chapitre 88 : le dernier orage

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NASHVILLE

Affalé sur le canapé, sur toute sa longueur, Nash laissa balancer son bras sur le sol. La joue pressée contre un petit coussin, son regard était braqué sur la Dallas, plongé dans le chaos. Il n'y avait plus aucune lumière. Et pour une capitale entière d'un pays, c'était ce qui se rapprochait le plus d'une situation de crise. Une catastrophe.

C'était à peine si ses paupières papillonnaient.

Il remontait sa main le long de sa blessure qui peinait à peine et souffla si lourdement que le restant de sa couverture tomba au sol.

Il fallait qu'il se lève. Il fallait qu'il fasse quelque chose. Parce qu'il ne pouvait pas juste rester allongé là, lamentablement... Et ça allait faire plusieurs jours, à présent.

Dans un grondement sourd, il se redressa, un coude à la fois.

Lorsque la nuit tombait, l'obscurité avait quelque chose de sourd. C'était angoissant de faire un tour de couloir, de sortir dehors, d'entendre le néant envelopper sa ville comme une main factice. Une parade funèbre se faisait dans les rues, chaque heure de la journée, des centaines de mères gémissant la perte de leurs enfants, écrasés sous les bombes américaines. L'ironie du sort voulait que c'étaient ces mêmes femmes qui avaient fui les bombes de 2001. Et voilà que ceux qui avaient pourtant été les siens, faisaient la même chose.

Parce que l'humanité, c'était ça, pas vrai ? Un cycle funeste, un sort imminent, une damnation éternelle. Un cercle que Nash ne connaissait trop bien et qui clouait son corps blessé sur ce même canapé.

À présent assis, le jeune homme enfouit son visage entre ses mains. Son téléphone sonna plusieurs fois, comme il le faisait tant depuis qu'il était revenu de l'hôpital. S'il y avait bien un business qui éclatait en bourse, c'était celui des armes à feu. Du travail attendait Nash à la pelle. Cependant... La seule chose, du moins la seule personne à qui il pouvait penser, c'était Nala et de la façon dont il l'a éjecté.

Nash rejeta son pull au sol, surmonta la montagne de bouteilles d'alcool qui commençait à s'accumuler sur le parquet de son appartement et se rattrapa de justesse à l'entête de son canapé. Il esquiva la cuisine et s'infiltra dans sa salle de bains, mais au moment où il pressa sa main sur l'interrupteur pour aller la lumière il râla. Avec le retard des générateurs, la lumière et le courant en général n'étaient toujours pas revenu dans son immeuble et ceux qui les avoisinait.

Un long râle dolent s'échappa de sa gorge, ainsi que plusieurs injures peu glorieuses et il se contenta d'enfoncer son visage sous un jet d'eau froide.

- Putain.

Nala. Il avait crié après Nala. Il avait insulté la femme qu'il avait appris à aimer jusqu'à en sentir son cœur exploser. Et tout ça pourquoi ? Pour qu'elle tourne le dos et disparaisse comme s'ils ne s'étaient jamais parlé dans la vie ?

Nash referma le robinet et passa sa main dans sa barbe mal rasée qui avait commencé à gagner du terrain sur ses joues creuses. Dans un sens, il était heureux qu'il n'y avait pas de lumière dans la salle de bains. Ainsi, il ne voyait pas à quel point le bleu céruléen de ses prunelles avait terni ou que sa peau déjà blanche avait pâli. Dans un geste machinal, il se débarrassa de son t-shirt et s'en enfila un autre, plus propre avant de regagner la cuisine.

Son pas, lent, résonnait sourdement à travers son appartement vide. S'il avait passé des années à s'entourer de ses disques de Led Zeppelin ou encore de son maigre passage à l'armée et à West Point, à présent, il n'y prêtait même plus attention. Les fragments, les spectres de son passé le faisait hausser les épaules, à chaque fois qu'il passait devant, car à présent, le plus grand trou, le vide impartial de sa vie a été agrandi, avalant au passage chacune de ces choses qu'il avait pourtant chéri.

One Last Mission T05 ~The Wars We Fight For| ✅Où les histoires vivent. Découvrez maintenant