Chapitre 2

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Daryl

Sans faire de bruit, je m'approche derrière mon coéquipier qui est occupé à vérifier l'état de sa moto. Il m'a tourné le dos, situation qu'il éviterait s'il ne me croyait pas sous le chapiteau. Encore une fois, j'ai abusé de sa confiance en lui laissant croire que j'allais demander à Papi, notre mécanicien, s'il nous rejoindrait ce soir.

Pour mon plus grand plaisir, il a mordu à l'hameçon sans même douter un instant de mes intentions. Je ris déjà de ma prochaine attaque, tout à fait inoffensive, qu'il ne voit pas venir. Aussi silencieux qu'une bête à l'affût du moment idéal pour surprendre sa proie, j'atteins une distance raisonnable pour mettre mon plan à exécution. Dès qu'il se penche, je me jette sur lui, une jambe de chaque côté de son bassin et les bras bien agrippés à son cou.

—Ahhh !

— T'es trop prévisible, Carlos ! C'est la troisième fois cette semaine, hurlé-je à son oreille tandis qu'il tente de reprendre son équilibre.

Dios !* Tu vas finir par me tuer !

Il est si jeune et naïf ! Et pourtant, notre alchimie est incroyable. « Un duo de choc » se complaisent à répéter les grands commentateurs sportifs des chaînes spécialisées.

Notre force provient de l'énergie commune qui nous habite. J'adore sa vivacité sur le terrain et notre complicité au quotidien. Par chance, il n'a rien à voir avec mon ancien coéquipier dont le sourire restera un mystère.

Les astres sont alignés pour une année formidable, car je sais que Carlos apprécie ma spontanéité autant que Jack la détestait. Et pour le professionnalisme, le petit Cortez m'impressionne chaque jour un peu plus. Il n'a que dix-huit ans et pourtant, il vient de me battre, moi, le champion en titre de l'an dernier.

Qu'à cela ne tienne, cette course improvisée nous a permis de travailler nos virages ; c'est tout ce qui était prévu pendant notre séjour au circuit Asm Motosport. Il ne le sait pas encore, mais j'ai ralenti le tempo pendant quelques tours pour vérifier mon nouvel équipement. D'ailleurs, il faudra que mon mécanicien ajuste l'assise de mon bolide.

Ce matin, Carlos a reçu la nouvelle moto que Papi a démontée, puis reconstruite. L'ajout de pièces plus aérodynamiques et le délestage des instruments superflus qui alourdissaient la Ducati ont contribué à améliorer sa vitesse. En Superbike et Supersport, les ligues dans lesquelles nous évoluons, il n'y a rien de plus important, mis à part un poids minimum à respecter pour assurer la sécurité des participants sur la piste.

Et c'est là que les doigts à l'agilité sans limite de notre mécanicien font la différence. Son air bourru pourrait en rebuter plus d'un , mais lorsque les gens apprennent à le connaître, ils découvrent une vraie soie. Jamais il ne refuse de faire des modifications. Encore aujourd'hui, il nous a prouvé qu'il est loin d'avoir perdu la main.

Carlos rigole à mon geste spontané, passant à un poil de s'effondrer sous mon poids. J'ai six ans de plus que lui, mais mentalement, c'est moi qui suis le plus jeune.

Ma main atterrit dans ses cheveux bouclés.

—Félicitations Cortez, tu mérites ta place sur cette équipe, dis-je en secouant ses mèches dans tous les sens.

Tandis que mon coéquipier tente de me déloger de ses reins, Papi nous rejoint et reçoit notre trop grande joie de vivre entre les bras lorsque Carlos recule sans le remarquer. Il nous repousse en douceur sans toutefois aider Cortez à se libérer de mon emprise.

— Bravo fiston, dit-il en lui donnant une bonne tape sur l'épaule. Daryl va devoir mettre les bouchées doubles pour rattraper son retard.

— Hé ! Rouspété-je tout en m'agrippant comme un forcené au cou de mon coéquipier. Je suis ici ! Vous pourriez au moins attendre que je sois ailleurs pour parler de moi.

Burn outOù les histoires vivent. Découvrez maintenant