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Daniela


Alors que je terminais l'e-mail que j'écrivais à l'investisseur potentiel que je devais voir à Paris, Magali raccrocha, l'air préoccupé. Je refermai l'écran de mon ordinateur portable.

─ Hé, Mag. Qu'est-ce qui ne va pas ? m'enquis-je en dévissant ma bouteille d'eau. (J'en pris une gorgée). Tu fais une drôle de tête.

─ C'était Vincent...

─ Oui, je sais. Il a quoi ?

Magali fixait le paysage qui défilait derrière la vitre du TGV, l'air sombre. Je l'entendis soupirer.

─ Il... il a rendez-vous pour voir un spermologue, demain, et il est pas bien.

Je fronçai les sourcils.

─ Comment ça ? Pourquoi ? Vous commencez à peine vos essais, non ?

Magali fit lentement « non » de la tête.

─ Je te l'ai pas dit, mais en fait, ça va faire un an qu'on essaie, chuchota-t-elle, l'air morose. Et rien. Je suis persuadée que tout va bien, mais... et si...

─ Il me semble qu'il ne faut s'inquiéter qu'au bout de deux ans, lui rappelai-je d'une voix douce, pour la rassurer. Vous avez encore plein de temps devant vous.

─ Oui, c'est ce que je lui dis, mais il stresse, il est persuadé qu'il y a un problème, et déterminé à le trouver. Du coup, ça me stresse, moi aussi. Et je lui en veux.

Elle se rongeait un ongle.

─ Concevoir, ça devrait être un truc léger et joyeux, non ? Maintenant, ça tourne au « problème ». En fait, je pense qu'on devrait arrêter les essais pendant quelques temps, mais j'ose pas lui dire. J'ai l'impression qu'il prend tout ça personnellement - le fait que je ne suis toujours pas enceinte alors qu'on a parlé de ça y'a un an - comme s'il n'était pas assez viril ou je ne sais quoi. J'en ai marre, je sature.

─ Si ça peut te rassurer, dis-je doucement, moi aussi.

Cette escapade était la bienvenue. Franchement, je ne savais plus où j'en étais. Je me sentais confuse, déboussolée, un peu triste aussi.

Je pris Magali dans mes bras, et elle posa la tête sur mon épaule.

─ Au final je ne suis plus certaine de vouloir un enfant maintenant. Je pense qu'il vaudrait mieux qu'on se concentre sur notre couple, Vincent et moi. On en a besoin.

**

Lorsque nous frappâmes à la porte de Lisa, après deux heures de train et une petite marche dans les rues agréables du Mans, elle s'ouvrit en grand sur notre amie, rayonnante. Nous nous tombâmes dans les bras en riant.

─ Je suis trop contente de vous voir ! s'écria Lisa, un sourire jusqu'aux oreilles. Ca me fait tellement plaisir !

─ Tu es ravissante, lui dis-je. Hein, Mag ?

─ Et comment, confirma Magali, souriante.

Lisa avait accouché de son deuxième enfant trois mois auparavant à peine, et n'en avait même pas l'air. Cheveux coupés au carré, t-shirt rouge à rayures blanches baillant sur son ventre plat, jean ajusté, air épanoui ; la maternité lui réussissait à coup sûr.

─ Oh, arrêtez de me flatter ! Venez plutôt, Bruno est dans le jardin avec les gamins. Il ne fait pas trop chaud, aujourd'hui, on en profite.

Nous traversâmes le rez de chaussée spacieux de la maison pour sortir dans le jardin bien entretenu de Lisa et Bruno. Lunettes de soleil sur le nez, Bruno tapait dans un ballon de foot qu'il envoyait à Benjamin. Dans une grenouillère jaune citron, la jeune Stella était étendue sur une couverture, à l'ombre, et brassait l'air de ses petits bras.

Le Versant du Soleil (HB tome 3)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant