Chapitre 31

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Cassandre

J'ai passé le dimanche à ressasser les événements de la veille. Depuis deux semaines, toutes ces remises en question reviennent constamment, me pourrissant l'existence de manière perfide. J'ai l'impression de perdre le contrôle de ma vie, de ne plus pouvoir faire mes propres choix. C'est comme si je faisais un bond dans le passé, à l'époque où ma tante me dictait la conduite à adopter. Aujourd'hui, c'est Nathan qui m'impose catégoriquement ses décisions. Je rampe à ses pieds telle une pauvre fille. Je me laisse abuser, de peur de le décevoir, jusqu'à atteindre le niveau moins vingt de ma fierté. Cette petite robe que j'ai enfilée, au dépend de mon éternel jean, en est la preuve. Je suis à la lettre les recommandations de Monsieur Pratton, sans me poser plus de questions, mais j'en paie les conséquences. Les regards curieux qu'on me lance, alors que je traverse les couloirs de la fac, me confirme que ce nouveau look que j'aborde ne passe pas inaperçu. Je resserre les pans de ce trench noir, dernier rempart contre ces œillades masculines qui me fixent avec insistance, et je bénis ces bottes qui cachent une bonne partie de mes jambes. La tête basse, je rejoins la salle où se déroule mon cours de  Droit Civil. Encore une fois, je suis distraite. Je ne saisis pas le quart de ce que le prof explique. Si je continue sur cette voie, je vais ruiner ces trois années de dur labeur. Je ne peux pas me permettre d'échouer maintenant. J'ai besoin d'obtenir ces deux licences pour accéder au master que je convoite. Mais tout se complique tellement dans ma vie que je n'arrive plus à faire correctement la part des choses. La matinée s'écoule dans un brouillard aussi dense que rageant. Rien à faire, ma concentration a rebroussé chemin depuis longtemps, seuls deux visages me torturent l'esprit. Deux visages, deux hommes différents. L'un provoque des battements désordonnés de mon cœur, l'autre sait comment nourrir ma libido. Autant dire que l'intérieur de mon cerveau ressemble à un énorme gruyère.
Les chuchotements qui m'accompagnent alors que j'entre dans la cafétaria, renforcent ce sentiments de gêne que je ressens depuis quelques heures. Fichue robe ! Je me saisis d'un plateau où je dépose mon fidèle hamburger, puis je m'installe à une table. Je n'ai pas le temps d'y goûter qu'une voix inconnue me stoppe dans mon élan :

— Vous êtes toute seule Mademoiselle ?

Surprise, je lève la tête. Voilà bien le genre de gigolos à la coiffure parfaitement gominée, que je déteste. Un air suffisant sur leurs visages bronzés de faux surfeurs, et parés d'un sourire carnassier, trois garçons me dévisagent sans aucune pudeur dans leur polo serré. A cet instant, je voudrais posséder, ne serait-ce qu'un quart de la réparti de Louna, au détriment de cet air stupide que j'affiche, et les faire déguerpir sur le champ. Alors que j'allais ouvrir la bouche, le même garçon, qui semble être le plus bavard et téméraire des trois, reprend la parole :

— Tu prends combien pour un quart d'heure ?

Mes joues picotent aussi violemment que sa remarque, et je déglutis comme une idiote. Je suis incapable de riposter. Ils se lancent un bref regard de connivence qui ne fait que renforcer mon malaise, et leur sourire s'élargit davantage. Embarrassée par leurs regards vicieux, je baisse la tête, le cœur tambourinant dans ma poitrine à m'en faire mal. Si je ne réponds pas, peut-être me laisseront-ils tranquille ? Prête à attendre que leur patience s'amenuise, je me referme comme une huitre. Mon supplice prend fin sans que je m'y attende. Pour mon plus grand soulagement, une voix nasillarde que je reconnaitrais entre mille retentit :

— Dégagez de là bande de puceaux ! Vous n'avez rien d'autre à foutre ?

Je lève aussitôt mes yeux sur une Louna, plantée devant eux en une posture de guerrière, les mains sur les hanches. Même si je ne voulais plus croiser son chemin, sa présence me soulage soudainement.

l'emprise des sensOù les histoires vivent. Découvrez maintenant