Chapitre 41

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Samedi 10 h 12, un soleil éclatant s'impose dans un ciel dépourvu de nuages, ce qui fait que l'air est plutôt doux pour une fin février. H passe en voiture devant le cimetière et aperçoit les employés s'affairer à couler du ciment au fond du caveau. L'occupante de la tombe aura de la compagnie pour l'éternité et pas la plus plaisante.

Rassuré, il peut aller chez Charline pour se faire pardonner, mais il lui envoie un message pour l'avertir de sa venue.


12 h 57, H a bien roulé et arrive sur le parking de l'immeuble de Charline un peu plus tôt que prévu. Il prend son sac et le bouquet de fleurs puis sort de l'habitacle.

Devant la porte sécurisée, H profite de la sortie d'un locataire pour entrer. Dans le hall, il tombe nez à nez avec Stéphane, le fameux dentiste et ex-amant de Charline.

Le quadra qui quitte l'immeuble le reconnait et lui sourit :

— Salut, jubile Stéphane en posant le regard sur les fleurs.

— Salut, répond H sans s'arrêter, mais étonné de le trouver là.

— Je voulais te dire que ça ne me dérange pas qu'on se la partage, lui lance Stéphane qui profite de l'entrée d'une mère et de ses enfants pour sortir.

H, qui s'est retourné sur lui, hésite à le suivre pour lui demander plus d'explication à grands coups de poing dans la tronche ou à monter parler avec Charline... L'air de la femme, qui presse ses enfants contre le mur pour tenter de les faire grimper les marches, l'avertit qu'il affiche une tête de psychopathe.

Il inspire profondément pour se calmer et s'écarte pour laisser la petite famille prendre les escaliers. Il profite des trois étages pour se raisonner, car même s'ils n'en ont pas vraiment parlé, H pensait que Charline avait mis un terme à sa liaison avec le dentiste, peut-être pas à cause de lui, mais par peur d'avoir été agressée à cause de cette aventure extraconjugale.

Tout ce que Charline lui en avait dit quand elle était en convalescence chez Jeanne, c'est que Stéphane ne prendrait pas de ses nouvelles jusqu'à ce qu'elle reprenne le boulot, parce qu'ils n'avaient jamais communiqué par téléphone ni par SMS et qu'il ne le ferait pas. Quand il voulait la voir, il lui parlait de séance de cinéma sur leur lieu de travail, lui indiquant l'heure et le lieu de leur rencontre... « Putain, le con ! », s'invective-t-il mentalement. « Dimanche dernier, elle m'a dit qu'elle irait au ciné ! »,  comprenant seulement maintenant le sous-entendu.


Au deuxième étage, il croise une petite grand-mère : « C'est pour vous, madame ! », lui déclare-t-il en lui collant les fleurs dans les bras pour s'en débarrasser, puis il continue sa route, malgré l'air hébété de la vieille femme.

Quand Charline lui ouvre, l'air épuisé, elle lui sourit en lui lançant un petit « salut », mais elle se tend très vite en déchiffrant l'expression dure qu'il affiche.

— Je ne t'attendais pas si tôt, affirme-t-elle en fermant derrière lui.

H pose son sac au sol près de la porte, conscient qu'elle le prend pour un con avec un très grand « C ».

— Ben, j'constate que vous avez quand même eu le temps de finir et de vous resaper, lui lance-t-il en contenant sa colère qui monte en flèche.

— Oh, souffle-t-elle piteuse. Tu as croisé Stéphane ! ajoute-t-elle en se dirigeant vers le salon, consciente qu'elle a un problème et qu'elle ne sait pas comment gérer.

— Tu t'fous vraiment d'ma gueule ! s'étonne-t-il en fronçant les sourcils. Putain, mais c'est quoi ton problème ? feule-t-il parce qu'elle ne cherche pas à nier. T'as pas eu ta dose de cul ? Ou tu t'es juste sentie vexée parce que j't'ai pas tringlée au moment où tu l'voulais ? C'est ça ?

Charline, assise sur le canapé, ne peut plus supporter sa colère, alors elle tourne le regard vers la fenêtre, après s'être sentie pâlir.

« Elle n'en a rien à foutre », réalise-t-il face à son comportement distant.

Énervé qu'elle garde le silence, il pense à l'expression « qui ne dit mot, consent », ce qui exacerbe toutes les idées qu'il se fait d'elle et de son dentiste.

— Putain, Charline, parle, tu t'le tapes oui ou merde ? s'emporte-t-il, espérant qu'elle démente ou qu'elle nie un minimum.

— Oui, ment-elle accablée par la douleur qu'elle éprouve en ce moment même.

Elle, qui s'était forgée une carapace pour se protéger de la souffrance et des déceptions générées par des liens sociaux, amicaux ou amoureux, réalise que son cœur va se déliter.

Pour ne plus avoir mal, elle doit repousser tout ce qui exacerbe cet horrible état dans lequel elle est. La « Charline sur la défensive » veut reprendre du service, car sa colère bout en elle et veut sortir.

H s'est figé et la fixe durement :

— Putain, c'est tout c'que t'as à dire ? crache-t-il.

— Tu veux quoi, des détails sur ses positions préférées, peut-être ? lance-t-elle en se levant pour lui faire face. De toute façon, tu n'as jamais demandé ce que je faisais de mon temps libre ! ajoute-t-elle, acerbe.

— Putain, quel con, réplique-t-il en se passant une main dans les cheveux. J'ai jamais demandé ! ironise-t-il. Ouais, t'as raison c'est complètement ma faute, ajoute-t-il furieux.

— Roh, je t'en prie, ne joue pas les victimes, s'agace-t-elle. Depuis le début, tu sais qu'il n'y a que les mecs mariés qui me branchent.

— T'as vraiment un pète au casque, se désole-t-il. Tu sais quoi ? J'en ai plein l'cul de tes états d'âme. Tu veux rejeter toute relation pour n'être qu'un objet sexuel pour ton dentiste, très bien. Tout c'que tu vas y gagner c'est de finir seule !

— Dixit le mec divorcé, mais qui reste marié à sa femme ! s'emporte-t-elle en pointant un index accusateur.

— Ben oui, j'aime ma femme, s'écrie-t-il, au-delà de sa pensée. Moi au moins, je sais ce que ça veut dire et c'que ça implique, crache-t-il en se pointant du doigt.

Ces mots la giflent et en même temps, la colère qui anime H la fait reculer :

— Va-t-en ! lui ordonne-t-elle, furieuse.

H tourne les talons et fonce vers la porte qu'il claque en sortant.



Il sort de l'immeuble, grimpe dans son véhicule et réalise qu'il a oublié son sac. « Rien à foutre », pense-t-il en envoyant un message à Vince, puis il démarre... Direction Berlin.

Il roule en ville et crispe les mains sur le volant, quand il doit s'arrêter aux feux tricolores. Vince qui n'a pas traîné, l'appelle :

— C'est quoi l'problème ? demande Vince mis sur haut-parleur.

— Rien qui t'concerne, réplique H la voix tendue.

— T'avance ton départ pour l'Allemagne d'une semaine et y'a pas d'problème ? s'étonne Vince, inquiet.

— Fais pas chier, grogne H.

— Dis-moi où t'es, j'te rejoins ! insiste Vince.

— Bien sûr, avec les flics qui te collent au train, non merci ! clame H.

— Putain, s'agace Vince. Alors prends...

— Personne, crache H. Patrick ne peut pas quitter son vrai taf comme il veut, et on n'peut se fier à personne d'autre pour le moment.

— Fait chier, marmonne Vince.

— J'te rappellerai quand je s'rai à Berlin et que j'aurai pris contact avec mon fournisseur d'armes, ajoute H en démarrant.

— Dis-moi c'qui...

Enervé, H coupe la communication. Deux minutes plus tard, il reçoit un SMS de Vince :

« J't'colle pain quand tu rentres pour m'avoir raccroché à la gueule, prépare-toi ! » 

Une Cage et des liens 🔞 ( terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant