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SAM

À travers le rétroviseur, je vois Jeanne tomber au sol et se recroqueviller sur elle-même.

Je me dégoûte. J'ai envie de m'exploser le crâne contre le volant, mais je continue de rouler. J'appuie sur l'accélérateur pour conduire comme un fou.

Je dois la sortir de ma vie si je veux pas qu'elle crève comme Stella.
J'ai beau l'aimer comme un dingue, je peux pas prendre le risque qu'elle claque dans mes bras. Car oui je l'aime, je l'aime à en avoir mal, à vouloir m'arracher le coeur pour ne plus le sentir souffrir de la repousser comme un enfoiré.

Une voiture noire arrive à folle allure en face. J'ai juste le temps de braquer le volant à droite pour l'éviter. Ma rage est telle que je me calme pas. Au contraire, j'accélère encore plus.

Revoir ses yeux chocolats me suppliant de lui expliquer mes distances n'arrêtent pas de me hanter. La revoir pleurer dans les bras du sportif me donne des envies de meurtre. Elle a pas répondu à ma question. Elle m'a pas dit si elle l'aimait ou pas.
Et putain ça me rend fou.

J'arrive en sueur chez Warwick. Il est à peine neuf heures du mat mais j'ai besoin d'un verre en urgence.

Je me gare devant sa grande maison de bourge, avant de claquer bruyamment la portière. Je grimpe quatre par quatre les escaliers, sort les clés de ma veste d'une main tremblante, et ouvre la porte avec fracas.

Mon père adoptif doit sûrement encore dormir. Je crèche chez lui depuis mon retour de Pologne. Il a voulu me réintégrer dans le district mais j'ai refusé. Ma place est dans la cave.
Là où la mort m'attend.

Je m'allume une clope, jette ma veste sur le canapé, avant de me diriger vers le buffet du salon. Je me sers un verre de bourbon bien fort que j'avale cul sec, puis je m'en ressert un deuxième.

La tension disparaît petit à petit, mes mains ne tremblent plus. J'essaye de chasser l'horrible image de Jeanne anéantie sur le goudron mais j'y arrive pas.

—Qu'est-ce qui se passe, fils ?

La voix endormie de Warwick me parvient à peine. Je reste debout, la bouteille de whisky à la main, à continuer de remplir mon verre que je vide aussitôt.

Il me l'arrache violemment, et d'un geste brusque il pousse mon verre qui se fracasse sur le sol.

—Assez !

Sa voix n'est plus inquiète, elle me hurle dessus. Il saisit mes épaules et me force à lui faire face.

—T'as pas bientôt finit tes conneries ? Ça fait un mois et demi que t'es rentré et tu continues à jouer au con !

—Laisse-moi tranquille.

Je dégage ses mains, avant de chercher une autre clope dans mon pantalon.

—Où est ta femme ?

Ma main reste figée avec le briquet.

—Ma femme ? je commence à ricaner. Ma femme ? Depuis quand tu considères Jeanne comme ma femme ?

Ses yeux sont aussi noirs que les miens. Il ne rigole pas. Il attrape mon paquet de cigarette que j'ai laissé sur le buffet et s'en allume une.

—Tu m'exaspères, lache-t-il dans un souffle. C'est quoi ton problème avec elle ?

Il va s'asseoir sur le grand canapé en cuir noir, pendant que je reste debout à le défier du regard.

Depuis qu'il est à la retraite et que son vrai fils, Blaise, a pris les commandes, il s'est mis en tête de se préoccuper de mon sort.
Sauf que mon sort est déjà scellé. J'ai perdu toutes les femmes que j'aimais et je refuse que Jeanne soit la prochaine.

Just Play 2  (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant