Light ouvrit la bouche, s'apprêtant à tout expliquer. Il dirait la vérité, enfin, le dosage de vérité nécessaire pour se tirer d'affaire.
Mais L ne manqua pas de venir contrarier ses manigances.
- Inutile de te justifier. Quoi que tu dises, je ne manquerais pas à mon devoir. J'ai ordre de t'arrêter, et cette fois je n'échouerais pas. Toutes mes excuses, Kira.
L se tut, scrutant la réaction de Light. Celui-ci afficha une horrible expression d'homme perdu.
Mais cela ne dura qu'un instant.
Au suivant, un horrible craquement retentit. Celui d'un masque qui se brise, ou d'une âme qui se disloque, nous ne pourrons jamais savoir.
Aussitôt suivit d'un son saccadé, que L identifia d'abord comme une sirène insolite, avant de découvrir que c'était Light, qui riait.
Cela commença par un léger frémissement de la gorge, subtil mais déjà si lourd, grave comme un vibrato de contrebasse, dont on râperait les cordes en avant, en arrière, en avant, en arrière, avec un archet abîmé.
Il soufflait du nez, mais brusquement, ses dents se révélèrent, et son rire se déploya dans la chambre, empreint d'ironie moqueuse. Les violons, aiguës, se mêlèrent à la caverneuse contrebasse ; le son déferlait, dissonant, âpre comme du papier de verre. Light haletait, grisé de sa voix, de sa délectable irrévérence, conscient, et fier ! du regard horrifié de Ryûzaki qui pesait sur lui.
Il faisait face au plafond, courbé en arrière, distordu, tremblant, et semblait défier les hauteurs de son souffle rauque et désaccordé. Chaque saccade s'accompagnait d'une convulsion de son corps, comme une toux qui le traversait.
Soudain il prit une gigantesque inspiration, comme quelqu'un qui s'étouffe dans la poussière ; ou a avalé de l'eau, car il recracha le liquide comme s'il crachait ses poumons, ses tripes. Les cordes vocales se heurtaient à toute cette soupe qui remontait, pour produire un son discordant, celui des cordes vocales blessées, sur le point de se briser tant elles se tendent, se tordent, s'agitent, et se secouent entre elles.
Ivre, il était ivre de son amer rire.
Il se gorgea d'air une dernière fois, comme quand on sort la tête de l'eau, à moitié noyé, et que l'on respire pour sauver sa vie. Son hilarité s'éteignit, avec les dernière mesures de l'orchestre. Lui qui était chancelant, secoué par tout cet oxygène qui s'agitait dans sa gorge, le voilà qui se plantait droit comme un i, stable. Il plaça ses deux mains en éventails devant lui.
- C'est vrai, je suis Kira, exulta-t-il. Alors comme ça, je suis pris au piège ? Le grand détective L a eu raison de l'infâme assassin ? C'est fort dommage. Tu as vu juste ! Je suis celui que tu traquais avec tant d'ardeur : parfois, il me semblait que L consacrait plus de temps à Kira que Ryûzaki à Light ! J'ai tué tous les criminels que tu essayais misérablement de protéger. Je me suis débarrassé de Kyûsuke Higuchi, qui a été une merveilleuse diversion ; j'ai manipulé la pauvre Misa, qui est accessoirement le deuxième Kira. Je t'ai berné au-delà de ce que tu pourrais imaginer, L. Les caméras chez moi ? Évidemment que je connaissais leur existence ! La séquestration de plusieurs dizaines de semaines ? Une partie intégrante de mon plan !
Des reflets de sang dansaient dans les pupilles de Light. Il levait haut son menton, impérial, drapé de sa vanité de meurtrier. Ryûzaki écoutait.
- Mais regarde autour de toi, L, grand détective. Tu verras un monde absurde. Un monde où le vice et l'ambition sont couverts d'honneur, et où les hommes se battent les uns contre les autres dans des guerres, en amour, ou pour monter dans l'échelle sociale ! Où les gens bons se font violer, torturer, tuer. Les droits de l'hommes sont de belles paroles sur lesquelles on s'essuie les pieds ! Je me suis battu pour aider les hommes, j'étais le seul à pouvoir le faire, moi et le Death Note. Je ne souhaitais qu'une lueur d'espoir ...
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L'Enfer est de papier
FanfictionEt si Light et Ryûzaki étaient déjà en couple avant le Death Note ? Il n'y a pas plus heureux que Light et Ryûzaki. Ils vivent une belle romance et l'avenir leur sourit. Mais cette perfection ne serait-elle qu'apparence ? Après tout, un simple cahie...