Matthieu 25:40

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Un à un, de nouveau en rang, les 24 élèves de l'école que nous étions, descendirent du véhicule dirigé par deux maîtresses.

Il y avait une dame souriante. Puis à ses côtés un homme chocolat noir, assez court et musclé, qui avait l'air de ne pas trop savoir ce qu'il faisait là. Ces deux personnes étranges nous attendaient avec des enfants qui se tenaient près d'eux.

Faisant face à ces derniers, par les vents qui nous séparaient, on pouvait deviner que certains d'entre eux souhaitaient être à nos places. Ne sachant même pas que parmi nous se trouvait des êtres qui se sentaient étrangers dans leurs propres maisons.

Et à ce stade-là, je me rends compte qu'il n'y a que dans les bras de Dieu qu'on se sent vraiment à la maison.

Et inviter Dieu dans nos foyers nous aiderait à vivre dans l'amour et la paix.

Ce que ma famille et moi ignorions encore à cette époque-là.

Plus tard, cette même journée, nous étions en train de visiter les lieux avec des adultes qui nous expliquaient un peu le rôle d'un orphelinat.

Combien il était important de donner une maison à ceux qui n'en ont pas. Combien il était important de partager son pain avec celui qui n'en a pas. Combien il était important de couvrir celui qui n'a point de vêtements.

Parce que grâce à Dieu, quelqu'un avait eu la gentillesse de le faire pour nous et nous devions être reconnaissants de tout cela.

On devait se soutenir d'après eux dans ce monde dans lequel le mal s'élevait.

Matthieu 25:40 dit < Et le roi leur répondra: Je vous le dis en vérité, toutes les fois que vous avez fait ces choses à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous les avez faites.>

Alors notre Sauveur connaît nos cœurs et voit chacune de nos actions.

Nous étions plus tard à la cantine en train de manger, nous, nos plats emportés et eux des plats dont ils étaient peut-être lassés par l'habitude, lorsque je me sentais finalement un peu gênée.

Surtout que je pouvais apercevoir les regards de certains enfants s'accrocher à moi et à mes dents.

Cependant, je ne m'arrêtais point, n'ayant guère le courage de proposer à l'un d'entre eux de partager mon repas.

Je me disais sûrement qu'ils pouvaient mal le prendre.

Puis, l'une de nous, après avoir fini de manger, éleva la voix. 'Maîtresse, pouvons-nous aller jouer avec eux ?' Avant l'acquiescement des adultes.

Nous nous étions donc retrouvés quelques minutes plus tard en train de s'amuser à l'extérieur, lorsqu'un enfant maigre qui ne faisait que nous observer vint vers nous.

Il avait l'air un peu plus âgé que moi et baladait à ses côtés un petit garçon, qui lui avait l'air d'avoir dans les trois ans. 'Bonjour... ' Disait l'aîné.

'Bonjour !' Répondit-on.

'Vous avez des parents vous ?' Demandait-il.

Et bien que je trouvais sa question étrange, j'avais mal pour lui. Je ne pouvais que remuer la tête en signe d'approbation.

Mais une de mes camarades, ne connaissant pas ce sentiment-là, s'empressa de s'exprimer par des mots. 'Oui... ' Dit-elle, 'et ils nous font pleins de bisous.'

'Est-ce qu'ils vous donnent à manger et vous emmènent en balade comme dans les livres ?' Posait-il, alors que j'acceptais de nouveau par les mouvements de ma tête.

Cependant, inconscients du poids de leurs mots, plusieurs des enfants à mes côtés répondaient 'Ils en font trop même.'

Et les petits garçons voulurent se retourner pour partir lorsque je les retins. 'Hé... ' D'une voix qui gargouillait.

Ainsi, ils se mobilisèrent, comme figés dans le temps 'Oui ?'

'Pourquoi tu l'emmènes partout avec toi ?' Demandais-je, au plus âgé.

'C'est mon petit frère.'

Je m'approchais alors de lui et chuchotais 'J'aimerais bien moi aussi que mes frères me baladent.' Par honte que mes amis entendent que tout n'allait pas forcément bien dans ma famille.

'Ils ne le font pas ?'

'Non... ils baladent que leurs petites copines.' Avouais-je.

'Si tu le veux, viens, je t'emmène en balade.' Me Proposait-il.

Je laissais de ce fait mes copains afin d'aller visiter cet endroit qui était sa maison et celle de plusieurs autres enfants.

'Tu vois ça ?' Dit-il en pointant du doigt à un arbre au milieu de la cour.

'Oui.'

'C'est un manguier, c'est le plus beau de nos trésors. À chaque saison de mangues, on court un à un comme des fous pour déguster des jolis fruits.'

'La mangue, c'est mon fruit préféré.' Lui informais-je.

'C'est vrai ? Tu les aimes comment ?'

'Bien mûre !'

'Moi, je les aime vertes avec du cube et du sel.'

D'un air assez dégoûté, cependant curieux, je demandais 'c'est bon ?'

'Très... tu devrais essayer.'

'Ma mère ne me laisserait jamais le faire.'

'Tu peux le lui demander.'

Je baissais donc la tête et il devina 'tu ne demandes pas souvent toi, n'est-ce pas ?'

'Non... '

'Si tu as des parents, c'est pour ça, et s'ils te disent non, recommencent... j'aimerais bien avoir des parents qui me disent non des fois, ça m'éviterait plusieurs maux de ventres.'

'Ça te donne des maux de ventres ?' Étais je grandement étonnée. 'Mais alors pourquoi tu en manges ?'

'Oh... juste quand tu en prends trop.' Répondait-il, d'un air amusé, avant de continuer, 'Et j'en mange trop... je fais toujours tout de trop dans l'espoir qu'un jour mon père ou ma mère me dise d'arrêter.'

Puis, une pluie de secondes avait passé, abandonnant le regard de ce petit garçon vers cet arbre, et je me mis devant lui, essayant d'attirer son attention qu'il me donna sans pénible hésitation, contrairement à mes parents. Je lui posais donc la question de savoir, 'où sont-ils ?'

'Hum... ma mère s'est levé un matin et est partie. Quant à mon père, c'était un alcoolique qui nous laissait chaque jour pour aller dans des bars et tout ce qu'il pouvait trouver dès l'aube, ouvert.'

'Mon père aussi, il boit beaucoup.'

'Au moins, il pense à vous laisser à manger.'

'Ça... c'est maman qui le fait.'

'Au moins, vous avez à manger... nous, on mourrait de faim et c'est par obligation qu'on a dû venir ici... pour avoir au moins un repas par jour. Même s'il nous arrive de manger la même chose plusieurs fois.' Me contait-il.

Et je me retrouvais là, en train de me sentir mal pour lui, pourtant si proche, lorsque les maîtresses crièrent chacun des noms des enfants de l'école.

Ma Foi À Rude Épreuve.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant