, malgré les recommandations de mes parents. Toutefois, je craignais le pire. Je ne savais pas ce qu'il attendait de moi. Il m'a menée chez lui, et après être sûr que personne n'était présent, m'a pris la main et m'a amené dans sa chambre. Il a ouvert sa porte à une créature telle que moi. Une fois entrés, il a fermé la porte et m'a donné des vêtements afin que je ne sois plus nue. Le fait que j'ai été ainsi exposée pendant tout ce temps sans qu'il regarde m'a fait rougir légèrement. Voyant mon expression, il s'est esclaffé en me souriant. Une fois convenablement vêtue, il s'est présenté. Il m'a dit qui il était, ce qu'il faisait, ses passions, ses rêves Je l'ai écouté, choquée par sa confiance envers moi. Après s'être présenté, il m'a demandée s'il pouvait avoir plus d'informations sur la personne que j'étais. Dans ses yeux, je pouvais distinguer de la curiosité et une pointe d'incompréhension, mélangés avec de la joie et du soulagement. J'en conclus qu'il désirait en savoir plus sur moi, mais également comment je m'étais retrouvée dans la situation dans laquelle j'étais le moment précédent. Les yeux des hommes ne savent pas mentir. C'est pourquoi je sais d'instinct qu'il n'a aucune intention malveillante envers moi ou mon espèce. Je me remémore alors les dernières heures et soudainement, tout revient d'un coup. Du feu, du sang, des cris, des hurlements. Si je n'avais pas vécu la scène, il aurait été facile de croire que je l'avais inventée. Il s'assoit alors sur son lit, à côté de moi. Je mets ma tête dans mes mains et commence à gémir douloureusement. Il me prend par les épaules, doucement et me les masse lentement. Je relève la tête et la mets sur son épaule, en gémissant tristement. Il m'étreint, plaçant sa tête sur mon épaule, frottant doucement et gentiment sa main dans mon dos. Je ressens la chaleur de son corps contre le mien, au travers des couches de tissu, et sens qu'il comprend ma douleur, même s'il ne sait pas pourquoi je la ressens. Je laisse tomber mes barrières mentales, lui faisant totalement confiance. Il me lâche, je sens que c'est à contrecœur, avant de me regarder dans les yeux. Je ne détourne pas le regard. Il me sourit. Un sourire franc et compatissant.

 Lui
Le soir tombe sur la maisonnée. Je l'ai laissée dans ma chambre, mais c'est parce que c'est la seule façon de la protéger. Elle m'avait fait comprendre qu'elle désirait se reposer. Je lui avais laissé mon lit, et elle s'était étendue sans entrer dans les couvertures. J'avais par la suite quitté ma chambre en fermant la porte doucement, avant que mes parents ne reviennent de leur travail. Cette femelle... Elle n'était pas humaine, mais cela m'importait peu. Ce qui m'inquiétait, c'était les deux hommes qui étaient à sa poursuite dans la forêt plus tôt. 

Je descends les escaliers et salue mes parents. Ils travaillent tous les deux de jour. Mon père travaille dans une firme d'assurance alors que ma mère, elle, est professeure en agronomie au cégep. Plus tard, lors du souper, je fais part à mon père du passage de deux hommes armés sur notre territoire, qui étaient en train de chasser. Je disais la vérité. Ces deux hommes voulaient visiblement tuer ou capturer la femelle que j'avais sauvée, mais je ne devais pas leur avouer qu'elle, une louve bipède, était présentement couchée dans ma chambre. Comme je ne connaissais pas leur réaction face à une telle situation, je cache plutôt que mentir. Mes parents s'étonnent de mon anecdote, et m'interdisent d'aller dans la forêt avant qu'ils soient sûr que ces deux hommes ne reviennent pas. Je soupire et continue à manger, visiblement troublé par cette limite.  Mon père m'indique que je devrai venir avec lui pour lui montrer l'endroit ou les chasseurs étaient venus. C'est en refoulant mon stress que j'acquiesce. Si jamais il voit les traces de que ces chasseurs poursuivaient, il appellerait la police ou les secours. Encore pire, il pourrait la tuer. C'était à tout prix ce que je voulais éviter. Après le repas, je suis forcé d'enfiler mes petites bottes et d'accompagner mon paternel dans la forêt, afin que je lui montre l'endroit où je les avais vu. Une chance que nous étions en été. De cette façon, il serait beaucoup plus dur de voir les traces. Je me rends donc avec lui vers l'endroit où je les avait vu. Une fois arrivés, des traces de bottes sont visibles dans les feuilles. Il semble pensif. Il examine les bottes et me fait signe de retourner à la maison. Pendant que je remonte, je l'entends parler aux policiers. Il relate la présence probable de chasseurs sur son territoire. Je perds le fil alors que je remonte vers chez moi. 

Rencontre InusitéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant