Chapitre 1: Commençement

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Si vous avez déjà lu les histoires du Clan de la Vérité, tant mieux. Mais ce n'est pas des divinités équestres dont nous parlerons. Aurélys, qui a marqué pour toujours l'esprit d'Éspérita, déesse de l'espoir, a une histoire, elle aussi.

Je m'appelle Hwin. Vous vous demandez sans doute comment une jument peut parler! Eh bien, comment je suis arrivée à ce stade est assez compliqué à expliquer. Tout ce que je peux vous dire, (pour le moment) c'est que cette transformation s'est effectuée bien après la dernière rencontre entre Aurélys et Éspérita.

Avant de commencer pour de bon le parcours de vie d'Aurélys, je vous en dis un peu plus sur moi. Je suis de race Anglo-arabe. Ma robe est alezane foncée. Ma crinière est noire, et mes yeux sont bleus marine. J'ai six ans. En âge d'humain, cela équivaut à environ 24 ans. Je suis la jument d'Aurélys depuis que je suis née. Ma mère, Héra, a été vendue dès que j'ai été en moyen de me nourrir d'herbe ou de foin. Je me rappelle encore la sensation de terreur que j'ai ressenti. Je me souviens aussi d'Aurélys, qui avait sept ans à l'époque, me retenir de courir à la suite du camion qui emmenait ma seule famille. Dès que le véhicule fut hors de notre vue, je me rappelle d'avoir senti les larmes de la fillette sur mon encolure. Son empathie me fit chaud au coeur, et dès qu'elle eut arrêté de pleurer, un lien incassable s'était installé entre nous.

Juste en parler me fait mal au coeur. J'ai eu six longues années pour faire mon deuil. Malgré cette longue période, une douleur persiste. Nous faisons notre deuil aussi longtemps que nous en avons besoin, non? Le mien ne finira sans doute jamais. C'est ce qui arrive quand on sépare trop tôt un enfant de sa mère. Je ne blâme personne, seulement, je n'ai jamais bénéficié de l'amour d'une mère, de ses conseils ou même de sa simple présence plus que trois mois. Le choc que cela cause est énorme.

Bon, assez parlé de moi et de mon deuil. Aurélys et moi partageons cependant la même peine. Il y a environ trois ans, la famille était en voyage en voiture au Canada. Je n'étais pas présente, mais selon ce qu'Aurélys m'a raconté, un autre véhicule aurait percuté le leur du côté du conducteur, dans ce cas-ci de la conductrice. Assis de ce côté de la voiture, la mère et le frère de ma meilleure amie avaient trouvé la mort. Je suis étonnée de la durée du deuil des humains. En environ deux ans et demi, Aurélys a réussi à sortir de sa peine, alors qu'il me faudra une vie pour me remettre de la perte de ma mère.

Du point de vue des humains, la situation doit être bien différente, mais je discerne parfaitement ce qui se passe. Pour la plupart d'entre vous, les chevaux ne doivent pas comprendre grand-chose. Cependant, vous vous trompez. Les chevaux sont pour la plupart égaux sinon supérieurs aux chiens en terme d'intelligence.

Il est temps de revenir à la vie normale. Les enclos du ranch conviennent parfaitement à tous les locataires. Le mien était assez spacieux. Je courais après le palfrenier tous les matins. C'était notre jeu quotidien. Étant une jeune pouliche, je regardais souvent Aurélys monter une vieille jument dans le manège. La monture avait un caractère de cochon, au grand désespoir de mon humaine préférée. Elle espérait à tous les soirs que son père lui permette de me monter pour pouvoir se débarrasser de sa propre jument. Il faut avouer que moi aussi j'avais hâte.

Le jour où Wellan, le père d'Aurélys, à enfin accepté de me dresser, mon humaine de huit ans sauta partout toute la soirée. C'était très amusant de regarder ses cheveux coiffés voler dans tous les sens. J'étais excitée comme une puce à l'idée qu'Aurélys monte sur mon dos. Cette soirée-là, je n'avais aucune idée de l'épreuve à laquelle j'allais participer.

Les jours qui suivirent furent les plus épuisants de ma jeune vie. Laissez-moi vous en dire plus.

Aurélys & Hwin, PasséOù les histoires vivent. Découvrez maintenant