Élizabeth Rogers

1937

"Lizzie ? Tout va bien là-dedans ?"

Bucky toque à la porte une nouvelle fois avant de poser la même question.
Je suis incapable de lui répondre. Une quinte de toux me secoue. Mes poumons sont en feu.
Je couvre ma bouche en toussant au-dessus de l'évier de la salle de bains.

"Lizzie ?" m'appelle Bucky en ouvrant la porte.

"Ça va aller." lui dis-je en levant une main vers lui. "Je serai là dans deux minutes."

J'ouvre les yeux et fixe le sang dans l'évier et sur ma main.

"Peut-être un peu plus de deux minutes..."

"Steve ! Prépare un grand verre d'eau, s'il te plaît !" lance Bucky en passant la tête dans le couloir. "Laisse-moi t'aider, Lizzie." ajoute-t-il en posant une main sur mon épaule.

"Non, ça va." dis-je entre deux quintes de toux sanglantes. "Je gère la situation."

Je ne veux pas qu'on me voie dans cet état. Je ne veux pas qu'on me prenne en pitié.

"Tu n'es pas obligée d'affronter ça toute seule."

Je suis malade. Une maladie orpheline. Mon corps n'a rien trouvé de mieux que détruire mes organes. Notamment mes poumons.
Malgré mes protestations, Bucky me fait asseoir sur le rebord de la baignoire et prend une serviette qu'il passe sous l'eau.

"Ne bouge pas." me dit Bucky à genoux devant moi.

Bucky est le meilleur ami de mon frère. C'est un garçon grand, brun, très intelligent et absolument adorable.
Quand il a rencontré Steve, il n'a pas hésité à prendre sa défense face aux brutes de l'école. Il lui a même appris à se battre et il ne l'a jamais laissé tomber.
Et puis, je suis entrée dans l'équation. Ça n'a jamais eu l'air de le déranger, lui. J'ai toujours eu l'impression d'être la mascotte et jamais la personne en trop. Nous faisons équipe contre Steve, très souvent.
Je l'ai toujours admiré, c'est vrai. Il n'y a pas une once d'égoïsme en lui. Il est tout ce qu'on voudrait être ou devenir : altruiste, bon, courageux... Il est parfait, je l'adore.

Bucky finit de nettoyer mon visage et s'attaque à ma main, méticuleusement et avec douceur. Steve arrive au même moment avec un grand verre d'eau. Je me rince la bouche avant de boire une longue gorgée.

"Merci. À tous les deux." dis-je. "Mais Steve, tu devrais savoir que ton meilleur ami est plus réactif que toi..."

"Commence pas, Éli !" me lance-t-il en levant les yeux au ciel.

"Non, mais je suis sérieuse, Steve. Un jour, j'épouserai Bucky ! Il sait prendre soin de moi."

"Quand tu veux, poupée." me dit Bucky avec un clin d'œil.

"J'abandonne..." soupire Steve en partant.

Bucky et moi rions alors qu'il m'aide à me lever. La tête me tourne légèrement mais c'est passager.

"Tu vas le rendre dingue..." me dit Bucky en souriant.

"Mais c'est mon rôle de petite sœur, je le prends très à cœur. Et je te signale que tu m'es d'une grande aide pour le torturer."

Bucky secoue la tête.
C'est une sorte de pacte entre nous. J'adore taquiner mon frère, tout comme Bucky. Et Steve a eu un peu de mal à accepter que je fasse partie de la bande. Il était jaloux au début. Alors cette petite blague, que je vais épouser son meilleur ami, est notre meilleure attaque.

"Tu es sûre que ça va ?" me demande Bucky, sincèrement inquiet.

"Oui. La crise est passée."