18. Latent

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Face à la pluie qui tombait à torrents, le sol se recouvrait d'une couche réflectrice

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Face à la pluie qui tombait à torrents, le sol se recouvrait d'une couche réflectrice. Dans le coin du quartier, un bac à sable affluait d'eau, fluctuant en une boue jaunâtre. Ses cheveux remuèrent à mi-temps comme des ficelles, l'autre mi-temps comme des sangsues collées à sa peau. Le corps de Jill était vidé d'énergie, comme celui d'Adán, qui titubait à grands pas. Des gouttelettes défilaient à l'arrière de ses oreilles, son cou et ses tempes.

Autant que le faix de leurs pas fit éclabousser de petites nappes, autant le sol trépidât aux centaines de chaussures frappant en symbiose le goudron. Jill ignorait pourquoi le collectif infecté courait derrière eux. Pour les lunettes ? Un besoin de vengeance ?

Une envie de s'en prendre à eux comme le feraient des morts-vivants ? Face au doute, le duo aspira d'énormes goulées d'air, chacune provoquant de la buée, mais pas celle des corps infectés fonctionnant différemment.

Il n'y avait qu'eux qui subissaient ces vagues succinctes de nausée. La cadence était trop lourde de conséquences. Ils en étaient déjà à leur second tour, tournant en rond, talonnés par une centaine et quelques autres personnes de tout âge.

Pendant la course, Jill avait entendu le mot gafas sortir à plusieurs reprises de la bouche d'Adán, haletant. Chaque fois qu'elle avait brièvement tourné la tête vers lui, elle l'avait vu faire des gestes lui indiquant de s'en débarrasser.

S'ils étaient sortis de ce bâtiment à cause du bruit qui les avait attirés, techniquement, ce dernier pouvait également les faire changer de direction. Seulement, c'était la seule façon de connaître l'emplacement exact du réservoir.

Adán avait également répété le prénom de Nari. Sûrement pour lui dire qu'elle les aiderait. La jeune Yeon pouvait les faire entrer, vrai, mais elle ne savait rien des détails de la carte. C'était la course contre la mort qui ne lui permit pas de le lui expliquer.

Quoi qu'il en soit, ils manquaient de souffle et de communication unilingue. Jill devait jongler entre ne pas trébucher en gardant un œil sur l'itinéraire qui suivait leur localisation, et ne pas oublier les Infectés qui couraient comme une armada de morts affamés. Il n'y eut aucun cri ou mot qui les rendrait humains.

Peut-être que ce qui les avait maintenus en vie était les énergies radioactives. Jill se demanda si la radioactivité pouvait faire fonctionner un corps sans cerveau fonctionnel. Elle n'avait jamais cru au fantasme postapocalyptique de Tchernobyl.

Si les lunettes n'émettaient pas de bruit, les Infectés s'effondreraient-ils au sol ? Pouvaient-ils redevenir humainement humains ? Si cette mutation les quittait et qu'ils guérissaient, devaient-ils réapprendre la vie, comme un bébé ?

Pendant cette ratiocination parasite, Jill ne se rendit pas compte qu'Adán avait perdu de l'élan au troisième tour. Ce ne fut qu'après un hoquet qu'elle tourna précipitamment la tête vers lui. Elle le vit alors à l'orée des bras tendus des Infectés, leurs mains ouvertes, puis serrées machinalement. Adán continua à crier le mot gafas.

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