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Le noir n'était pas une couleur que je détestais, bien au contraire.

Le noir était le contraire de la lumière, le contraire du bien, elle annonçait le déchaînement de démons malfaisants aussi bien qu'elle accordait à mon esprit un état de calme complet à chaque fois que j'avais la chance de la voir.

C'est sûrement pour ça que jamais je n'aurais pensé que j'en arriverais un jour à détester cette couleur que je vénérais depuis si longtemps.

C'est pourtant bien logique et assez évident, aussi évident que la couleur bleue de l'océan en journée. Sa teinte si spéciale s'épanouissait sous l'influence des rayons chaleureux du Soleil.

J'utilisais souvent cette couleur si unique et obscure, particulièrement dans mes vêtements, de façon à ce que tout le monde croie en permanence que j'assistais à des funérailles. La raison pour laquelle j'avais commencé à la détester, arrivant à peine à la supporter, c'était bien parce qu'elle était partout.

De façon suffocante, telle des ombres invoquées sous l'apparence de mains malicieuses qui s'étaient sournoisement appropriées le pouvoir de visiter chaque parcelle de mon corps sans mon autorisation, en profitant pour étrangler de temps en temps mon cou, me coupant d'oxygène. Cette couleur m'infestait le cerveau, y semant une psychose qui me semblait éternelle.

Ses bêtes.

Ses animaux.

   Ses sauvages.

Ils m'avaient emprisonné, m'avaient kidnappé, m'avaient fait réalisé la vie dans laquelle j'allais m'engager avant de m'obliger à me confronter au noir complet.

Je les détestais, je les haïssais, l'envie de tous les tuer me démangeait tant. Jusqu'au point où j'eus espéré avoir des pouvoirs surnaturels, comme ceux qu'on voyait dans les films de super-héros, où le protagoniste à la personnalité si gentille et timide écrasait son ennemi avec facilité, sauvant l'humanité entière dans le processus.

Si j'aurais eu ça, j'aurais pu tous les tuer et ensuite, j'aurais repris le cours de mon ancienne vie. Rien que les écraser aurait été suffisant pour mon esprit détraqué.

"Tu commences à devenir folle, Soojin" m'étais-je dit à maintes reprises. "Tu commences à devenir comme eux"

Mes cellules sensorielles, mes stimulis, les frissons qui secouaient mon corps, chacun d'entre eux me hurlaient des mots, chacun essayant de me donner plus d'information sur où je pouvais bien me trouver et sur quelle surface je pouvais bien être.

D'après les grincements répétitifs que j'entendais à chaque petit mouvement de ma part, j'ai rapidement deviné que je me trouvais sur une chaise peu appréciable, faite en bois.

Les frissons glacials et les tressaillements qui secouaient mon corps m'ont murmuré à l'oreille que mon être complet, de la tête aux pieds, était couvert d'une série infinie de chaînes en métal, qui n'hésitaient pas à me rappeler de leur existence à chaque fois que je bougeais d'un centimètre.

J'étais demeurée dans mon uniforme de psychiatre, qui avait gardé son odeur habituelle de stérilisé et d'hermétique. C'était d'ailleurs la seule chose qui avait pu me donner ne serait-ce qu'un petit peu confort avant que je ne me rappelle que je n'étais plus à l'asile et que nombreuses étaient les fois où un patient avait recraché leurs médicaments sur cet uniforme bleu, m'obligeant à aller le nettoyer en douce aux toilettes, amassant ainsi des regards perplexes des rares visiteuses des chiottes.

Le pire dans ma situation était sûrement l'excessif de noir qui bloquait ma vue. La seule chose que je pouvais voir et que je voyais était la couleur noire.

𝐕𝐄𝐍𝐃𝐄𝐓𝐓𝐀 | 𝘱.𝘫𝘮Où les histoires vivent. Découvrez maintenant