Prologue

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Palermo, aéroport international Falcone-Borsellino.

Confondue au milieu d'une centaine de voyageurs, Giana avançait, tirant sa valise derrière elle, une main sur son ventre proéminant, soufflant plus que de raisons, essoufflée et épuisée par le voyage.

Normalement, à un état aussi avancé de sa grossesse, cela n'aurait pas été possible, mais compte tenue de sa dépression suite au décès brutal de son mari, elle s'était vu obliger d'accepter la proposition de ses belles-sœurs pour le bien de son tout-petit qu'elle avait failli perdre aussi. Giana s'était faite une raison et ne pouvait pas se permettre de laisser partir ce tout dernier cadeau que lui laissait son défunt mari. Cet enfant, c'était une part de lui. C'était ce à quoi elle tenait le plus au monde aujourd'hui. L'aboutissement de leur amour, la concrétisation de leurs promesses, son tout, sa seule et unique raison de vivre.
Le perdre lui aurait été impossible à surmonter. Giana détesta se remémorer ce jour là. Tout particulièrement à cause de la douleur. C'eut été une expérience horrible. Elle en eût des frissons rien qu'en y repensant.

— N'y pense plus, s'admonesta t-elle, tu es ici pour te détendre.

Plus facile à dire qu'à faire quand, dans son état et traînant avec elle presque dix kilos en vêtements et chaussures, elle avait besoin de faire plus d'une pause entre quelques pas.

À bout de souffle, la jeune femme se stoppa en bout de chemin, à quelques mètres de la sortie pour reprendre une respiration normale et calmer son envie pressante d'aller au toilette. Pour ne rien arranger, le bébé en elle s'agita subitement, lui donnant des coups de pieds à tout va. Les sourcils froncés, elle tourna la tête vers les toilettes de l'aéroport qui lui firent de l'oeil avant de se raviser soudainement, frissonnante de dégoût des pieds à la tête.
Hors de question de mettre les pieds là dedans.
Giana avait toujours eu une sainte horreur des toilettes publiques. Les mauvaises surprises, elle préférait éviter.

Prenant sur elle, elle se redressa en soufflant encore comme le lui avait appris son obstétricienne, se répétant inlassablement qu'elle serait bientôt avec ses deux belles-sœurs, dans un hôtel chouette et pourrait se rafraîchir à sa convenance. Les filles étaient dehors, à l'entrée de l'aéroport et l'attendait dans une petite voiture rouge d'après les informations qu'elles lui avaient donné. Plus que quelques mètres à franchir et elle pourrait enfin se poser, loin de tout ce monde qui lui donnait le tournis. Encore quelques pas... quelques petits pas de rien du tout...

— Est-ce que ça va ?

La voix masculine qui tonna derrière elle la fit sursauter. Giana se déroba de cette main inconnue s'étant posé sur son épaule et se tourna vers l'individu qui avait osé la toucher sans scrupule. Elle foudroya de son regard noisette, l'homme en veste de cuir, debout à quelques centimètres d'elle. Droit comme un i, il la regardait sans une once d'expression dans les yeux. Elle n'y vit passer aucune sorte d'inquiétude, pas même de la peur. Ce fût assez troublant pour elle. Quel genre de personnes s'inquiétaient pour son prochain et arboraient une expression aussi neutre et froide ?

Était-ce réellement lui qui lui avait parlé tout à l'heure, demandant comment elle allait ?

— Vous allez bien ? réitéra t-il plus fortement pour être sûr d'être entendu.

Pas de doute. C'était bien lui.

Quelque chose tournait pas bien rond dans sa tête ou quoi ?

— Euh... oui... merci.

Méfiante et pas très à l'aise avec l'aura étrange que dégageait l'homme en question, Giana reprit son chemin et pressa le pas, priant tous les saints qu'ils ne fût pas en train de la suivre. Mais l'inconnu n'eût aucun mal à la rattraper vue la vitesse à laquelle elle allait. Sans lui demander son avis, il se permit de prendre sa grosse valise, la stoppant dans son élan. Le cœur de la future maman s'emballa.

Gia et Le SoldatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant