Une pendule suspendue au-dessus, comme un chronomètre qui compte à rebours. Une main squelettique la tient mais personne ne peut la voir. Maîtresse du Temps, Déesse de la vie et de la mort, malheureuse créature dépourvue de sens mais pas d'émotions. Aveugle, sourde, muette, sans goût ni toucher. Elle gère la vie de gens qu'elle ne connaît pas. On ne pourrait pas dire "elle", personne ne sait à quoi elle ressemble. On la surnomme "La Créature".
Tic, tac. Tic, tac. La Pendule commence à ralentir et La Créature observe le visage paisible d'une petite fille. Elle ne doit avoir qu'à peine 5 ans. Pourtant, elle doit s'en aller. Tic. Tac. Tic. Tac. Tic !
C'est fini. Dans la main squelettique repose désormais une petite dent. Dans sa poche, de sa robe longue et noire, une sacoche remplie de dents. Elle dépose la nouvelle avec les autres. La Pendule s'est évaporée. A son tour, elle s'évapore.
Elle réapparaît dans une prairie. A l'aide de sa Faucille, les trous se creusent et les dents s'y déposent. Les trous se rebouchent, des pieds de lierre, des rosiers, des arbrisseaux fruitiers poussent en quelques secondes. Les âmes s'en échappent pour reprendre des activités anodines. Elle observe sans émotions la scène puis disparaît.
La demeure froide et triste n'a pas changé depuis son départ. De temps en temps, une âme s'y faufile, c'est souvent un enfant. La cape tombe, le squelette craque et claque avant de se recouvrir de chair.
Morrigane s'affale sur le lit dans un froufrou de tissu et ferme les yeux. "Déesse"... Quel beau nom... "Maudite" serait plus juste et plus exact.
Les émotions récoltées remplissent la jarre non loin d'elle. Doucement, ses yeux se ferment et elle plonge dans un sommeil bien mérité.
Un rire. Une main sur une hanche et une autre sur le ventre. La joie. Puis un cri. Un sanglot. Un hurlement. La peur, le désespoir, la rage, les larmes. Une vision brouillée. Un cri bloqué dans la gorge. Les sueurs froides. Les supplications. Un sentiment de vide.
Morrigane se réveille en hurlant, la respiration erratique. Le cauchemar est revenu. Une pendule l'attire vers sa commode. Elle le prend entre ses doigts, l'apporte à ses lèvres et elle pleure. Son fils. Son enfant. Son mari. Sa famille. La rage et la tristesse. La mort. La tentative de meurtre sur lui. Son procès sans justice. Son châtiment infini. Et il s'en sort.
La rage revient, puissante, incontrôlable et dévastatrice. Sans prendre la peine de l'enfiler correctement, Morrigane balance sa cape sur ses épaules. Son apparence squelettique revient avec le bruit des craquements. Et elle part pour sa demeure.Tout est blanc. Trop blanc. Un blanc qui agresse la rétine, qui angoisse et qui donne la nausée. En face d'elle, les dieux, déesses, nymphes et autres créatures rient et s'amusent.
La main se lève et le manche s'abat. Une vague noire se répand, éclaboussant ce blanc si parfait que ces imbéciles îdolatrent tant. Elle jubile avant d'entrer dans le palais. Et ils sont tous là. Les 6 dieux et les 6 déesses. Les responsables de sa nouvelle vie. Et lui. Au centre, comme le roi minable qu'il est.
Comme le veut son sort, elle ne répand que pleurs et désolations. Maguertis se lève et l'empêche d'avancer. Ce dieu de la guerre, elle ne veut pas le blesser. Mais peu lui importe en ce moment même. Les créatures d'ombres le bloquent pendant que Morrigane avance. Les autres ne bougent pas, ils ont peur. Et Morrigane adore ça.La dernière fois qu'elle est venue, ces 13 dieux l'ont condamnée à passer le reste de sa vie seule, entourée uniquement de morts.
La peur se lit dans ses propres yeux et Morrigane tremble comme une feuille. Les chevilles attachées comme ses poignets, elle avance avec difficulté. Les 12 dieux devant elle la regardent avec horreur. Et LUI ! Il se pavane comme un abruti. La colère remonte en elle et, sans savoir comment, elle brise ses chaînes et se jette sur lui. Morrigane hurle, crie, le traite de tous les noms et réussit à lui arracher l'oreille.
Porathyse la maintient contre elle, la calmant. Déesse de la Paix et de la Vérité, elle sait exactement ce qu'il s'est passé. Mais jamais elle ne s'attaquera à son roi : Seijiro est inatteignable. Sans aucune objectivité, tous les dieux la jugent coupable des crimes
suivants : Tentative de meurtre, incendie d'un village, meurtres de toute sa famille et de ses amis et infidélité.
Tout était faux. La tentative de meurtre pouvait être la seule chose retenue contre elle. C'est Seijiro qui a mis le feu à son village, qui a tué sa famille et ses amis, qui a massacré son mari sous ses yeux et qui a tué son bébé qui n'était qu'un enfant de quelques semaines. Le vrai monstre, c'est LUI ! Mais qui va la croire ? Seijiro a abusé d'elle. Et tout lui retombe dessus. Cet enfant n'était pas le sien. Elle le savait. Mais il ne l'avait pas écouté.
A partir de ce jour, Morrigane est devenue la déesse de la Mort.
Les souvenirs remontent à la surface et alimentent sa rage. D'un coup de manche, elle déclenche les horreurs du monde autour des 12 dieux. Toutes ces choses qu'elle est obligée de voir en permanence. Lizeria, déesse de la Nuit et des saisons, est la première a demandé grâce. Morrigane arrête. Porathyse s'approche et lui prend les mains. Mais la déesse de la Mort se dégage.
" Seijiro.
- Morrigane ! Comme je suis heureux de te voir. Peux-tu relâcher Marguetis ?
- Heureux ? Espèce de menteur ! Tu m'as tout volé et tu te moques de moi par dessus le marché ?!
- Allons, allons ! Ne t'énerve pas !"
Le sang de la déesse ne fait qu'un tour et elle éclate d'un rire amer. La Faucille pointée sur lui, elle s'apprête à le tuer.
" Maman !!!!"
Morrigane se fige. Tic, tac, tic, tac, l'heure tourne et tout sera bientôt fini. Tic, tac, un garçon tire sur sa manche. Tic, tac, il l'appelle sans relâche. Tic. Tac. Elle s'effondre.
La main squelettique se lève et fait le tour du visage de l'enfant. C'est son fils. Son petit arrache sa capuche et les os craquent. Clic, clac, tout se reforme. Clic, clac, sa mère le redevient soudainement. Un câlin, une étreinte, un baiser et une berceuse.
Un flot de souvenirs les entourent, elle, son fils et les 13 dieux. Porathyse a délivré la vérité. Plic, ploc. La pluie s'abat sur le palais d'une blancheur ravagée par les ombres. Clic, clac, le cadenas a cédé. Tic, tac, l'horloge s'arrête. Et le temps avec.
Les dieux n'y croient pas. Ils peuvent tout voir. Morrigane a caché son fils contre sa poitrine et lui a bouché les oreilles. Les cris fusent, les insultes et les pleurs aussi. Tout s'arrête. Lentement, le temps reprend. Seijiro est attaché par Katsura, déesse de l'Amour. Toutes les divinités se consultent. Et arrivent à la même conclusion : Morrigane est innocente. Et leur roi qui se targuait d'être le plus loyal et fidèle compagnon possible est un odieux personnage. Il ne mérite pas ses titres.
Morrigane décidera de son sort. Clic clac, le cerveau se met en marche. Tic, tac, une idée survient. Plic, Ploc, tout est arrangé. Le centre de la planète sera une parfaite prison pour un parfait hypocrite. Causo ouvre une brèche et Morrigane chuchote à Seijiro "Qui va te croire maintenant ?" et le pousse. C'est la phrase qu'il lui a dit juste après avoir commis toutes ces atrocités.Justice est rendue, vérité a triomphé et Morrigane vivra pour le reste de sa vie avec son fils et son mari que Porathyse a caché pendant ces 5 années de calvaire. Les dieux seront bien plus pointilleux quant à ce genre d'affaires.
Mais, n'est-il pas malheureux de se dire que seul la violence et la peur ont montré les erreurs commises ? Que la corruption et les menaces peuvent faire taire la vérité ?
Nous sommes rois et reines de nos propres vies. Alors il ne tient qu'à nous de faire notre propre justice dans notre entourage. Tic, tac. L'heure tourne. Plic, ploc, le temps s'écoule. Clic, clac, et la vie passe.
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Recueil OS
Short StoryUn petit recueil d'OS que j'écris quand je m'ennuie ou quand j'ai une méga idée. J'espère qu'il vous plaira !