Complots à Babylone

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      Une nuit d'encre surplombait le palais aux jardins renommés dans tout l'orient. Le joyau du ciel baignait le cœur de la cité de son flot argenté. La ville savante, d'ordinaire si calme, était en effervescence pour cette nuitée.

      Tous se pressaient vers les portes du palais pour admirer les invités, tous plus nobles, plus riches et plus sublimes les uns que les autres. Ce soir, le palais donnait une grande réception, une réception mémorable. Ce soir, le tant attendu héritier était présenté au monde. La salle du trône, immense hall de quartz incrusté d'aigues-marines, accueillait fièrement de ses étendards émeraude, les puissants du monde. Les hôtes se faisaient attendre.

      Un carrosse d'argent, guidé par des chevaux de cendre, s'arrêta devant les grandes portes d'or du palais. Les invités se stoppèrent, surpris, pour apercevoir les présomptueux ayant osé traverser l'allée en calèche, défiant l'interdiction. Un homme vêtu sobrement, au visage anguleux et sévère et aux cheveux corbeaux collés sur le crâne, en descendit. Il observa de son regard de faucon ce rassemblement. Des murmures fusèrent à son apparition. Il s'agissait du frère du roi. Malgré son apparence austère, sa sagesse était reconnue dans le monde parmi l'une des plus grandes.

      À sa suite apparut une jeune nymphe éblouissante, sa fille. Elle descendit à son tour de la calèche. Alors que le duo s'avançait dans l'allée, les invités ne bougèrent point, trop occupés à observer cette célébrité dont la beauté mais aussi l'intelligence étaient admirées dans toutes les demeures. Une cascade de cheveux bleu nuit tombant sur des épaules fines ; un visage doux mais fier ; des yeux lapis ; ce soir le peuple pouvait enfin admirer dans toute sa splendeur cette princesse mystérieuse qui ne participait presque à aucun événements de la haute société. Son attirail révélait son rang, contrairement à celui de son père : un bustier océan, orné d'arabesques blanc nacre et de lapis lazuli pendants, continué, dans des tons plus clairs, par une jupe longue recouverte d'un drapé bleu pâle et d'un autre glace. Des manches de mousseline nacrée commençaient au niveau de ses épaules et tombaient vers le sol. Enfin, elle portait une tiare d'argent ayant au centre une aigue-marine reluisante.

      Quand ils entrèrent dans le hall et que le serviteur annonça leur présence, le silence régna et tous les yeux les fixèrent avec envie. Tandis que le frère du roi rejoignait un groupe d'homme afin de débattre des problèmes d'un quelconque pays, les invités retournèrent à leurs discussions. La jeune nymphe, nommée Callista, s'installa dans un coin espérant éviter les regards, mais il lui était malheureusement difficile de passer inaperçu. Des femmes et des hommes voulant s'attirer ses faveurs lui tenaient la conversation mais elle les écoutait à peine. Elle avait l'habitude d'entendre ces niaiseries d'hypocrites. Où qu'elle soit, ce n'était que défilé de faux amis ou de prétendants. Seuls les livres ne mentaient pas. C'est pourquoi la jeune femme se réfugiait dans la bibliothèque de Babylone, où des textes des quatre coins du monde étaient rassemblés, au lieu de participer aux réceptions. Elle connaissait chaque étagère, chaque rangée par cœur. Cependant, elle ne savait rien du monde et ses problèmes. Du fait de son attitude, beaucoup de jaloux de la haute société la critiquaient dans son dos.

      Mais sa seule véritable ennemie était sa tante, la reine, qui ne cessait, depuis son récent mariage avec le roi, de rabaisser publiquement la jeune princesse et son père afin de diminuer leurs influences. Ainsi, lors des réunions sur la gestion du pays, le nombre de ses partisans augmentaient rapidement alors que parallèlement les alliés du frère du roi diminuaient. Cette femme assoiffée de pouvoir et de richesse au cœur orgueilleux et vicieux manipulait quiconque par ces belles paroles et risquaient de mener le pays à sa ruine. Néanmoins, le roi l'aimait comme un fou et le peuple la portait aux nues. Si cette sorcière accédait au pouvoir, ce serait la fin de la grande Babylone. Mais le roi se mourrait et l'héritier du trône n'avait qu'un an.

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