C’est une grande première, en ce vendredi soir de mai 2017. Ici, à Bruxelles, vient d’ouvrir le premier magasin sans employé. M, cette nouvelle société, a été bâtie sur les cendres de cette vieille entreprise de la Grande Distribution, qui fit faillite l’année dernière. Ces gestionnaires, pour relancer l’activité économique, ont pris un pari risqué : se passer entièrement de personnel. Voici donc, en exclusivité, l’interview de Monsieur B, administrateur de cette nouvelle société.
-Suite, à votre annonce, nous avons été perplexes. Comment vous est venu l’idée d’une entreprise sans employé ?
-Ce qui a coûté le plus à notre ancienne compagnie, c’était la masse salariale. Cette charge était tellement élevée que l’ensemble de notre chiffre d’affaires n’arrivait plus à la maintenir. Nous ne sommes pas les seuls dans ce cas, regardez tous nos concurrents, ils ne font pratiquement plus de bénéfices et licencient énormément pour rester un minimum rentable. De plus, avec l’évolution des technologies et les progrès en robotique, toute la manutention peut être robotisée. C’est pourquoi nous avons pris ce pari, car en plus les marges d’erreur, avec les machines, arrivent à zéro, ce qui n’est pas le cas avec un être humain. Tous nos tests l’ont prouvé, notre centre de distribution est beaucoup plus efficace et peut fonctionner 24h sur 24 !
-Vous dites donc que votre centre de distribution n’emploie aucun humain ? Et pour le transport, comment faites-vous ?
-Oui, il n’y a aucun humain qui y travaille. En cas de problème et de dysfonctionnement, le centre de robotique qui nous a vendu ses appareils se déplace chez nous et règle automatiquement le problème. Quant au transport des marchandises, nous avons fait temporairement appel à une société de sous-traitance. Le conducteur n’a même pas à sortir de son camion, nos machines sont capables de charger et décharger le camion tout seul. Comme tout est contrôlé informatiquement, un manque lors d’une commande est automatiquement détecté et reporté au fournisseur. Quant à la livraison en magasin, il n’y a aucune marge d’erreur possible. Et bientôt, nous pourrons également nous passer de sous-traitance pour le transport, lorsque la commercialisation des GoogleTrucks (ndlr : camion automatisé, comme les voitures sans pilote commercialisés par Google) sera effective l’année prochaine. Nos camions sont déjà commandés, nous attendons juste le lancement officiel et la livraison.
-Et en magasin ?
En magasin, c’est pareil. Les produits sont mis en rayon par des robots, principalement hors des heures d’ouverture, pour ne pas gêner nos clients. Le facing se fait automatiquement par le rayon lui-même qui avance les produits dans le rayonnage lorsqu’un trou est calculé. Pour les commandes de réapprovisionnement, tout est calculé selon les ventes effectuées. De plus, comme tout le monde a maintenant l’habitude des caisses automatiques et du self-scanning, nous n’avons plus besoin de caissier non plus.
-Mais cela reste dangereux, de ne pas avoir de contrôle humain. Vous n’avez pas peur des vols ?
Absolument pas ! Tous nos produits sont équipés de nanopuces RFID. Celles-ci sont désactivées lors du passage en caisse. Si quelqu’un tente de passer le portique de sécurité avec un produit non scanné, les portes se ferment automatiquement et les services de police sont automatiquement prévenus. Ce sont eux qui se chargent de la verbalisation ou de l’arrestation éventuelle d’un voleur. Nous avons d’ailleurs conclu un accord, la première contravention fait place à une amende. Des méfaits successifs font l’objet de plainte plus élevées. Quant aux problèmes de caisses, ils sont inexistants, tous les paiements se font de manière électronique.
-La grande distribution est un secteur qui compte énormément d’emplois. N’avez-vous pas peur que vos concurrents vous emboîtent le pas et que cela crée de nouvelles catastrophes sociales ?
-Si nos concurrents nous emboîtent le pas, il leur faudra du temps pour s’adapter à ces technologies. L’avantage que nous avons eu est que nous avons pu partir sur les cendres d’une ancienne entreprise, et comme elle n’était plus en activité, nous avons pu rapidement tout mettre en place. Le temps d’adaptation de la concurrence nous permettra certainement de mieux appréhender ce problème et de le contrecarrer, sans compter les turbulences d’un mouvement social suite à une vague de licenciement, qui ralentira le processus. Quant à une catastrophe sociale, ce n’est pas de mon ressort, c’est aux politiques à prendre réellement en compte l’évolution technologique, ce qu’il n’arrive pas à faire depuis belle lurette. Je ne suis pas là pour faire du social, je suis là pour faire tourner ce commerce. Une baisse de chiffre d’affaires ? Je ne m’en fais pas, les gens auront toujours besoin de nous pour leurs besoins de base.
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Histoires "Bloguesques"
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