Chapitre 6.1 - rework

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Wassalie

Sahr. Je voyage.

La seconde qui suit, je me retrouve à l'intérieur d'une grotte ou plutôt d'un tunnel creusé dans la roche. Des pioches sont déposées au sol, une charrette à moitié remplie de minéraux arrêtée sur des rails. Une lanterne d'où s'échappe une odeur nauséabonde est posée au sol, éclairant faiblement les lieux. Je fais briller mon globe pour mieux voir. Je suis dans une galeries de la mine de Bogo'Ah... Un camp de l'enfer...

Je plisse le nez en sentant l'odeur de pourriture et de sueur qui flotte tout autour de moi. J'avance de quelques pas et le voit enfin. Hyro. Il y a deux autres garçons avec lui, probablement Diego et Erin. Tous les trois sont agenouillés devant une femme allongée et sanglotent.

Je m'approche et découvre leur mère, d'une maigreur maladive. D'étranges pustules couvrent son corps. Elle respire à peine. Ses yeux grands ouverts fixent tour à tour chacun de ses enfants. Elle leur sourt malgré la douleur qui transpire par chacune de ses pores.

— Aller, maman, lève-toi ! la supplie Diego.

— Oui, lève-toi, insiste Erin. Sinon ils vont te frapper !

Les lèvres de la femme bougent mais aucun son ne sort de sa bouche.

— Maman dit qu'elle est désolée, murmure Hyro. Et qu'elle nous aime plus que tout au monde. Qu'elle est triste de ne pas nous avoir offert une autre vie. Et que nous devons désormais... apprendre à vivre sans elle.

Erin gifle Hyro si fort que ce dernier tombe à la renverse, me faisant sursauter par la même occasion.

— Tu dis n'importe quoi ! lui crie-t-il. Maman, maman !

La femme tend un bras tremblant vers son fils pour caresser sa joue humide. Puis il tombe au sol dans un bruit sourd. Pour ne plus bouger. Une larme roule sur son visage tandis qu'il se fige dans un dernier souffle.

— Maman ? l'appelle doucement Erin. Maman ?

— C'est fini, Erin, lui annonce Diego en posant une main sur son épaule.

— Qu'est-ce qui est fini ?

— Maman... est partie.

Diego fait preuve d'un tel sang-froid... Moi, je suis au bord des larmes. Comment de telles atrocités pouvaient-elles se produire ?

— C'est moi qui vais prendre soin de vous, désormais, poursuit-il.

— Maman... sanglote Erin. Non...

Les deux garçons s'enlacent, tandis qu'Hyro les observe, légèrement à l'écart. Puis il pose les yeux sur le cadavre de sa mère, une expression indéchiffrable sur le visage.

— Hyro, murmure Diego. Viens.

Mais le jeune garçon ne bouge pas. Ses yeux sont plantés dans ceux de sa mère, vitreux et sans âme. Je meurs d'envie de le prendre dans mes bras mais je sais qu'il ne faut pas interagir dans les rêves. Pour ne pas modifier les souvenirs.

Hyro pose ses mains sur le sol et serre les poings jusqu'à s'en faire blanchir les phalanges.

— Hyro ? l'appelle Diego.

Son corps se met à trembler si fort que les murs et le sol se mettent à vibrer sous mes pieds.

— Hyro ! crie Diego, affolé.

Mais le garçon ne l'entend pas. Il n'entend plus personne. Il est plongé dans un état de transe. De la fumée noire s'échappe de son corps et lorsqu'il relève son visage vers ses frères, toute trace d'innocence et de bonté ont disparu.

Il pousse un hurlement guttural qui me force à me couvrir les oreilles et me fait plier les genoux. C'est alors que je vois la chose la plus effrayante que j'ai vue dans toute ma vie. Des Ombres, telles des spectres, quittent son corps par centaines. Elles se déversent dans les galeries tel un nuage de ténèbres et d'effroi. J'entends des hurlements de toute part.

— Hyrooooo ! l'appelle désespérément Diego, allongé au sol

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— Hyrooooo ! l'appelle désespérément Diego, allongé au sol.

Il rampe vers lui malgré les Ombres qui lui barrent le chemin sans pour autant le blesser. Dans un vacarme assourdissant, les tunnels s'effondrent. Hyro pousse un nouveau cri dont le souffle est si puissant qu'il éventre la mine en ouvrant la terre au-dessus d'eux, fissurant le sol.

La lumière du jour est lointaine, mais elle illumine la cavité dans laquelle nous nous trouvons. Les Ombres s'échappent par cette nouvelle ouverture. Je lève les bras et me laisse flotter pour monter à la surface. Et j'assiste au carnage.

Les Ombres dépècent et dévorent tout sur leur passage. Les gardes, les contre-maîtres mais aussi les esclaves, les animaux, les fleurs, les arbres... Elles font disparaitre toute étincelle de vie. Je retiens un cri lorsqu'une Ombre traverse mon corps pour dévorer une femme derrière moi. Le pire, c'est qu'il ne se passe pas plus de cinq minutes avant qu'il ne reste plus rien. Avant que tout le monde soit mort. Puis soudain, les créatures disparaissent en s'évaporant.

Il me faut quelques instants pour parvenir à bouger. Je suis paralysée par l'horreur à laquelle je viens d'assister. Quand je me sens à nouveau solide sur mes jambes, je saute dans le gouffre. Ma chute est amortie par le vent. J'atterris auprès des trois frères.

Manifestement, Diego a réussi à rejoindre Hyro et le tient dans ses bras, serré contre sa poitrine. Hyro a le regard perdu dans le vague. Son frère caresse ses cheveux. Il pleure. Il le berce contre lui, comme le ferait une mère pour apaiser son enfant.

Je pose une main sur ma poitrine, émue.

— Tout va bien, je suis là, petit frère, chantonne Diego. Je suis là, ça va aller. Je suis là...

EROBYE - Tome 1 : Le MiracleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant