Chapitre 1 : Nouvel Œil
Il était temps, Keiji entrevoyait la fin de sa journée de travail. Une main sur le volant de sa Swift, le coude de son autre bras posé sur le renflement de la fenêtre, il avançait machinalement vers son immeuble. Il observait la route, et les personnes qui la partageaient. Elle se répartissait entre des cyclistes, des motos, des scooters et des voitures. Il se mit à penser que les conducteurs de ces différents véhicules rentraient sûrement chez eux, comme lui. Peut-être qu'ils partaient voir des amis ? Ou bien encore, ils rejoignaient l'élu de leurs cœurs ? Si seulement Keiji pouvait en faire autant... Il rentrait chez lui, certes, mais l'homme qu'il aimait ne l'attendait pas le moins du monde. Et cette réalité affectait horriblement Akaashi. Il passa devant le Gymnasium Palace et l'immense désir de s'y arrêter lui rongea le sang, si bien qu'Akaashi s'en déchira la lèvre. Mais finalement, il continua sa route, le cœur aussi pesant qu'une enclume.
Une petite pointe de soulagement apaisa le rédacteur, lorsque la couleur olive de sa porte d'entrée s'imprima dans ses rétines. Après avoir fouillé hâtivement dans une poche de son sac, il inséra les clefs dans la serrure et déverrouilla cette dernière.
En pénétrant enfin dans l'appartement, la porte claqua soudainement derrière lui, et acheva cette journée de la même façon qu'elle avait commencé : sur une note peu enthousiaste. En plus, un léger cliquetis, provenant de l'autre côté de la paroie, l'informait que son inattendu excès de puissance avait fait voltiger la poignée. Il ne manquait plus que ça, bon sang... Keiji ne savait pas réparer une poignée de porte. Fallait-il tout changer ? Ou seulement la rafistoler ? Il allait devoir demander conseil à quelqu'un. Une personne lui vint directement à l'esprit, puisqu'après tout, ils avaient occupé ce logement ensemble des mois durant. Sauf que Keiji ne pouvait pas faire appel à lui, et ce, bien que l'envie de le faire était d'une intensité diablement forte.
Un juron voulut fortement sortir de plus profond de son cœur, mais avec il ne sut quelle volonté, il parvint à le maintenir dans son esprit. Comment y était-il parvenu ? Bonne question. Même lui, lorsqu'il retira ses chaussures, les jetant avec négligence dans l'entrée, après avoir posé son sac et accroché son manteau, il se le demandait encore. Car après tout, il était à bout...
Il entreprit de se boire une tasse de café, histoire d'échapper aux tensions qu'il avait accumulées aux cours de la journée. Il en avait hautement besoin. Une fois le programme lancé, son regard se perdit sur son reflet, déformé par l'acier de la machine à café. A travers elle, ses joues triplaient de volume et son nez s'allongeait. Cependant, ce qui lui sauta aux yeux fut les géantes poches sous ses pupilles. Il ne connaissait personne, autre que la gente du troisième âge, qui portait des cernes aussi volumineuses. Devenait-il vieux avant l'âge ? Non, Keiji le craignait fort. Ceci ne pouvait qu'uniquement le réconforter dans ses réflexions : il souffrait d'une carence en vitalité. Comme les vieux, pensa-t-il avec une amère ironie. La preuve, Keiji était tellement à fleur de peau qu'il avait claqué la porte ce soir. Sans doute était-ce là, l'expression de son trop plein de manque qui s'était exclamé malgré lui ? L'évidence était malheureusement frappante. En considérant la tasse se remplir, il en conclut qu'une seule ne serait pas vraiment suffisante pour le soigner de ce manque.
― Je vais peut-être appeler Tooru ? Se dit-il, dans l'idée de sourire un petit peu. Quoique non... il est tard chez lui...
Il soupira lourdement.
Lassé de scruter son visage déformé, il leva la tête vers la fenêtre. La nuit tombait. Et aujourd'hui avait été aussi triste et démoralisant qu'hier. Les matins étaient mornes, installés dans une routine bien huilée que rien ne pouvait déranger. Les soirs n'y échappaient pas non plus. Tout ce mécanisme, auquel il était inscrit depuis trois semaines n'arrangeait pas son état émotionnel actuel.
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Noce d'Argent
FanfictionQuand Akaashi est appelé pour remplacer un collègue malade, il ne se doutait pas que cette interview gacherait tout ses efforts, pour l'oublier... C'était terminé entre eux. Mais il semblerait que le coeur de l'ancien passeur emprunte à nouveau un...