ℭ𝔥𝔞𝔭𝔦𝔱𝔯𝔢 47

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Maël referma les pages du carnet en cuir marron dans lequel il venait de livrer ses pensées. Il posa son stylo plume à côté avant de se lever. Ses pieds nus foulèrent le carrelage ancien du salon dans lequel il s'était établi en cette fin de journée. Un rapide coup d'œil à l'horloge accroché au mur lui apprit qu'il était tout juste dix-huit heures. Cela faisait presque deux heures qu'il couchait ses états d'âme sur les feuilles vierges de son journal. Il s'étira et traversa la pièce en direction de l'énorme porte-fenêtre ouvrant sur une terrasse, elle-même ouverte sur l'océan à perte de vue.

Quinze ans était passé depuis sa dernière entrevue avec Leo.

Déjà quinze ans...

L'eau avait coulé sous les ponts. Il avait retrouvé la totale mobilité de ses jambes et le loisir de plonger dans l'océan à la découverte de ses mystères. Depuis trois ans, il était même devenu chef d'expédition et responsable du centre de recherche à la suite de Caroline. Il travaillait en tandem avec Alice, l'heureuse maman du petit Ethan.

Cette maison, il l'avait achetée avec l'héritage que lui avait laissé son grand-père. Elle était peut-être un peu trop grande pour lui tout seul mais cette maison lui était destinée depuis longtemps. Finalement, les trois quarts de la demeure servait de bibliothèques de travail.

En foulant le bois de sa terrasse, il faillit perdre l'équilibre sur un jouet d'enfants abandonné. Il se pencha pour le ramasser et le ranger dans l'énorme malle prévu à cet effet. Il n'avait pas vu que son filleul Lucas, le fils d'Ayden et Julie âgé de sept ans n'avait pas bien rangé ses jouets avant son départ.

Il ne lui en tiendrait pas rigueur, il était complètement gaga de ce dernier.

Après avoir rangé tout ce qui pourrait être la raison de son décès, il descendit les quelques marches séparant sa terrasse et l'escalier de pierres naturellement taillées dans la roche menant au banc de sable semi-privatif.

Comme toujours, la caresse du sable encore chaud de la journée ensoleillée fut un délice et rassurant sous ses pieds. Les mains plongées dans son short en jean, il marcha jusqu'à la lie de l'océan. Bien qu'il fasse bon, un léger vent venait secouer son t-shirt contre son torse et emmêlait ses cheveux blonds délavés par le soleil et le sel marin.

Maël ferma les yeux et inspira profondément, imprimant dans ses poumons cette odeur dont il ne pourrait jamais se lasser. Il les rouvrit sur le même paysage.

Encore un jour sans Leo.

Maël se réveilla difficilement. Il ressentait une douleur au niveau de sa jambe. Même seize ans plus tard, il lui arrivait de sentir encore les dents du requin déchirer sa chair et sectionner ses muscles. Il repoussa la couverture qui semblait peser des plombes sur lui et perdit son regard sur le plafond en moulure blanche de sa chambre. Les bras et les jambes écartées, il inspira profondément avant d'expirer lentement l'air de ses poumons. Il reproduisit plusieurs fois cette manœuvre jusqu'à ce que son cœur retrouve un rythme normal et que la douleur s'estompe dans son membre. Malheureusement, il était maintenant pleinement éveillé.

Le réveil affichait cinq heures du matin. Il devait se lever dans deux heures. Il décida que cela ne valait pas le coût d'essayer de se rendormir et décida plutôt de se lever. Il fit un détour par la salle de bain où il prit son temps sous la douche, appréciant les jets d'eau tiède qui caressaient les muscles de son corps et défaisaient les nœuds concentrés dans ses épaules.

Après la douche, il enfila rapidement un short de sport avant de descendre dans la cuisine où il prit une bouteille de jus de fruit. Une barre de céréale coincée entre les dents, il se dirigea sur sa terrasse pour profiter du lever du soleil.

Le chant de l'océan. Tome 2 : mor-brasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant