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"Soojin?"






"Y'a un nouveau patient pour toi"






"Dans la section D"


Je relève la tête vers mon patron, ne sachant pas trop comment adresser cette demande, que je doutais fortement d'être un ordre et non une proposition amicale.

   Formant une courbe timide, mes lèvres s'étirent, les coins tremblotant légèrement, hésitant visiblement entre la panique, l'appréhension ou bien l'excitation.

    "Et merde" fut pourtant la première chose que j'arrive à me dire, compressant un peu plus les tranches de pain de mon sandwich, y laissant les traces de mes phalanges. Ces dernières s'impriment sur mon dîner, de façon sûrement permanente.

   J'étais vaguement angoissée à l'idée de m'aventurer dans cette partie du département, garnie de psychopathes dangereux aux penchants suicidaires. Le couloir qui longeait les chambres verrouillées de cet étage était désert de tous employés.

   Mes collègues évitaient cette place tout comme ils évitaient de se mettre dans la ligne de mire d'un de leurs patients. C'était quelque chose qui pourrait s'avérer dangereux, surtout quand on devait supporter leurs regards froids et meurtriers à chaque fois que c'était l'heure des médicaments et qu'on leur demandait d'avaler leurs pastilles gélifiées.

   Pour ne pas afficher un air vulnérable, je pris une autre bouchée de mon sandwich, dont le goût semblait avoir quitté la salade et la viande qui le garnissait.

   Ma bouche mâche lentement et j'eus l'impression de manger du caoutchouc.

   J'avale ma bouchée et repose mon sandwich dans son emballage, remarquant en fronçant les sourcils que le patron semblait préoccupé. Il triturait un dossier dans ses mains, regardant d'un côté à l'autre, avant de condenser son attention de nouveau sur moi.

   — Y'a un problème patron? demandais-je et ce dernier secoue la tête de droite à gauche mais sa nervosité ne semble pas s'évaporer.

   C'était étrange de le voir comme ça, lui qui bombait toujours son torse vers l'avant, affichant en permanence une mine vaniteuse, n'hésitant pas à réprimander mon travail.

   Il s'approche de moi et dépose le dossier qu'il s'amusait à plier quelques secondes plus tôt sur mon bureau.

   Je le prends en main et regarde la photo qui comblait le haut de la feuille.
   Rare de voir quelqu'un d'aussi beau dans un asile psychiatrique.

  — Il est nouveau ici? demandais-je, parcourant la liste de médocs qu'il allait falloir que je lui soustrais tous les jours, à des heures bien précises, chacun visant à traiter un trouble bien précis. Il en avait beaucoup d'ailleurs. Des troubles. Et une longue série de médocs venaient avec. En grande quantité, de quoi assommer un sumo.

   Des fois, j'avais l'impression qu'un patient était plus sain avant la prise de médicaments qu'après. C'est comme si ces derniers servaient seulement à leur ramollir l'esprit et à faire dégénérer encore plus leur santé mentale.

— Il a été transféré hier. C'est à toi de t'en occuper, me dit-il, s'approchant de moi.

   Je me lève, serrant le dossier épais dans mes mains.

  — Compris, répondis-je, me détournant rapidement de son œillade, la nausée montant dans mon estomac.

   Je me dirige à l'aide de longs pas vers la porte, mais une main m'empoigne le poignet, m'obligeant à me retourner.

𝐕𝐄𝐍𝐃𝐄𝐓𝐓𝐀 | 𝘱.𝘫𝘮Où les histoires vivent. Découvrez maintenant