LA CHAIR ET LE METAL T2 (Ne m'oublie pas)

Chp 16 - Rika : la compagnie vengeresse du vœu exaucé (1)

Sur les vagues de l'Autremer

Tamyan Niśven était désormais le nouveau maître de la Neuvième Cour ældienne, la plus puissante, celle avec la plus grosse armée. Fallait-il s'en réjouir, ou prendre peur ? Je penchai plutôt vers la première option. Le plus important, à mes yeux, c'était que le nouveau roi d'Ombre ait une femme humaine et un fils perædhel. Il était donc sensible aux problèmes qui nous tenaient à cœur, Ren et moi : à savoir, l'intégration des semi-ældiens dans l'Holos. Je parvins à obtenir une audience avec lui, très rapide, tant il était occupé au milieu de tous les hommages de ses vassaux, obligés par les lois de Dorśa à venir un à un se soumettre à ses pieds ou être tués séance tenante par son épée. Sa femme, la sublime Faël, était assise sur le trône avec lui, couverte d'un long voile noir. Sa position allait être délicate... mais en tout cas, Tamyan m'assura qu'il avait d'autres plans que la guerre avec les humains et les raids contre les colonies. Son but était de réunifier les Cours ældiennes.

— Dis aux humains que je ne les attaquerai pas le premier. Mais bientôt, lorsque tout sera fini de mon côté, j'irai négocier avec eux pour le partage de la Voie. La galaxie tout entière était notre empire, autrefois, et si je suis disposé à partager, je ne compte pas y renoncer. L'une de mes premières exigences sera l'octroi de territoires de chasse pour mes guerriers. Les humains devront savoir que tous ceux qui croiseront dans ces zones devront s'attendre à être pris comme des proies. Je passerai par toi et Silivren pour ouvrir les négociations. Puisse Amarrigan être favorable à ta quête : je te donne libre accès à Ymmaril, et l'ost de Lathelennil pour la mener à bien. Il me dira si tu as besoin d'autre chose. Pour toi, les portes de Dorśa seront toujours ouvertes.

Le nouveau chef des ældiens me faisait là une grande faveur, et je fus obligée de lui dire que j'allais transmettre ce message plutôt sinistre. Tamyan Niśven savait ce qu'il voulait, et il ne comptait pas de contenter de rogatons.

Lathelennil m'aida à récupérer l'Elbereth dans la Trame, en passant par le portail des arènes d'Ymmaril, qui communiquait avec tous les temples consacrés au Père de la Guerre.

Comme je l'avais prévu, Elbereth et Dea étaient au summum de l'inquiétude. Elles se précipitèrent sur moi dès qu'elles me virent émerger du portail de la salle des armes, alors que mes trois petits, ravis d'être de retour chez eux, s'éparpillaient dans leurs chambres, ravis d'être enfin de retour chez eux. Nínim, bien entendu, alla tout de suite aux toilettes.

— Où est Alfirin ? s'enquit Elbereth, inquiète. Je n'ai plus de nouvelles de lui depuis qu'il est parti avec ce gouverneur humain.

— Un gouverneur humain ?

J'échangeai un regard avec Lathé. Une fois de plus, il avait vu juste.

— Celui du système de Nuniel, qui se trouvait en vacances sur le même vaisseau de croisière. Il voulait négocier la paix entre les ældiens et les humains avec eux. C'était la mission qu'Edegil lui avait donnée.

Je serrai les poings. Une mission dont il ne m'avait rien dit... une fois de plus.

C'est donc ce que Ren est parti faire cette nuit-là. En fait, les « vacances » n'étaient qu'n prétexte. Il m'avait roulé. J'aurais dû m'en douter. C'était trop beau.

Tamyan Nisven était têtu, impossible à détourner de ses objectifs... mais Ren l'était aussi. Tels étaient les ældiens.

Lathelennil me regarda.

—Je crois qu'une petite visite au gouverneur de Nuniel, s'impose, tu ne penses pas ?

D'après les informations que réussit à obtenir Lathelennil – par le piratage du Réseau républicain, encore – le gouverneur à charge du système de Nuniel était en poste sur une petite colonie proche, Gandor. Nous nous y rendîmes d'un saut, et, la nuit venue, Lathé et moi nous introduisîmes dans sa résidence, aussi peu gardée que celle d'un civil.