Et la terre craqua

12 4 0
                                    


Un trou béant dans ce terrain vague. Comme si un obus ou une météorite avait fraichement atterris ici. Laissant derrière lui des dégâts irréparables. La terre est encore humide. Le ciel a dû pleurer en voyant tout ça. Personne n'est insensible à un tel chaos.

Dans dix ans encore, les cicatrices resteront visibles. Un trauma ne part pas comme ça.

Peut-être remettre de la terre par-dessus ? Comme un pansement. Mais la terre en dessous craquera un jour ou l'autre. Ce rafistolage n'est que temporaire. Cela tiendra 10 ans, peut-être plus... Mais lorsque les gens penseront que tout ça est enfin réparé, ils iront remarcher dessus. Et la terre en dessous craquera.

Elle craquera petit à petit, de sorte que ça ne se voit pas. On ne verrait les dommages qu'en la comparant à de vieilles photos. Et là on dirait : « Ça a quand même bien changé ! De notre époque, c'était pas si bousillé ! ». Mais est-ce réellement de sa faute si ce pauvre terrain a changé ? Si les années lui ont fait prendre de l'âge ? Et que la vie lui a laissé des marques ? Ces personnes qui font leur footing très tôt, lorsque le soleil se lève. Qui viennent écraser la terre de leurs pieds. Viennent abimer l'herbe fraîche qui ce matin, portait la rosée comme une robe d'été. Peu à peu, abusent de la présence et de la facile accessibilité de cette herbe.

Certaines personnes verront cet imperceptible changement, mais ne le diront qu'une fois su par tout le monde. Pensant se tromper. Comme lorsque la dispute des voisins devient trop forte, puis plus rien. Ça doit être un malentendu. Puis tu doutes, toute la semaine. Peut-être qu'il l'a frappé et qu'elle s'est enfin tue. Ou évanouie. Et comme le terrain, les bleus physiques et mentaux resteront. Les marques sur le corps moins longtemps que dans l'esprit. Les coups ne sont sûrement pas ce qui fait le plus mal. Mais les cris résonnent encore dans son oreille

Et cet ami de plus en plus cerné, qui semble de plus en plus fatigué. Tu l'as vu, tu le vois, et tu verras que ce ne sont pas que de simples nuits blanches. C'est une poudre un peu trop blanche, une neige un peu trop forte. C'est une aiguille qui glisse le long de sa chair. C'est un verre un peu trop rempli, à une heure un peu trop tardive. C'est un trou béant dans la poitrine. Et un nœud qui coulisse.

Ça y est, la terre a finalement craqué. Et l'on peut y voir le sang et les armes. Armes qu'ils ont lâchées. Certains auraient pu la reprendre au sol mais n'avaient plus la force, tandis que d'autres étaient prisonniers, les mains enchainées et impossible pour eux de se délivrer.

Et la terre craquaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant