La forge était le cœur du château de Seiros, une vaste crypte, arrosée par sa propre source. Le long du mur sud, douze foyers au pied de douze statues à l'effigie des élites, les premiers Epéistes, qui à l'ère mythologique avaient combattu aux côtés des dieux, chacun accompagné de son soufflet, son enclume et son bassin de pierre.
Les nains forgerons y fabriquaient de magnifiques épées, longues, courtes, doubles dagues, sabres et armures robustes, ainsi que de multiples trésors de métallurgie. Au centre de la pièce, le véritable trésor, un tombeau de pierre dans lequel, aux dires des druides, résiderait l'épée de Création : la lame du dieu Eriath ainsi que l'égide d'aubeclat un bouclier forgé avec le cœur d'une comète et baigné d'une pluie d'étoiles. Seuls vestiges et preuves de l'existence de ce dieu.
Mais au-delà de tout cela, le vrai pouvoir de cette salle mystique était de finir à forger l'épéiste. Afin qu'il dépasse sa condition d'homme pour s'élever. Que le porteur de lame devienne une arme en lui-même.
Le jour du serment était venu, Dimitri, dès l'aube, avait affronté et tué la bête que le druide avait exigée, et rapporté sa dépouille à l'alchimiste. Puis était venu le temps de la méditation. Il s'agissait de rester dix heures sous la chute d'eau assis en tailleur, à faire le vide dans son esprit et trouver la paix intérieure.
Le vicomte était aussi présent, se plaignant de la faim et de l'ennui, toujours à rechigner dès lors qu'il lui était exigé de faire une chose.
Le maître des runes entra et salua Dimitri, lui demandant le nom qu'il souhaitait donner à sa lame pour qu'il puisse la graver.
- Souffrance ! répondit avec indifférence et mauvaise humeur le jeune Lion.
Le nain haussa les épaules et repartit en marmonnant des paroles incompréhensibles dans sa barbe.
Au crépuscule, le druide et le maître des runes réapparurent et ordonnèrent aux deux hommes de se déshabiller. Puis on leur demanda de se purifier à nouveau. Quand minuit arriva, le rituel commença. Un chant druidique s'éleva dans la pièce, un cercle de feu s'embrasa autour d'eux, des prières furent récitées dans une langue antique.
Tous les élèves des Lions bleus étaient présents, réunis autour du feu. Le maître des runes leva une épée, celle qu'il avait forgée pour Dimitri. L'acier de la lame avait une couleur rougeâtre, la garde large avait pour motifs des ailes, cependant l'acier semblait terne et cette cérémonie avait décidément tout de sinistre. Il enfonça la pointe de la lame dans la poitrine du jeune homme.
- Par ce geste, le Lion bleu qui répondait au nom de Dimitri meurt, récita le Druide, pour qu'à partir de ce jour soit l'épéiste. Que sera ton nouveau nom de Slaighre ?
- Iffrin, répondit l'épéiste.
Saga eut des sueurs froides, Iffrin en langue ancienne signifiait « Enfer », rien de bien réjouissant. De plus, son ami semblait écœuré de la situation. Quant au vicomte, la situation l'ennuyait au plus haut point.
Le druide retira l'épée au bout ensanglanté et la transmit à son propriétaire. Les forgerons nains l'avaient fabriquée uniquement pour Dimitri. Le jeune homme s'agenouilla devant le vicomte et prêta serment.
- Devant Eriath, je jure d'être un homme brave et droit.
De toujours dire la vérité, même si cela doit me coûter la vie
De me garder du mal et de défendre le faible.
En ce jour et ce, jusqu'à ma mort, je ferai honneur à ma lame, et jure de vous protéger, quoi qu'il en coûte. Que nos âmes soient liées par les Dieux, ou que je rejoigne mes ancêtres.
Ces quelques mots qui auraient dû résonner dans la pièce comme des trompettes étaient à peine audibles. L'expression sur le visage du grand-maître n'avait rien de rassurant. Le druide tendit une corne à Iffrin.
- Bois cela, ordonna le druide. Cette boisson contient le sang de la bête que tu as vaincue, pour représenter ta vaillance, l'eau de la source pour la pureté, du gui pour ses ancestraux pouvoirs, et le sang du vicomte, car ce sera la première et unique fois que tu toléreras que l'on verse son sang.
Le jeune homme but la mixture sans même regarder son protégé. Quelques secondes après, il écarquilla les yeux, se raidit, puis tomba. À quoi jouait-il ? s'interrogèrent certains. S'était-il évanoui ? Puis ils comprirent avec horreur la vérité.
Le rituel venait d'échouer.
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Epeistes : Les Chevaliers de Seiros
FantasiŒuvre que je dédicace à une personne cher. Helas la vie me l'as retirer un triste mois de décembre. Comme quoi le destin ne nous laisse pas forcement libre arbitre. Pour elle voici, les épéistes de Seiros, des combattants légendaires, aux aptit...