Le monde est un désert brumeux
Rongé par la routine, ravagé par l'ennui
Tel un fromage moisi, percé d'horribles creux
Se détériore lentement pour se fondre dans la nuit
Comme par une ancre tiré vers le fond
Invisible et terrifiant d'un océan profond
L'esprit enserré, prisonnier d'un carcan
Incapable de se débattre, coule doucement
Telle une goutte de lait dans une mer hurlante
L'innocence s'estompe dans une angoisse vile
Tel un caré de sucre dans une mer d'huile
La joie se dissout dans une peine assomante
Un cri jaillit brusquement de ce corps exsangue
De ce coeur battant de désespoir et de colère brûlante
Qui se lève défiant, sur un sol qui tangue
Et harcèle les ténèbres de son épée ardente
L'obscurité se mue en un calme menaçant
Et arrache armes et armure au chevalier imprudent
Le courage l'abandonne et il tombe à genoux
Implorant les ténèbres qui montrent leur courroux
Il reste là gisant, pétrifié et défait
Des années, des siècles, une vie entière
Il se tient là prostré, face contre terre
Soumis à l'obscurité qui le tient en respect
Nul mot ne subsiste pour décrire ce vide intense
Ce froid déchirant et ces ténèbres glaçantes
Des étoiles enfuies ou dévorées vivantes
Ne reste que le désespoir et la cruelle absence
Il est seul au milieu d'une foule
Qui ne remue point, qui ne pense pas
Des êtres vaincus, des êtres las
Qui se laissent porter par la ténébreuse houle
Soudain passe une colombe, tirant un arc-en-ciel
Offrant des couleurs aux esprits assoupis
Pendant un bref instant à travers le voile gris
Avant de disparaître dans un éclair de miel
Alors, tirant sur leurs muscles atrophiés
Les corps d'un mouvement se levèrent
Et par la force de leurs nouvelles volontés
Se traînèrent en direction de la lumière
La force retrouvée par la grâce de l'espoir
Leurs esprits s'éveillèrent et voyant la lumière lointaine
Éclairèrent leurs yeux d'une détermination certaine
Laissant derrière eux le triste soir
Ils marchèrent dans le désert, guidés par une lueur
Se nourrissant des cactus, s'abreuvant de leur sueur
Jusqu'à sentir l'herbe sous leurs pieds
Et par un doux soleil être réchauffés
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Ennui et Lutte
PoetryÉvocation réalisée pour le bac à blanc suisse sur la base de la citation "Nous partirons par delà les cactus avant que ne se fanent les étoiles avant que ne se rouillent les mots nous partirons" Charles Gnande