Les deux jours suivants passèrent rapidement. Depuis qu'Evan avait dévoilé ses nouveaux dons à Jeff, ils avaient trouvé un prétexte pour que ce dernier vienne passer ses nuits chez les Banner et ils exploraient ensemble les nouvelles possibilités de cet étrange pouvoir. Cependant, si Evan parvenait parfois à agiter de l'eau sous le regard toujours aussi ébahi de son meilleur ami, il ne parvenait pas à répéter l'intensité de son expérience sous la douche.
Ce jour-là, un ciel sombre et chargé d'électricité surplombait toute la région de sa masse menaçante, comme l'inquiétant présage de la revanche imminente d'une nature contrariée par les mauvais traitements infligés par ses habitants. C'est en discutant de cela, de comment les machines créées par milliers, la pollution, l'argent et les guerres avaient à la fois dénaturé l'homme et mis en péril la terre sur laquelle ils étaient nés que les deux amis s'engouffrèrent en toute hâte dans le hall principal du lycée pour leur premier cours de la journée.
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Sa lourde mallette chargée de copies sous le bras, Monsieur Marivaux trottinait sous la pluie en direction du portillon d'accès des professeurs et visiteurs. Il referma son parapluie qu'il coinça sous son bras et fouilla ses poches à la recherche de son badge en pensant à la jeune boulangère chez qui il avait coutume d'aller acheter son sandwich pour le midi. Cette pensée lui tira un sourire.
Qui disparut.
Sur le trottoir d'en face, un homme grand et large dardait sur lui un regard clair. Une large balafre lui tailladait la joue et la bouche. Le professeur sentit un frisson glacé courir le long de son échine. Il voulut partir, s'éloigner au plus vite mais les deux yeux de glace le maintenaient sur place aussi sûrement que des chaines en acier. Un sentiment de panique s'éleva. L'homme s'approcha d'une démarche souple qui contrastait avec son imposante carrure sans le lâcher du regard. Quand il fut tout près, le professeur crut qu'il allait dégringoler dans ses chaussettes tant l'aura qui émanait de l'inconnu était puissante et menaçante. Ce dernier le dépassa enfin en détournant le regard. L'enseignant recouvra sa mobilité et s'éloigna d'un pas rapide, hagard, dépassant la boulangerie et sa charmante vendeuse qu'il avait complètement oubliée.
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Les nuages avaient fini par se déchirer en milieu de matinée et une pluie drue se déversait sans relâche depuis plusieurs heures. En début d'après-midi, le lycée était en effervescence.
- Tous les cours sont annulés, annonça Jeff qui peinant à se faire comprendre dans l'agitation générale et les cris des élèves qui ricochaient dans les couloirs.
- Comment ça annulés ? demanda Evan.
- Apparemment on est passés en alerte météo. Ça fait des heures qu'il flotte et les accès aux villages s'inondent de plus en plus alors ils avancent les bus pour que les élèves puissent rentrer chez eux. C'est partout sur les réseaux ! s'exclama-t-il en agitant son téléphone sous le nez d'Evan.
- Ce n'est pas si dramatique ! J'habite à un quart d'heure, je vais rentrer à pieds, tant pis si je me mouille.
- Je crois que tu captes pas la situation mon pote. C'est le déluge dehors, dit-il en pointant une fenêtre par laquelle on voyait la pluie tomber à grands seaux. Je crois qu'ils ont pas fermé le lycée pour alerte météo depuis plus de dix ans ! Tu te rends compte ?
À ce moment, un petit rouquin à la mine constellée de taches de rousseur se rua sur les deux amis. Il était tout transpirant et peinait à reprendre sa respiration
- Evan, Evan !
- Salut Francis, dit Evan en fronçant les sourcils. Qu'est-ce qui t'arrive ? Est-ce que ça va ?
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Voda - Tome 1 : L'Œil d'Obsidienne
FantasíaEvan adore l'eau. La pluie battante, les longues douches brûlantes, les longueurs à la piscine, l'apnée à la mer. Pourtant, ce jour-là en cours de natation, il manque de se noyer. Cet évènement étrange semble entraîner une cascade de phénomènes em...