Savoir dire au revoir. Mettre un terme à nos sourires, nos souvenirs, abréger nos souffrances et nos derniers bonheurs. Officialiser la fin, balayer toute notre vie en un souffle, en un simple geste de main.
Au revoir, à la personne que j'étais, adieu à celle que je suis devenue.
À jamais à celle que j'ai créée de toutes pièces à la force de mes larmes.Au revoir à la vie, à la joie, à l'ennui et à la foi. Au revoir à toutes ces choses, qui font d'un rien tout un monde pour au final tout détruire sur leur passage.
A présent, je dis au revoir aux amours bâclés, aux enfances entachées, aux blagues trop longues et aux je t'aime raccourcis.
À présent, je dis adieu à tout ce que j'ai vécu et apprécié. Je ne veux ni me souvenir, ni rire, ni pleurer.Au revoir. Je ne veux qu'enterrer mon être et ma conscience; les ensevelir de terre salie et infestée d'insectes; balancer quelques fleurs sèches, rêches, dont la couleur a été altérée par les rayons du soleil; cracher mes peines sur ma tombe; souiller mes mémoires.
Je veux dire au revoir au monde et je veux que le monde m'oublie.
Je veux effacer ma présence, en espérant la rendre plus belle ainsi.Au revoir...
Adieu...
À jamais...
à cette nostalgie qui me bouffe depuis des années, à ces émotions qui m'ont fait vivre jusque là; à ce plaisir que j'ai ressenti dans les bras d'amants, à cette douleur que j'ai ressentie dans les bras du temps; à ma vie, à mes enfants.Aujourd'hui, je suis une flaque sur le sol, piétinée, insultée, redoutée.
Mais avant... Oh ! Avant j'étais tout un univers. J'étais la beauté qui rend fous les charognards, la laideur qui effraie les petits enfants, la douceur qui a réconforté les miens, la fermeté qui a fait pleurer ma mère, la lascivité d'une muse en quête de son artiste, l'aigreur d'un corps qu'on a peur de toucher.Le temps passe et emporte avec lui les rires des enfants.
Il bousille des vies, sacrifie des visages. Je fais partie de ses victimes.
Je suis devenue un temple redouté, dit hanté, abandonné.
Mais rappelez-vous de l'univers que j'étais avant !Toute ma vie, j'ai tenté, j'ai trinqué.
Qu'est-ce que j'y ai gagné, hein ? Des cicatrices, des remords, des varices, des torts.
Mon souffle en est coupé, je suis comme paralysée.Au revoir.
J'ai tout essayé, mais la nostalgie a bouffé mon temps, a bouffé ma vie.
Je ne suis plus rien.Adieu.
Je ne pleurerai plus. Je ne gâcherai plus mes nuits les plus noires et les plus reposantes à souiller mon oreiller.À jamais.
Je ne pleurerai pas. Mon cœur ne bat plus, ma tête ne pense plus. Je n'aime plus, je ne ressens plus. C'est fini.Enfin.
La nostalgie est chronophage.
À vouloir tout garder près de moi, tout s'est dilapidé. J'arrête de perdre du temps à vouloir façonner ma vie.
Les rires des enfants s'éteignent au loin, les rayons du soleil faiblissent. Les cordes du violon se sont brisées, la musique touche à sa fin, les dernières notes
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adieu, Spleen
Short Storyla nostalgie est chronophage, c'est elle qui creuse nos tombes et enterre nos êtres les plus chers. bouquet de pleurs || foé 16.01.2022 elsa.