Le réveil

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Marie ouvrit péniblement les yeux dans la salle de réveil.

- Bonjour Madame Purmot, lança l'infirmière d'une voix vive. Alors on émerge doucement ? Vous ne vous rendormez pas cette fois-ci, hein ?

Marie sourit, rassurée : l'opération était terminée. Elle distingua entre ses cils les plaques grises du plafond. Elle les avait toujours trouvées ternes et morbides. Une fois, elle s'était même permis de faire une réflexion à une infirmière, disant qu'une pareille horreur n'incitait pas au réveil. Mais ce jour-là, tout était différent. Marie trouvait ce plafond lumineux, parfaitement à sa place.

- Madame Purmot, lança à nouveau l'infirmière, nous vous ramènerons dans votre chambre quand vous serez complètement réveillée.

- J'ai eu tort vous savez, lança Marie encore somnolente, cette pièce est superbe, idéale pour le réveil.

- Si vous aimez ce lieu c'est que vous êtes guérie Madame Purmot, et c'est une bonne nouvelle.

Marie regarda à nouveau le plafond. L'infirmière avait raison, elle était guérie. Elle redressa la tête, regarda autour d'elle. Plusieurs personnes étaient en cours de réveil. Un homme semblait agité.

- Je suis un cow-boy, criait-il.

Le sourire aux lèvres, Marie repensa aux dernières années, à cette lutte de longue haleine, à cette souffrance qui lui semblait insurmontable. Marie était fière d'elle, fière des médecins qui avaient réussi à la guérir, fière de ses proches qui lui avaient rendu la vie plus facile et surtout fière de Mathieu son inépuisable soutien depuis tant d'années.

- On va y aller madame Purmot.

- Encore un instant ! répondit Marie.

Le souvenir lointain de son père lui fit monter les larmes aux yeux. Il avait été le premier à partir. Marie se souvint d'une journée d'été, alors qu'elle était âgée de sept ou huit ans, pendant laquelle ils avaient fendu du bois ensemble. Ils avaient passé l'après-midi dans la forêt, dans le but de préparer des réserves pour l'hiver.

Marie sentit sont ventre se contracter, prémices d'un fou rire. Elle respira profondément, gardant la fin de l'anecdote en suspens quelques secondes. Rire aurait pu faire lâcher les points de sutures. Alors qu'elle venait de fendre sa première buche, son père lui avait dit très sérieusement en lui passant une main dans les cheveux : « Bravo ! Tu seras un homme, mon fils ! ».

Le réveilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant