Prologue - Par une nuit de printemps

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- Alors, soixante-neuf ou missionnaire ?

C'était Léon. Grand brun, yeux verts, et mexicain. C'était, selon la majorité des filles du lycée,  le garçon parfait. Il aimait la musique, était populaire et était le fils du directeur. Et le mieux, c'est que, selon des rumeurs, il avait une grosse bite. Le truc, c'est que c'est mon copain.

Beaucoup de filles étaient jalouses de moi. Pourtant, je n'avais pas beaucoup de qualités, tant physiquement que mentalement. J'étais petite, mais pas partout, selon mes meilleures amies Alyson et Eline. J'avais les yeux marrons clairs, mais au soleil, ils étaient vraiment clairs. Quant à moi, j'étais espagnole et portugaise. Enfin, "portuguay" comme disait mon ami Joshua. Et, mis à part les romans d'amour et érotiques, je n'avais pas beaucoup de centres d'intérêts.

- Alors, soixante-neuf ou missionnaire ? répéta Léon.

- On est au milieu d'un champ en pleine campagne, Léon. Je ne veux pas des épis de blé autour de moi lorsque je ferai ma première fois.

Aussi surprenant que ça puisse paraître, je n'avais pas encore fait l'amour avec quiconque. Bien que cela faisait trois mois que j'étais dans une relation, je n'avais pas envie de relations sexuelles. Disons que je n'arrivais pas à me visualiser faire ça avec quelqu'un, même Léon. Ça avait le don de l'agacer. Il voulait absolument le faire pour "vérifier certaines choses". Je n'avais jamais compris ce qu'il voulait dire par ça.

- Allez, c'est hyper romantique, quoi ! cria-t-il.

- Pourquoi c'est aussi important pour toi ? demandais-je.

- J'dois vérifier deux ou trois trucs, s'te plaît ! Tu ne vas quand même pas te préserver jusqu'au mariage !

- Et si je le voulais, ça ferait quoi ? répondis-je, énervée.

Je pris mon sac d'une main, mon téléphone dans l'autre, et je sortis du champ, agacée. Je m'en fichais qu'il me suive. Je ne voulais plus le voir, du moins, durant un petit moment.
C'était toujours comme ça entre nous deux. Parfois, il disait un truc qu'il ne fallait pas, assez maladroitement, et je finissais par m'énerver et le laisser tout seul à sa propre bêtise. D'autres fois, c'était moi qui faisait un truc qui ne lui plaisait pas. Alors, il commençait à me crier dessus et à casser plein de trucs autour de lui. Ça arrivait souvent.

Je pris ma voiture. C'était censé être un jour inoubliable. Le jour de mes dix-huit-ans.

***

Cet après-midi, Alyson et Eline m'avaient organisé une fête d'anniversaire surprise. Au moment où j'ouvrais la porte de l'appartement de ma mère, je fus surprise de découvrir tous mes amis présents, et la pièce entièrement décorée de rouge et noir, mes deux couleurs préférées. Il y avait mon gâteau au centre de la pièce. C'était un gâteau à trois étages au chocolat.

- Joyeux anniversaire ! avaient-ils tous crié en cœur.

Alyson et Eline se précipitèrent vers moi et me firent des câlins. Vinrent ensuite Emma et Joshua, puis Béatrice, ma cousine. Puis Léon arriva pour m'embrasser. Du coin de l'œil, je remarquai quelqu'un assis dans un coin, souriant.

- Ah, désolé Léa, je ne savais pas quoi faire de lui. C'est mon gars, Timothé, me dit ma cousine.

Je ne l'écoutais pas vraiment. J'avais gardé les yeux sur le garçon. Grand brun, lui aussi, yeux verts, encore une fois, lui aussi. Il me regardait avec un regard tellement bienveillant et gentil que je ne pus résister à lui sourire et lui faire un petit coucou de la main.

Il me sourit aussi. Et il me fit aussi coucou de la main.

- Allez Léa, à toi la première bière, et cul sec ! s'écria Emma.

- Je préfère savourer, répondis-je.

- Fais pas ta coincée, dis Alyson.

Ils m'encouragèrent tous, et je ne pus pas résister. Ma première, et pas dernière bière de la soirée, avait un goût étrange.

Pendant ce temps, le beau brun, Timothé, me regardait en souriant. Léon me prit dans ses bras, et m'embrassa. Je ne pensais pas à lui, pour une fois, mais au garçon au sourire.

***

J'enfonçais les clefs pour allumer le moteur. La voiture démarra. Léon accouru, haletant. Il avait beau être le capitaine de l'équipe de football du lycée, il avait une assez mauvaise cardio, à cause de la cigarette.

- Léa, mi amor, restes putain ! C'était censé être romantique ! Une nuit où aurait fait l'amour ! criait-il.

Je l'ignorais. J'appuyais sur la pédale. La voiture se mit en route, laissant le pauvre et désespéré Léon seul dans les champs de blé.

Puis, les yeux de Timothé me revinrent en mémoire.

Les roses blessentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant