CHAPITRE 18

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SÉFIA

Mon père gare notre vieille Cadillac près du trottoir et se penche vers ma portière pour observer les lieux. Je suis son regard méfiant. C'est un endroit simple, une petite maison semblable à la nôtre. Mon cœur s'emballe et ma bouche s'assèche à l'idée de quitter l'habitacle, de frapper à la porte et d'entrer chez un garçon qui ne m'apprécie même pas. Bon sang, pourquoi ai-je accepté, déjà ?

— Il va falloir descendre, ma chérie.

Mon père me considère avec tendresse, tandis que je détache lentement ma ceinture.

— Tu m'envoies un message au moindre souci. Je passe te prendre dans la soirée ?

J'acquiesce en tentant tant bien que mal de garder mon calme. Je lève les yeux au ciel lorsqu'il ébouriffe mes cheveux. Il adore faire ça, comme si j'étais toujours cette petite fille qui n'a jamais grandi.

— Je suis vraiment fier de toi, Séfia. Essaie de passer un bon après-midi...

Je me recoiffe correctement et ouvre la portière. Au dernier moment, je me ravise et fais volte-face pour claquer un dernier bisou sur la joue de mon géniteur. La vérité, c'est que ses mots me font bien plus plaisir que ce qu'il ne peut le penser. Je finis par quitter la voiture, sous les paroles rassurantes mon père. J'ajuste les bretelles de mon sac à dos en observant la voiture s'éloigner, avant de tourner les talons. C'est avec un peu de détermination et beaucoup d'appréhension que je me dirige vers le perron et presse la sonnette, qui résonne de l'autre côté de la porte d'entrée. Un bruit beaucoup moins élégant s'en suit, et je devine qu'il s'agit de Kenzo, qui descend les escaliers en faisant plus de bruit qu'un troupeau d'éléphants. La porte s'ouvre et Kenzo me considère avec surprise. Je l'ai clairement réveillé. Il plisse les yeux et fronce les sourcils. Je remarque qu'il ne porte pas de T-shirt, simplement un jogging. Mes joues chauffent, je baisse immédiatement la tête pour qu'il ne s'aperçoive pas de ma gêne.

— Blondie ? Merde, il est quelle heure ?

— 14h00. Je peux repasser plus tard, si tu veux, l'informé-je.

Il passe une main sur son visage en grognant et se décale pour me laisser passer.

— Je vais m'habiller. Sers-toi dans la cuisine.

Je hoche la tête en lui emboîtant le pas. Le grand brun rejoint l'étage, et je profite du fait qu'il me tourne le dos pour observer discrètement son corps. Ses muscles ondulent sous sa peau, légèrement tannée par le soleil d'été. Comment est-il possible d'être aussi beau ?

J'avance à pas de loup, de peur de réveiller quelqu'un d'autre, et pénètre la cuisine. L'intérieur est moderne et... silencieux. J'attrape un verre sur les étagères, avant de me servir au robinet. Quand je me retourne pour m'appuyer contre le plan de travail, mon cœur rate un battement. Je manque de m'étouffer en remarquant une femme d'un certain âge dans l'embrasure, qui m'observe avec bienveillance. Au vu de ses longs cheveux noirs et de ses yeux d'un vert intense, je me doute qu'il s'agit de la mère de Kenzo.

— Bonjour, ma jolie. Kenzo t'a laissé entrer ?

J'esquisse un sourire à l'entente de sa voix grave et caractérielle, en tout point semblable à celle de ses enfants.

— Oui, nous avons un devoir à préparer.

Elle hoche la tête tandis que je termine le contenu de mon verre. Je m'apprête à le nettoyer, mais elle m'en empêche, posant sa main fatiguée sur la mienne.

Quelqu'un Pour ToiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant