64. Coup de stress

3 0 0
                                    


- Tu viens pour qui, toi ? me décidai-je à lui demander.

- J'aime l'éclectisme, répondit-il avec un air absent. ça dépendra de mon humeur... Mais j'aimerais bien découvrir Craddle of Blast en live, il paraît que c'est mortel. Et il y a Xpagenza, Miss Alcatrazz, BabydollxNecronomicon à qui j'ai promis de passer voir leurs sets...

- Quoi, tu les connais ? m'exclamai-je.

- Certains plus que d'autres mais... oui.

- Je vois...

- Tu vois ?

Sa modestie m'agaçait. Comment pouvait-on connaître la moitié des artistes du FireNigths et perdre son temps à discuter avec une gamine comme moi ? Sans doute que lorsque nous serions arrivés, il disparaitrait pour retrouver le quartier VIP ou quelque chose du genre... 

Cette pensée m'irritait.

- Bref, tu vas mixer aussi ? demandais-je pour changer de sujet.

- Oui.

Sa réponse, trop brève me laissa sur ma faim. Il sembla le comprendre car, après quelques instants de silence, il reprit d'un ton absent :

- Demain matin sur la scène 14 et le soir, sur la 6 et puis la 17... Pour dimanche, on verra.

Je ne sais pas s'il était réellement blaser ou si c'était une forme de retenue.

- Tu aimes ça, mixer devant des gens ?

- En effet.

Ses réponses courtes et directes me déstabilisaient. Une fois n'est pas coutume, j'avais un peu de mal à trouver un sujet de conversation... Ce fut lui qui me vint en aide.

- Et toi ? Qu'est-ce que tu aimes dans l'électro ?

- Et bien... commençai-je avec un ton hésitant. J'aime pouvoir danser.

- C'est un début, fit-il en m'adressant un clin d'œil taquin.

- J'aime quand les beats s'envolent et que...

- Que ...? m'encouragea-t-il.

Je me rendis compte que je m'étais un peu laissée emportée. Hors de question qu'il pense que j'étais une allumée que la musique transporte dans d'autres dimensions...

- Je ne sais pas trop... en fait, me renfrognai-je.

Drice se mit à rire... 

Mais quelle conne ! Il allait vraiment penser que j'étais une gamine sans cervelle et sans la moindre capacité de jugement. Heureusement, j'aperçu des rangées de tentes au loin. Nous étions bientôt arrivés. Je serais quitte de cette conversation gênante mais il nous faudrait encore affronter la brigade canine...

Et je ne croyais pas si bien dire, deux chiens tournaient déjà devant les barrières nadar où le bus s'arrêta. J'avais l'estomac noué. Je cherchai des yeux Sam ou Amara... Elles avaient promis de venir me retrouver à mon arrivée. Je ne voyais cependant que la file de ceux qui attendaient de pouvoir rentrer sur le site du festival. Malcolm, Edouard et Petrew s'y trouvaient déjà. Je leur fis un petit signe en suivant Drice qui semblait prêt pour la suite des événements. 

Sereinement, il me prit alors la main, pour être raccord avec le personnage mais aussi peut-être pour m'apporter son soutien silencieux. Le contact de ses doigts autour des miens ne fit que rajouter une dose à mon stress. J'aurais aimé pouvoir descendre une demi bouteille de vodka, là tout de suite, et me sentir un peu plus détendue...

- Vous avez vos tickets ? demanda un homme grisonnant avec un ton sévère.

- Euh, oui, attendez...Sortie de ma rêverie, je me souvins que j'avais fort heureusement glissé le papier dans une poche accessible de mon sac à dos...

Je lui tendis fièrement la feuille où se trouvait le QR-code qui me permettrait d'accéder au saint Graal...

- Quel âge avez-vous Mademoiselle ? demanda-t-il avec un haussement de sourcil suspicieux.

- ... 16 ans, me rappelais-je après un temps d'arrêt.

- Je peux voir votre carte d'identité, s'il vous plaît ?

Une nouvelle fouille et je pu lui présenter le document demandé. Drice quant à lui tenait déjà son billet dans la main et attendais qu'on lui passe le fameux bracelet en tissus ; celui que chaque festivalier rapporterait triomphalement de ces quatre journées de musique et de fête.

- Puis-je voir le contenu de votre sac, jeune homme ?

Un frisson d'effroi me parcourut. Je me sentis pâlir et me retins de jeter un œil paniqué à mon compagnon. Cette fois, c'était la fin. D'autant que les flics ne se trouvaient plus maintenant qu'à quelques mètres de nous...

- Mais bien sûr, obtempéra Drice en conservant une attitude calme et détachée. Voici...

Je vis le responsable des entrées s'emparer dudit sac et l'ouvrir en grand. Je ne voulais pas voir ça ! Avec la quantité d'herbe qu'il transportait, aucun doute qu'il allait directement filer en prison... Je fermai les yeux, attendant que tombe le couperet.

- Très bien, vous pouvez y aller. Bon festival à tous les deux.

Je n'en croyais pas mes oreilles. Comment est-ce que ce type avait pu passer à côté de ça ... Je lui répondis un merci peu convaincant et, quelques mètres plus loin, me retournai vers Drice avec le visage blême et plein d'interrogations. 

Celui-ci me fit un clin d'œil et me repris la main. Nous n'avions plus qu'à longer la rangée de barrière derrière laquelle se trouvaient deux policiers et leurs chiens. Encouragée par notre première réussite, je rassemblai le courage qu'il me restait et passa le bras autour de sa taille.

- Ça y est, nous y sommes ! m'écriai-je avec un ton joyeux et légèrement excessif.

Drice ne dit rien mais m'embrassa sur le front, alors que nous passions devant la brigade canine. Les animaux, qui semblaient aussi blasés que leurs maîtres, se contentèrent de nous regarder passer. 1,... 2, ... 3. Nous étions de l'autre côté ! Sous le haut porche, je m'écartai du jeune homme. Je pouvais enfin respirer...

- Tu as été parfaite, me félicita Drice, sorti de son mutisme. Merci Charlie !

Je lui souris timidement. Mon cœur battait encore trop vite pour me permettre de réagir d'une manière plus franche.

- Drice ! Enfin je te croise ! ...

Drice - D'ombres et de lumières [PARTIE I]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant