Epilogue

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 Les rues sont bondées de personnes pressées. Je me fraye un chemin difficilement en évitant tout contact physique avec ces inconnus, traversant les derniers mètres qui me séparent de ma destination. Une fois moins oppressée, je tente de souffler pour reprendre mon sang froid, consciente que le poids de la journée se fait de plus en plus présent sur mes nerfs. Je resserre ma veste pour occuper mes bras et entre dans le grand bâtiment.

- Bonjour, mademoiselle, s'exclame la vielle femme derrière son comptoir.

Je la salue d'un signe de tête avec un léger sourire, traçant mon chemin vers l'escalier. Je grimpe trois étages avant de me retrouver dans ce couloir si familier, croisant quelques visages de patients rentrant dans leur chambre et ou d'infirmières traînant un chariot à médicament. Je m'arrête devant la dernière porte du couloir, la numéro 359. Avant d'abaisser la poignée de porte, je ferme les yeux quelques secondes pour remettre de l'ordre en moi, m'ordonnant de contrôler ma voix pour ne pas me trahir. Je souffle donc une dernière fois avant d'entrer.

Je découvre, comme à mon habitude, les deux hommes allongés dans leur lit respectif. Le visage paisible, la respiration régulière, tous les deux dorment toujours. Je les observe quelques secondes sur le bas de la porte, avalant difficilement ma salive avant de prendre place dans mon fauteuil habituel. Plongés dans ce silence lourd, seuls les deux bips des machines qui sont reliés au cœur des deux hommes raisonnent dans la pièce d'un son aigu dérangeant. Je tente de l'oublier en contemplant le visage des deux personnes.

- Bonjour, mes papas.

Ma voix raisonne d'une façon hésitante et je me racle la gorge tout en guettant une réaction. En vain.

- Hier matin, une dame m'a téléphonée, leur dis-je. Inexplicablement, mon dossier scolaire a atterri dans une école du nom de A.S.E et je suis acceptée dans leur cursus. Apparemment, les frais de scolarité sont pris en charge par les bourses, ce qui me permettra de suivre le programme scolaire sans m'occuper de l'argent.

Je m'approche pour prendre la main de l'homme le plus proche pour la caresser d'un air distrait.

- J'ai tout d'abord refusé pour ne pas m'éloigner de vous. Cette école se trouve à plusieurs heures de vol et je ne pourrais supporter de vous laisser derrière moi tous les deux. Heureusement, en exposant les raisons de mon refus, cette dame, qui était en réalité la directrice de cette école, m'a proposé d'organiser votre transfert dans le meilleur hôpital de l'île pour ne pas me séparer de vous deux. Pour une raison qui m'échappe, j'ai accepté avant même de me poser de question.

D'un geste doux, le bout de mes doigts viennent caresser les cheveux roux de mon paternel. Je me penche quelques secondes plus tard pour lui embrasser la joue gauche et répète l'opération auprès de mon deuxième père.

- Trois pour un, un pour trois, je murmure avant que ma voix se brise.

Plusieurs souvenirs me reviennent en mémoire alors que cette phrase, cette devise, est accompagnée d'une larme qui roule le long de ma joue. Je ravale un sanglot tout en portant la main de mon père sur ma joue et m'installe contre lui. Son odeur est cachée par celle de l'hôpital, ce qui me rend un peu plus nostalgique.

Cette devise n'a pas toujours compté que trois personnes, bien loin de là. Au départ, cette devise provient de notre jeu d'enfance entre mes deux frères et moi, nos deux pères l'ayant reprise lors de moment plus difficile que d'autre pendant notre jeunesse Elle est resté au fil du temps et est devenu notre devise familiale.

Lorsque je suis sur la route de la maison, je croise beaucoup moins de monde qu'à l'aller. La nuit commence à tomber et je presse donc le pas pour ne pas me retrouver seule, effrayée à l'idée de me faire agresser. Quelques minutes plus tard, j'arrive chez moi, dans la maison de mon enfance et ferme la porte à clé derrière moi.

Comme à mon habitude, je grimpe les escaliers quatre par quatre après avoir enlevé mon manteau et traverse le corridor pour me dépêcher d'ouvrir la porte d'une des trois chambres. Je survole des yeux la chambre de mes frères, résolue à trouver un signe de vie. Seulement, je ne retrouve qu'une pièce totalement vide, aucun objet n'ayant bouger et, surtout, pas mes deux frères.

Encore une fois, cette mauvaise habitude à persister à vouloir les retrouver un jour dans leur chambre après tant d'années de disparition me cause une douleur dans le cœur inimaginable. Cet espoir n'est que source de chagrin et pourtant, je veux continuer à croire que mes deux grands frères ne m'ont pas abandonné derrière eux avec nos deux paternels pour fuguer en pleine nuit pour ne plus jamais revenir. Aucune raison, aucun conflit expliquerait ce geste. Surtout que Téo et Fabien aimaient plus que tout notre famille.

Anéantie une nouvelle fois, je me traîne à l'extérieur de la pièce avant de rejoindre ma chambre pour me coucher le plus tôt possible, mes heures de sommeil manquantes me frappant de plein fouet.

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⏰ Dernière mise à jour : Feb 22, 2021 ⏰

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