chapitre 3

33 6 14
                                    

Pdv petite lund/@Agathe_Delarive

La lumière m'éblouissait et je ne voyais à peine mes sœurs. Nous jouions sous un érable à attraper les feuilles mortes tombées quand le vent s'est levé. La feuille avec laquelle je jouais s'échappa de mes griffes et s'envola vers le soleil brûlant. Je la pourchassa et sombra dans le noir. Mes sœurs avaient disparues, je me sentais si vulnérable, ce sentiment de faiblesse qui m'accueillait quand elles n'étaient pas près de moi. La feuille était toujours là, virevoltant sous le soleil, elle se posait délicatement sur mes pattes. Mais le vent revint, cent fois plus violent, l'orage éclata dans un fracas assourdissant, les nuages s'empressant de couvrir le soleil. Mes pattes me dérangeaient, j'y jeta un œil et découvrit non sans surprise que la feuille se décomposait, sa couleur orangée vira au pourpre. Bientôt la feuille ne fût plus qu'une flaque de sang sur mes pattes, et un cadavre flou à quelques queues de renard de moi apparut.

Je me réveilla en sursaut, haletante. Par instinct j'observa mes pattes, mais non, rien. Je me souvenais de ce rêve, je l'avais déjà fait plusieurs fois. À chaque fois le rêve devenait moins floue, son opacité se dissolvant. Mes rêves avaient tendance à entraîner la réalité avec eux.

Je chassa toutes mes pensées de la tête et me leva, encore engourdie par la nuit. Je marcha délicatement sur le tapis de mousse qui jonchaient la pouponière pour ne pas réveiller mes sœurs, encore endormies. À cet instant je voulais partir, tout quitter découvrir autre chose que ce monde, je voulais croire qu'autre chose que mon monde existait. Mais plus je réfléchissais, plus je m'enfonçais dans mon associabilité. Il était plutôt vrai que socialement j'avais plus de mal contrairement à mes sœurs. Ce n'est pas que je n'aimais pas mes camarades de clan, bien au contraire, mais je ne me sentais pas à ma place dans ce clan. J'étais très proche de Petite Tomise, même si elle ne se confiait pas toujours à moi je devinais facilement ses pensées. Elle était un peu comme moi, elle n'était pas à sa place ici. Mais je ne crois pas que nous étions exactement dans le même cas, moi c'était en particulier ce clan qui me posait problème, je ne savais pas comment l'expliquer. Je voulais découvrir au-delà des frontières.

Je me faufilait habilement dans la pouponière pour n'éveille personne. Je sorti de cet endroit pourtant chaleureux pour affronter le droit mordant d'hiver. J'observa les étoiles, elles étaient si loin de moi. Je n'arrivais pas à croire que chacune représentaient un ancêtre défunt. Le clan des Étoiles existe pour ceux qui y croient, forcément. Mais quand est-il des autres ? Ils n'ont pas le droit à ce même traitement de faveur par manque de croyance ?
Mais moi j'avais décidé d'y croire, qu'aurais-je à perdre ?

Un hurlement de chouette me surprit et me stoppa mes pensées qui me torturaient l'esprit. Je décida de faire un tour en dehors du camp, je me sentais prisonnière. Je me faufila sous un buisson et sortit du camp sans un bruit. Je savais que je n'avais pas ce droit, ce qui me procura encore plus d'adrénaline, je préférais faire ce que je ne devais pas faire. J'étais comme ça moi, je n'aimais pas obéir, par le simple principe que c'est moi qui me donne des ordres, j'ai du mal à accepter ceux des autres. Braver l'interdiction était mon passe temps favori. Il m'avait d'ailleurs valu de nombreuses réprimandes de ma mère adoptive. Sur ce coup là, il ne fallait vraiment pas que je me fasse prendre, j'essayais donc d'être aussi silencieuse que possible. Le temps passa à une vitesse folle, je marchais depuis bien plus longtemps que je ne pensais. Soudain, je tomba sur une rivière gelée. Je connaissais le risque de la glace, mais l'envie m'appelait... je finis par prendre une décision bien plus sage que moi et décida de passer au gué. L'eau était bien plus basse, elle ne montait même pas à mon ventre. Mais c'était plutôt le température qui me dérangeait, l'eau était glaciale, elle me paralisait mes membres. J'eus du mal à traverser mais je parvins enfin la berge. Le paysage se métamorphosait si vite alors qu'il était seulement délimité par la rivière. Les arbres de ce côté, tous plus grand les uns que les autres, semblaient vouloir embrasser le ciel étoilé, même la lune avait du mal à éclairer sous ce dense feuillage. Mais ce n'était pas la seule différence, il y avait l'odeur. Un odeur âcre, plus forte par endroits que d'autres. Lorsque je relevais la tête vers la lune, je remarqua des aurores à l'horizon, le jour se levait, il fallait que je sois de retour au camp ! La traversée de la rivière ne fût pas plus simple qu'à l'allée, dans ma hâte je glissais constamment sur les galets, faisant fuir quelques poissons au passage. Arrivés sur notre rive, je courus à travers les sous-bois comme une flèche, avec ce sentiment de liberté qui ne me lâcha qu'une fois arrivée au camp. Je rentre par le même trou dans le buisson qu'à l'allée et m'endormie sans trop de bruit dans la pouponnière, roulée en boule auprès de mes sœurs, mes sœurs si chères à mon coeur.

Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : Apr 26, 2021 ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

Racines d'Erables  {FF LGDC}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant