61 | Fatale erreur

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Mon pouls martelant furieusement dans mes tempes, les doigts crispés sur les marches du piano... figée... je l'ai écouté. Silencieuse. Attentive. Inexplicablement, je l'ai même cru. Invraisemblablement, j'ai eu confiance.

Stupidement, je continue à t'aimer.

Dans l'habitacle de l'Audi, Ludovico Einaudi joue « Expérience », mon morceau préféré. L'attention fixée sur le paysage défilant trop rapidement à mon goût, je me tourne finalement vers lui, pinçant les lèvres en découvrant ce profil parfaitement dessiné que je connais pourtant par cœur.

Pu-naise.

— Peux-tu ralentir s'il te plaît ? exhalé-je après une brève hésitation.

J'ai peur.

Je ne connais pas son véritable prénom et peine désormais à utiliser celui qu'il emprunte. Il a été très clair quant au fait qu'il lui était impossible de me le révéler, arguant que je pourrais faire une erreur. Peut-être est-ce vrai – je le reconnais – néanmoins je l'ai vivement attaqué, affirmant que j'étais convaincue que Kat – elle – le connaissait.

Ton silence fut éloquent.

— D'accord, se contente-t-il de répondre sans m'accorder le moindre regard.

En premier lieu, notre conversation s'est portée sur mon père. J'ignore pourquoi, mais il semblait absolument vouloir m'absoudre de ma culpabilité. C'était en vain, cependant j'ai appris comment papa est parvenu à nous garder loin des griffes de la mafia pendant toutes ces années. Pour commencer, à coup de fausses pistes disséminées aux quatre coins du pays, nous laissant à l'endroit le plus improbable. Celui où personne n'a eu l'idée de chercher tant cela semblait impensable. Autrement dit, juste sous leur nez et c'était finement joué, d'après l'agent fédéral.

Était-ce à cela que tu t'employais lorsque tu disparaissais plusieurs jours ?

Chemin faisant, il a fait de ma mère et moi les propriétaires d'une maison ou d'un appartement dans chaque État, sous différents noms, nos faux papiers demeurant cachés dieu sait où.

Si j'en ai l'occasion, je vendrai tout puis ferai don des bénéfices.

Puisque l'argent ayant financé ces acquisitions n'a rien de propre, vous vous en doutez certainement. Dans le but de me rendre insaisissable, il semblerait qu'il était prêt à faire n'importe quoi, flirtant discrètement avec tous les sombres milieux du monde. Pour autant, il a filé entre les doigts de chaque organisation tentant de l'arrêter. Il était le roi de la fausse identité, paraît-il. Un magicien quand il s'agissait de disparaître sans laisser de traces. Néanmoins son passé ainsi que ses vices l'ont finalement rattrapé et une fois dans l'impasse, il est revenu vers Peter, n'ayant nulle autre option pour se sortir d'affaires que la famille. Du moins l'a-t-il cru.

Savais-tu dès le départ que tu te condamnais pour nous protéger ?

Ma mère affirmait qu'il refusait que nous lui rendions visite en prison, soutenant qu'il s'opposait à ce que je le vois ainsi. Aujourd'hui, je ne suis plus sûre de rien.

À quel point as-tu connaissance de la vérité, maman ?

Je n'avais jamais compris pourquoi nous avions quitté notre appartement pour un autre dans l'heure suivant l'annonce de son arrestation. À la hâte, une seule valise à la main, elle avait seulement dit que ce serait plus facile pour nous à l'avenir. Avec le recul, c'est évident. Puisqu'elle a connu Ignacio, je présume qu'elle en sait davantage que je ne l'aurais cru de prime abord. Et suivant les habitudes de son époux, elle ne nous a déplacées que de quelques rues, nous mettant mieux à l'abri ainsi qu'à l'autre bout du pays.

Après la pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant