XXIV. La Lune Solitaire

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Sa douce noirceur engloutit l'or des lumières

Son croissant est ravagé de larmes incendiaires

L'astre revêche s'étend et devant le soleil prospère

Siennes sont les nues, nues de la Lune Solitaire


L'Aiguille darde, pique ; tranche, transperce et lacère

Jamais elle ne s'arrête ; dans l'air, dans la mer et sur la terre

Nul n'y échappe ; elle prend, viole, déchiquette et empale

Fauche, fauche ; tourne, nul ne la contourne, tourne et râle

« Je suis aujourd'hui quand j'étais hier, je suis aujourd'hui quand je serai demain

Je suis midi quand je serai ce soir, je suis midi quand j'étais ce matin »


Son pouvoir s'étend au-delà de Jour et de Nuit, sans jamais connaître la peur

Surpasse la peur car partout on la voit, elle nargue et darde à toutes les heures

L'astre revêche domine les mortels et sur les tombes prospère

Sienne est l'Aiguille, Aiguille de la Lune Solitaire


L'Aiguille rend coup sur coup dans le cou ; joue, coud et découd

Ne s'arrête pas pour un sou, ni pour les saouls ni pour les fous

N'a ni maternité ni magnanimité ni miséricorde ni merci

Nie la lumière et sème la misère, manie toute toile et jamais ne t'oublie

« Je n'étais pas mortelle, je serai toujours immatérielle, et je suis éternelle

Je suis ta séquelle, j'étais déjà solennelle, et je serai toujours cruelle »


Elle t'enserre, te perd ; te roule, te coule ; te bat, t'abat et t'avale

Elle te souffle, t'essouffle ; tu souffres dans le gouffre infâme du Mal

Elle te noie, c'est la loi ; elle te fauche et te débauche ; te désarme dans le vacarme

Blêmis, vieillis, pourris dans ton agonie, corps sans âme aux putrides larmes


Noires les siennes coulent, les larmes gélifiées

Pourpres sont ceux qu'elles touchent, les âmes putréfiées

L'Aiguille tourne, le cycle s'écoule ; demi-lune, pleine lune et croissant

La Lune Solitaire est immortelle, elle est la maîtresse du Temps.

Cher TempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant