Je marche dans la rue depuis cinq minutes. De la fontaine à l'église, puis de l'église à la fontaine. Rien ne me détend, rien ne lève l'angoisse. Alors que je sortais de cours et qu'Evan sortait de son bureau pour lui en donner un, nos regards se sont accrochés et un sourire mutuel s'est éclairé sur nos visages.
Il a alors saisi l'opportunité pour me cueillir, me demandant sans que je n'aie réellement le temps de réaliser si je désirais passer prendre un verre chez lui. Chez lui... Je n'étais pas prêt à une telle invitation. J'ignore pourquoi, mais je ne suis pas à l'aise à l'idée de découvrir où il vit.
Alors, en attendant qu'il rentre, je fais les cent pas dans sa rue. C'est une maison individuelle à deux étages et divisée en trois logements qui apparaît au numéro indiqué. Mon cerveau, mes jambes, ma chevalière, tout tourne en rond. Jusqu'à ce qu'il apparaisse en chemise avec sa veste jetée par-dessus son épaule.
Il s'avance vers moi avec nonchalance et m'offre il est vrai un sourire remarquable. Je sens sa fierté à l'idée de m'accueillir. S'il savait combien je suis anxieux, sans doute serait-il moins confiant... Sa veste tombe sur son bras quand il pose sa main sur mon flanc. Evan m'embrasse avec force, ce qui me surprend.
« Tu... Dans ta rue... Ce n'est pas trop risqué ?
— Regarde autour de toi, éclate-t-il de rire : des chats, des personnes âgées ou le vent. Aucun risque !
— D'accord, lui souris-je.
— Allez, suis-moi, je suis au dernier, comme toi » dit-il en ouvrant la porte.
Je suis religieusement Evan comme si j'étais un enfant timide. De la musique émane de son appartement. Je serais presque pris de panique : a-t-il un colocataire ? C'est ridicule. Je sens l'anxiété s'accroître, ce qui doit assurément me rendre différent aux yeux d'Evan. Toujours est-il que la musique persiste.
« Tu entends ? C'est du Glass. Du minimalisme. Je n'aime pas le silence alors dès que j'entre dans la résidence, la musique s'enclenche dans l'appartement. C'est une ambiance ... quelque peu spéciale. Si tu n'aimes pas, je couperai.
— C'est gentil, merci... dis-je sans trop de convictions.
— Enzo ? Tout va bien ? »
Il a posé ses affaires, il me regarde dans les yeux, avec une bienveillance qui me force à la vérité. Je me laisse aller sur son mur, le dos appuyé.
« Je n'étais pas à l'aise à l'idée d'entrer chez toi, de découvrir ton appartement... J'ignore pourquoi...
— Moi qui pensais que tu apprécierais que je ne sois pas toujours celui qui est reçu... Si tu préfères, nous pouvons partir...
— Non, non, ce n'est pas une crise d'angoisse, juste un peu de... D'appréhension j'imagine. Désolé de ne pas être aussi enjoué que d'habitude, d'être... »
Evan ne me laisse pas finir et dépose ses lèvres à moitié sur les miennes et sur ma joue. Évidemment, sa douceur me tente et je commence à l'embrasser tout en entourant son cou de mes bras. Il se laisse ainsi faire et, contrairement à d'habitude, je ne sens pas d'énergie passionnée nous envahir. Comme si ce baiser avait pour unique but de me calmer.
Il attrape ma main et m'invite à le suivre. Je découvre un appartement spacieux, notamment du fait du séjour qui donne sur un renfoncement. Je crois y reconnaître un bureau. Un couloir mène successivement à la cuisine, à la salle de bains et à deux chambres. Quand arrive celle qu'il utilise, je sens le mal-être s'accroître. Je serre la main d'Evan.
« Enzo ? Je... Dis-moi... Une question... Le problème, c'est... ? Ici, non ?
— Exact... lui répondis-je quasiment sans un son.
— N'aurais-tu pas quelque chose à me demander ? ».
Je secoue la tête. Il a compris. Que c'est agaçant de coucher avec un homme intelligent. Même si je dois bien avouer que ce soir je suis si éreinté que je ne tiens pas spécifiquement à profiter de son corps. En attendant, il faut que je m'extirpe tant bien que mal avant qu'il ne dise à voix haute la réponse à ma question.
« Nous nous sommes mis d'accord et je n'ai pas à...
— Personne d'autre depuis la première nuit ».
Je reste bouche bée. J'étais convaincu qu'il avait continué. Après tout, nous ne nous voyons que de temps à autres, tous les dix ou quinze jours. Bien sûr, parfois, nous nous volons une étreinte érotisée ou un baiser pour encore davantage vivifier le désir de notre prochaine rencontre. Mais j'étais persuadé que sa vie personnelle et professionnelle le conduirait à être plus ... prolifique ?
« Pourquoi ? ».
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Ultime évanescence (BxB)
RomantizmA Aix-en-Provence, la justice et le droit règnent en maîtres. Travailler ou étudier dans cette ville est un privilège que de rares chanceux connaissent. Que se passe-t-il quand, à cet honneur, s'ajoutent des rencontres imprévues et faisant vaciller...