Avez-vous déjà ressenti cette singulière sensation, lorsque vous vous apprêtez à entreprendre un nouveau départ dans votre vie ? Une excitation mêlée d'appréhension s'empare de vous et votre esprit semble submergé de doutes et d'interrogations. Vous êtes à la fois impatients de franchir un nouveau cap vers une destination inconnue, mais vous vous sentez freinés par un sentiment d'incertitude qui vous empêche d'aller de l'avant. Voici ce à quoi se résumait mes pensées ce matin d'automne, lorsque que nous roulions en direction de la gare Ilyane et moi. Plus nous nous approchions de la destination, plus je sentais le stress monter en moi. Mes mains devenaient de plus en plus moites et mes jambes commençaient à chanceler. Je m'amusais inconsciemment à enrouler mes longues mèches de cheveux ondulées autour de mon indexe tout en mordillant nerveusement ma lèvre inférieur. Ilyane, qui était assis sur le siège conducteur, avait du me remarquer car pendant un court instant il semblait amusé par mon attitude.
"- Tu devrais essayer de te détendre un peu." me dit-il les yeux rivés sur la route. Mais je ne répondis pas et continuai de tripoter ma chevelure.
" - Tu verras, tu vas te plaire là-bas", reprit-il le sourire aux lèvres, en posant finalement ses yeux verts émeraude sur moi. Il n'y a pas de quoi angoisser, tout se passera bien j'en suis sûr.
" - J'veux pas y aller ... , soufflai-je agacée.
- Mais tu devrais. C'est une occasion en or, tu dois pas laisser passer ça.
- Je sais .." soupirai-je en fermant les paupières. Ces mots mirent fin à la conversation, et Ilyane n'insista pas. Il savait pertinemment que le moindre mot prononcé pourrait me faire éclater en sanglots. Nous continuâmes alors de rouler dans le silence pendant que j'envoyai quelques textos à mes amies pour leur annoncer mon départ. Je finis par ranger mon téléphone portable dans mon sac et récupérai mon billet de train. Je me mis à le fixer longuement avant de lâcher un long soupir de contrariété. Ilyane se gara finalement sur la place de parking d'un fast-food, et coupa le moteur de sa voiture.
- "Ton train ne part pas avant deux heures." déclara-t-il en jetant un oeil à la montre que je lui avais offert pour ses 21 ans. Je ne répondis pas et crispai mes mains sur mon billet en m'efforçant de ne pas pleurer. Il se tut à son tour et posa sa main sur ma tête. Il plongea ses iris dans les miennes et afficha un sourire radieux qui avait le don de me réconforter chaque fois que j'en avais besoin.
"- Ça va aller soeurette, j'te le promets.
- Oui .. , dis-je en esquissant moi aussi un sourire." J'essayai au mieux de rester forte et tentai de dissimuler ma peine pour ne pas que mes derniers instants passés avec mon grand frère soient si stupidement gâchés.
"- Aller, on va manger un bout et profiter du temps qu'il nous reste." reprit-il avec toujours la même gaieté. J'acquiesçai joyeusement d'un hochement de tête avant de sortir de la voiture. Il fit de même et nous entrâmes dans le fast-food pour nous restaurer avant mon départ. L'endroit étant casiment vide, un calme apaisant y régnait. Il n'était que 10h30, nous nous contentâmes donc de commander quelques smoothies et une part de moelleux au chocolat. Je me sentais dès à présent mieux et mon stress commençait peu à peu à évacuer. Ilyane ne semblait pas me porter attention. Il sirotait silencieusement son smoothie en s'amusant à mélanger sa boisson avec sa paille. Quant à moi, bien que je commençais à decompresser, j'éprouvais toujours un peu de chagrin. J'étais encore trop nouer pour pouvoir avaler quoi que ce soit. Mes yeux se posèrent sur mon frère assis en face de moi qui jouait toujours avec son verre puis sur le ciel gris et nuageux que je pouvais apercevoir à travers les fenêtres du restaurant. Mon esprit se dispersa et je me mis à penser malgré moi à ce qu'il venait de m'arriver. Je me remémorai une fois de plus ce que la lettre disait : "Nous avons le plaisir de vous annoncer que vous êtes admise dans notre établissement. Nous serons donc fiers de vous compter parmi nos élèves." L'idée de me retrouver loin des miens me consumait de l'intérieur et je me demandais si cette école vallait réellement la peine de faire autant de concessions. Néanmoins, une sorte d'excitation venait tout de même perturber mon subconscient et je crois qu'au fond de moi, je me réjouissais de pouvoir y poursuivre mes études. Ils allaient certes tous horriblement me manquer, Maman, Papa, mes amies amies, et surtout Ilyane, mais cette expérience s'avererait être très enrichissante. Mon train démarerait à 12h45 et le trajet allait durer environ deux heures, j'arriverais en milieux d'après midi, soit une heure avant l'heure du rendez-vous. J'ignorais ce que j'allais bien pouvoir faire pendant ce temps, sans doute me promener, et decouvrir les environs pour évidemment me perdre ensuite. Ou tout simplement m'asseoir sur un siège et attendre patiemment que l'on vienne me chercher."Je suis fier de toi, tu sais." déclara soudainement mon frère pendant mon moment d'absence. Je tournai vivement la tête et posai mes yeux sur lui.
- "Hein, quoi ? M'écriai-je perdue"
Il se mit à rire et remit sa paille dans la bouche sans me lâcher du regard. Il venait de me complimenter, chose qu'Ilyane avait rarement l'habitude de faire.
- "J'ai bien entendu, tu es fier de moi ? Retorquais-je avec un sourire narquois.
- M'ouais, contente toi de rien foirer surtout, d'accord ?
- C'est pas mon genre, tu le sais.
- Non c'est vrai, toi t'es plus fayotte.
- Être une bonne élève ne fait pas de moi une fayotte.
- Ça va j'rigole. Tu es la fierté de la famille, tu le sais bien.
- Ne dis pas de bêtises, nos parents nous aiment autant l'un que l'autre.
Il ne répondit pas et haussa les épaules. Bien que nous sommes frères et sœurs, Ilyane et moi ne nous ressemblons pas du tout, autant physiquement que mentalement. De mon coté, je me suis toujours arrangée pour avoir les meilleures notes. Ilyane, lui, a arrêté l'école très tôt. Les études ne l'ont jamais intéressé. Le meilleur terme qui le qualifierait serait "bad boy". Toujours habillé d'un survêtement et les cheveux ébène coiffés avec une bonne de dose gel, il passait son temps à vouloir se battre avec tout le monde. Il avait un teint mat et de magnifiques yeux vert océan que je lui enviais. Et bien qu'âgé de quatre ans plus que moi, je me sentais très proche de lui. Ilyane était probablement l'être que je chérissais le plus sur cette terre.Mon train n'allait pas tarder à partir et Ilyane nous conduisit rapidement à la gare. Je sortis de la voiture le coeur serré, suivie de mon grand frère qui portait mes bagages. Je me tenais à présent sur le quai, interdite et désemparée, face à lui. Il posa mes valises et s'approcha doucement.
" - C'est l'heure .." , fit-il d'une voix étonnement calme. Je ne répondis pas en m'efforçant de rester le plus impassible possible. Il plaça alors ses bras autour de moi avant de refermer son étreinte. Il passa une main dans ma chevelure, et posa son autre main sur mon dos. Les miennes alors posées sur son torse, je vins les glisser autour de son cou pour le serrer à mon tour. Je laissai malgré moi échapper quelques larmes silencieuses qui perlèrent le long de mes joues. Sa chaleur et ses bras forts et si doux à la fois me réconfortaient, je me sentais heureuse et en sécurité contre lui. À cet instant précis il approcha ses lèvres de mes oreilles et me murmura tout ce dont j'avais besoin d'entendre : "Je t'aime Alya, ma petite soeur". Il me lâcha doucement puis vint poser un doux baiser sur mon front. Je m'eloignai doucement le coeur lourd pour rejoindre mon vagon. Il me dit au revoir pour la dernière fois d'un signe de main et me cria quelque chose comme "ne fais pas de bêtise". Le train démarra et s'éloigna peu à peu de la gare. La silhouette d'Ilyane sur le quai s'estompait au fur à mesure que nous avancions, et finit par devenir un ridicule point noir indistinguable qui ne tarda pas à disparaitre dans l'horizon. J'enfouis mon visage dans mes mains tremblentes de chagrin et étouffa quelques sanglots. Un frisson envahit soudain tout mon corps et je me sentais comme paralysée de l'intérieur. J'ignorais d'où me venait cette sensation, mais j'avais un mauvais pressentiment.
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Mon frère, ma vengeance
RandomNi la richesse, ni la beauté, ni la notoriété ne m'ont un jour intéressées, non. Mon seul et unique souhait a toujours été celui d'affirmer avec toute sincérité : "aujourd'hui je suis HEUREUSE !". Bienvenue dans mon monde, là où le bonheur est éphém...