AUTOMNE - 1. RAINBOW ROAD

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La voiture roulait bien plus vite qu'elle ne le devait, mais j'enjoignai Barth à accélérer un peu plus. J'observai le compteur de vitesse augmenter en phase avec l'adrénaline qui courait dans mes veines. Autour de nous, le paysage n'était plus que des lignes et les arbres des silhouettes sans forme ni couleur. Admirant la scène qui se dessinait sous mon regard, je montai ma bière à ma bouche et tournai la tête vers notre passager. Charles était plaqué contre le dossier de son siège, tenant sa ceinture et observait, terrifié, la route.

– Détends-toi, ris-je. Barth est un excellent conducteur.

– Il a bu, rétorqua Charles.

Je roulai des yeux et me réinstallai sur mon siège. Charles était la pire personne avec qui s'amuser.

– Accélère, ordonnai-je à mon meilleur ami qui m'adressa un sourire en coin et appuya sur l'accélérateur. La voiture filait à présent à une vitesse tout simplement indécente.

– Oh mon dieu, je vais être malade, lâcha Charles.

Je l'ignorai et ouvris la fenêtre. Le bruit de la musique dans la voiture se noya dans le calme de la campagne et je laissai sortir ma main, la résistance de l'air rendant difficile de garder ma main droite, c'était absolument génial.

– Max, finit par lâcher Barth, on a les flics aux trousses.

Je roulai des yeux et rentrai ma main.

– Père paiera, on s'en fiche. Continue à rouler.

Il éclata de rire et accéléra, ignorant les sommations d'arrêt des unités de polices à présent derrière nous. La voiture prit un premier virage, puis un second. Le son des battements de mon cœur remplaçait doucement celui de la musique et un sourire maniaque se dessina sur mon visage. Je prenais mon pied. Charles beaucoup moins. Cela, je ne le réalisai que lorsque le contenu de son estomac finit sur le dossier du siège de mon meilleur ami.

– Putain Charles ! hurla-t-il. Il se tourna légèrement pour voir l'étendue des dégâts.

La voiture quitta la route. Un cri de terreur s'échappa de ma bouche, Barth tenta de freiner avant que nous ne rentrions dans un arbre et Charles s'était évanoui. La voiture pila à quelques centimètres d'un arbre, ma tête tapa contre le panneau de bord de la voiture. Je fermai les yeux en entendant un craquement désagréable venir de derrière moi.

Lorsque j'ouvris les yeux, j'étais dans un hôpital. Pas vraiment étonnant avec l'accident que nous venions d'avoir. Je soupirai et tentai de me redresser. L'infirmière qui vérifiait ma perfusion lâcha un son ressemblant au couinement d'une souris en me voyant me réveiller et courut presque hors de la chambre.

– Professeur Dunheim, cria-t-elle en sortant.

Oh. Au moins je savais où j'étais. Mon grand-père passa la porte de ma chambre, vêtu de sa blouse blanche.

– Tu te réveilles, me demanda-t-il en allemand.

– Oui, répondis-je dans la même langue. J'ai un peu mal à la tête, mais je me sens bien.

Il eut un rire sans joie.

– Tu as eu beaucoup de chance, étant donné que tu ne portais pas de ceinture et que la voiture a quitté la route.

– On serait restés sur la route si...

– Peu importe, me coupa-t-il avec un regard sévère. C'était dangereux et inconscient de ta part de ne pas t'attacher, encore plus lorsque tu as décidé que la voiture devait dépasser le mur du son.

Il soupira et attrapa ma main.

– Qu'est-ce que nous aurions fait si tu ne t'en étais pas sortie ?

Je haussai les épaules. Père et Mère auraient eu un autre enfant, sans doute un plus satisfaisant que je ne l'étais. Lorsque je formulai ma réponse, Jürgen me fit taire d'un regard sévère.

– Cesse de dire des âneries.

Je décidai de me murer dans le silence. Si Jürgen ne voulait pas voir la vérité, qu'il le fasse. Mais je n'allais pas me voiler la face : mes parents auraient préféré n'importe quel autre enfant que moi.

La porte s'ouvrit quelques minutes après ça, et Père entra dans la pièce. Il portait un costume trois pièce gris clair et était particulièrement énervé. Cela se voyait dans le fait que ses yeux verts étaient fixés sur moi et non pas sur l'écran de son portable ou sur une tablette comme ils l'étaient habituellement en ma présence. Il posa une feuille devant moi ainsi qu'un stylo.

– Signe ça.

– Qu'est-ce que c'est, demandai-je en analysant le papier.

– Une lettre d'excuse envers ce pauvre Charles Windsor. Son nez est cassé et ton ami (notez le dédain qu'il utilisa pour prononcer le mot ami.) Barthelemy est déjà de l'autre côté du monde.

– Pourquoi est-ce que je m'excuserais, Charles est monté lui-même dans la voiture !

Il était même celui qui avait proposé qu'on fasse un tour. Il avait peut-être sous-entendu qu'il voulait que nous ne soyons que tous les deux. Et, j'avais peut-être roulé des yeux avant d'attraper le bras de Barth, les clés de sa voiture et trainé Charles avec nous. Mais l'idée était la sienne, pas la mienne.

– Ce n'est pas ce qu'il a dit. Il a le nez et le poignet cassé, Maxime.

Qu'est-ce que ça pouvait bien me faire qu'il soit blessé ? C'est de sa faute si nous avions eu un accident ! J'allais répondre à Père que je ne signerais pas, mais le regard implorant de Jürgen me fit me raviser. Bien, parce qu'il me le demandait, je garderais les détails sordides de l'affaire pour moi.

– Je dois signer où ?

Il m'indiqua où signer et je le fis. Je grimaçai en sentant que fermer mes doigts me faisait mal. J'ignorai la douleur et tendis la feuille et le stylo à Père qui les prit et quitta la chambre.

– D'ailleurs, lâcha-t-il en passant l'embrasure, ton école a appelé. Tu es renvoyée. Mais ne t'inquiètes pas, j'ai trouvé un établissement qui veut bien de toi.

Son ton... Comment parler de son ton. Il avait parlé comme s'il ne comprenait pas comment quelque chose pouvait vouloir de moi. Je le regardai, cachant le fait que ses paroles me blessaient dans un regard noir. Il ne m'adressa pas un regard, se contentant d'un sourire cruel et quitta la pièce, me laissant avaler la nouvelle, avant que je ne me mette à hurler de rage. Saint Michael était ma maison, le seul endroit sur terre où j'étais bien et il m'était à présent arraché.

– Ils ne peuvent pas faire ça, dis-je à Jürgen. Je suis le capitaine de l'équipe d'escrime !

Jürgen m'adressa un regard de pitié, et laissa l'infirmière s'occuper de moi.

Après quoi, j'avais dû rester dans ma chambre d'hôpital pour bien une semaine puis on m'avait envoyée loin de mes parents et de l'Angleterre pour me faire oublier. J'avais donc passé les mois d'été toute seule dans la maison de Saint-Tropez - celle que mon père ne fréquentait pas - avec l'interdiction de sortir. Enfin cela après un passage express dans mon futur établissement scolaire à Paris pour un entretien avec la direction. Un baby-sitter qui me surveillait et portait le titre de « garde du corps », faisait ma seule compagnie. J'avais donc pu apprécier la piscine et la villa sans accès à qui que ce soit d'amusant et des téléréalités française pas terrible.

Mais la plus grande cause de rage chez moi était tout simplement la villa d'à côté où j'entendais de rires et des gens s'amuser, quand j'étais toute seule avec un imbécile qui aurait pu finir dans les Marseillais ou je ne sais pas quoi.

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Premier chapitre, ou plutôt petite introduction de notre personnage principal ^^


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⏰ Dernière mise à jour : Sep 06, 2021 ⏰

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Le Jour où la mort m'a FauchéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant